jeudi 5 décembre 2024

« Migrations, une odyssée humaine »

Le Musée de l'Homme propose l’exposition politique, historico-botanico-archéologico-géographico-gastronomico-artistiques immigrationniste et partiale « Migrations, une odyssée humaine ». Sans respect de la chronologie, l'exposition multiplie les carences de ce phénomène - enjeux démocratiques, heurts de civilisations, surreprésentation dans la délinquance, etc. - pour présenter une vision quasi-morale de l'accueil des migrants, en éludant toute voix discordante. Centrée sur les êtres humains, l'exposition évoque aussi les migrations de... fruits et légumes.

« Ô vous, frères humains ». Luz dessine Albert Cohen 

« Comprendre les soubassements des migrations, sortir d'une vision manichéenne et renouer avec la complexité d'un phénomène inhérent au monde vivant sans jugement de valeur : telles sont les ambitions de l'exposition »
Gilles Bloch, président du Muséum

Situé place du Trocadéro, le Musée de l’Homme « est un des 12 sites français du Muséum national d’Histoire naturelle. C'est un lieu qui explore les racines et l’avenir de l’humanité ».  

« Le Musée de l’Homme s’affirme comme un musée de société engagé dans les débats contemporains. Depuis sa réouverture en 2015 et sa première exposition Nous et les autres, des préjugés au racisme, le musée propose des approches aux multiples voix et des outils pour mieux appréhender le monde d'hier, d'aujourd'hui et de demain. Le Musée de l’Homme se positionne ainsi comme un lieu de débat citoyen, pour nous aider à éclairer le monde complexe qui nous entoure », a écrit Aurélie Clemente-Ruiz, directrice du Musée de l’Homme.

« La question des migrations humaines occupe une place centrale parmi les sujets de société, en France comme ailleurs. Fermetures de frontières, politiques d’accueil controversées et drames humains, provoquent des débats incandescents. Il fait circuler tant de fantasmes, de chiffres contradictoires et d’interprétations antagonistes, que la société se trouve aujourd’hui fracturée sur cette question. Le Musée de l’Homme propose à ses visiteurs, avec sa saison Migrations, une nécessaire prise de recul sur le sujet ». Cette saison débute par l'exposition « Migrations, une odyssée humaine » et se poursuivra par l'exposition "Wax. Entre héritage et réappropriation." (5 février-7 septembre 2025)

Financée par l'argent public, cette exposition se caractérise par sa partialité, sa politisation ou son idéologie immigrationniste, ses carences informatives majeures et son non respect de la chronologie. En résumé : la migration est un phénomène qui a existé de tout temps, et induit, non pas le "grand remplacement" mais le métissage. Et on est invité à supprimer tous les obstacles, dont les murs marquant des frontières, à ces migrations et on est prié de s'en réjouir. Une telle déconnexion de la réalité étonne. Rappelons que la France n'est pas un "pays d'immigration" : l'immigration remonte à la deuxième moitié du XIXe siècle, et une partie importante des Italiens immigrés en France a préféré retourner en Italie.

L'exposition s'ouvre sur des affiches de films sur des immigrés, dont L'émigrant (The Immigrant) de et avec Charlie Chaplin (1917) et L'Emigrante Léo Joannon avec Edwige Feuillère et Jean Chevrier (1940). Les immigrés de 2024 ressemblent-ils aux personnages de ces longs métrages ?

Quid des mafias organisant ces trafics humains ? Quid des ONG dont le chiffre d'affaires et le train de vie fastueux de leurs dirigeants ? Quid du droit d'un Etat souverain de définir sa politique migratoire, y compris en érigeant des murs ? Quid des entraves de "gouvernement des juges" nationaux et européens ? Quid du discours-type, préformaté, mélodramatique, livré par les trafiquants d'êtres humains - homosexuel ou militant droitsdel'hommiste persécuté - déroulé devant l'OFPRA (Office français de protection des réfugiés et apatrides) par des demandeurs d'asile aidés d'interprètes et d'avocats grâce à leur aide juridictionnelle entièrement gratuite, mais payée par les contribuables ? Quid des expulsions de migrants subsahariens par les autorités tunisiennes ?

Durant le parcours de l'exposition, un espace invite le visiteur à un jeu : définir sa politique migratoire. On ne comprend pas comment l'immigration permettrait de "faire vivre" nos "valeurs politiques".

Quid du djihad et des invasions ? Quid du rôle des migrants dans les attentats de Paris (2015) et de Bruxelles (2016) : "Abdelhamid Abaaoud est le premier kamikaze à avoir pris la route des migrants, dès août 2015, alors qu’on le croyait en Syrie. Son ami Salah Abdeslam ira ensuite chercher dix de ses complices en voiture" ?

Quel est le coût net des immigrés en France ? "Selon une étude de l’Observatoire de l’immigration, l’immigration est l’une des sources de la saturation de l’offre de soins en France. Elle met même en péril financièrement le système de santé français". "Une étude de 2017, Jean-Paul Gourevitch estimait le coût net de l'immigration à plus de 17 milliards d'euros par an (en intégrant tant les bénéfices de l'immigration que ses coûts)". Selon l’étude du CEPII de 2018, "l’immigration coûterait, pour la dernière année considérée (2011), entre 0,49% (scénario de base) et 1,64% de PIB (scénario 2e génération, ce qui représente 40 milliards d’euros en points de PIB de 2019)."

L'exposition présente une vision misérabiliste et culpabilisatrice - "Aïssa nettoie votre bureau chaque matin, et pourtant sans-papier" -, comme si le "migrant" était nécessairement sans diplôme, et en butte à une administration hostile. Le recours à l'immigration permet à certains employeurs de maintenir à la baisse les salaires. Si l'immigration était une "chance pour la France", l'émigration est-elle une chance pour le pays de l'émigré ? Et certains Français habitent dans des zones rurales dépourvues de certains équipements hospitaliers - "déserts médicaux" induits par la politique de fermetures de services médicaux -, ne peuvent même pas se payer une mutuelle ou vivent dans les rues, alors que des immigrés bénéficient d'hébergements et de l'AME (aide médicale de l'État). Pour réduire le déficit budgétaire, les gouvernements successifs n'ont pas supprimé ou écrêté les droits des "migrants" , n'ont pas combattu les fraudes sociales dont bénéficient ces "migrants" qui seraient stigmatisés en France, mais ont fait peser sur les Français le coût de l'immigration en sabrant leurs droits.

La pauvreté ou le "changement climatique" seraient-elles les causes des migrations ? "Les migrants quittent leur pays pour deux raisons paradoxales qui se conjuguent dans des proportions variables : parce que leur pays va mal — dramatiquement mal ou, si l’on peut dire, normalement mal — et parce qu’eux-mêmes s’en sortent financièrement mieux que d’autres sur place et qu’ils ont donc les moyens de leur ambition de faire "quelque chose" de leur vie, de ne pas la subir mais de la mener. Une grande partie des migrants viennent actuellement de pays comme l’Egypte, la Tunisie, la Côte d’Ivoire ou le Sénégal, des pays où l’on peut survivre, et même mieux, sans avoir besoin de fuir. Les hommes sont largement surreprésentés et il y a parmi les migrants de plus en plus de mineurs non accompagnés, qui bénéficient en Europe de la protection légale de l’enfance. On peut s’indigner que des mineurs soient ainsi envoyés en têtes de pont d’un futur regroupement familial mais, vu d’en face, qui veut la fin veut les moyens", a expliqué le journaliste et professeur d'études africaines à l'université Duke (États-Unis) Stephen Smith.

Quid de la discrimination positive, notamment dans l'accès aux grandes écoles ? Quid de la surreprésentation des immigrés dans le logement social : "35% des immigrés vivent dans un logement social". Le "nombre d’immigrés locataires en HLM est de 49 % (Algérie), 48% pour les autres pays africains, 45% (Maroc), 38% (Tunisie ou Turquie) contre 15% (Portugal), 13% (Espagne) ou 10% (Italie)". 

Quid de la surreprésentation des étrangers dans la délinquance et dans les prisons françaises ? Après les assassinats de la petite Lola et de Philippine par des étrangers sous OQTF (Obligation de quitter le territoire français), cette exposition partiale, évacuant tous les aspects problématiques des migrations, choque. Bruno Retailleau a été questionné sur l’immigration en France. Lors d’une audition au Sénat, le 27 novembre 2024, le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau a d’abord évoqué la présence de ressortissants afghans sur le territoire français, relaie BFMTV. « On a un souci avec la population d’Afghans qui est en France, dont certains sont très islamisés », a-t-il déclaré, en parlant de « menace ». Il a toutefois rappelé que d’autres Afghans étaient aussi « parfaitement inoffensifs ». Ne sachant pas que la séance était filmée, Bruno Retailleau a voulu donner un exemple sur l’islamisation de certains Afghans en France en parlant de « l’un des derniers attentats qu’on a déjoué ». 

Quid de l'échec de l'assimilation d'un grand nombre d'immigrés ? L'exposition occulte les différences entre civilisations, qu'un être humain voyage en emportant sa vision du monde, sa culture, ses pratiques, etc. qui parfois contreviennent à celles du pays d'accueil. Ce qui rend souvent impossible l'assimilation. Les citoyens sont attachés à leur identité nationale et sont enracinés.

Parmi les questions éludées : la France endettée, en voie de sous-développement, avec une classe moyenne appauvrie a-t-elle les moyens d'accueillir "toute la misère du monde" ? Cette immigration de masse ne contribue-t-elle pas à la baisse du niveau scolaires et des exigences d'enseignants ?

Autre carence : quelles sont les conséquences en termes électoraux d'une immigration incontrôlée ? Est-ce conforme à la démocratie que des maires découvrent l'arrivée et l'installation de migrants ainsi que l'ouverture de Centres d’accueil des migrants (CADA) dans leur ressort territorial sans même avoir donné leur accord ? Dans son article "Carte électorale : les biais politiques d’un critère démographique à bout de souffle" (Le Figaro,  9 janvier 2024), Emmanuel Galiero écrivait : "Sous l’effet de la pression migratoire et démographique, le critère de la population totale fixant le nombre de députés n’est plus une garantie démocratique". Il analysait l'étude d'Alain Marleix, ex-secrétaire d’État à l’Intérieur et aux Collectivités territoriales sous Nicolas Sarkozy (2008-2010), instigateur du dernier redécoupage des circonscriptions en 2009-2010 et également très impliqué dans celui de 1988, et de Thomas Ehrhard, maître de conférences en science politique à l’université Panthéon-Assas, chargé de cours à l’École polytechnique, récompensé pour sa thèse sur le découpage électoral sous la Ve République.

Dans un article pour BD Voltaire, Frédéric Sirgant présente ainsi cette étude :
"La carte des circonscriptions doit être régulièrement révisée en fonction des évolutions démographiques : certaines perdent des habitants, d'autres en gagnent. L'égalité des citoyens devant le suffrage exige donc que chaque circonscription rassemble un même nombre d'habitants. Environ 120.000, selon les calculs actuels, avec une marge de plus ou moins 20 %, pour tenir compte des autres critères (géographiques, un député minimum par département, etc.).
Mais voilà : le critère principal retenu, en France, pour ces redécoupages périodiques « n’est pas basé sur la nationalité ou sur l’inscription sur les listes électorales, mais sur le nombre total d’habitants, dont une partie n’a pas le droit de vote ». 
Les auteurs de l'étude soulignent "le poids de l'immigration dans certains départements, qui leur confère de facto des sièges en plus. Sont donc avantagés les départements des grandes métropoles à forts flux migratoires, comme la Gironde, la Haute-Garonne, la Seine-et-Marne et le Val-d'Oise, par exemple. Or, pour Marleix et Ehrard, dans ces départements, cette immigration croissante entraîne « des inégalités de représentation entre circonscriptions ». Leurs calculs fournissent des exemples parlants : « La voix d’un électeur de la 6e circonscription de Seine-Saint-Denis vaut deux fois plus (1 voix pour 57.421 inscrits, ratio de 38,6 %) que celle d’un électeur de la 3e circonscription de Vendée (1 voix pour 134.805 inscrits, ratio de 92,2 %), alors que les deux circonscriptions, qui élisent 1 député chacune, comptent sensiblement le même nombre d’habitants, soit 148.794 pour la première, contre 146.273 pour la seconde. » Vous pourrez aller consulter les autres exemples et constater que la gauche est la grande gagnante de l'affaire : sur les 20 circonscriptions dont le nombre d'inscrits sur les listes est faible par rapport à la population, 18 avaient, en 2022, un député de gauche !"
"Alain Marleix, ex-député UMP du Cantal et père d'Olivier Marleix, réélu en juin dernier en Eure-et-Loir, tenait en janvier un discours radical : « La conséquence politique de cette situation est une grande distorsion dans la représentation au Parlement. On ne peut pas continuer comme cela, car la ruralité, déjà mal en point, risque de l’être encore plus. Plus les étrangers sont nombreux en France, plus notre système électoral est faussé. Cela pose un problème démocratique. » Il ne croyait pas si bien dire et les résultats du 7 juillet dernier ont encore confirmé ce rapt antidémocratique de la gauche".
"Surtout, les deux auteurs nous mettent en garde sur l'amplification de cette distorsion démocratique pour le prochain redécoupage. En s'appuyant sur la comparaison entre la Haute-Garonne (10 sièges pour 937.729 inscrits) et la Seine-Saint-Denis (12 sièges pour 800.507 inscrits), ils affirment que « la présence d’étrangers favorise le nombre de sièges accordés aux départements qui en comptent le plus ». Le nombre total de députés étant plafonné, le même problème se posera par exemple à Mayotte, soumise à une immigration incontrôlable."
"La solution est connue : comme dans de nombreux pays du monde, il faudrait « retenir le nombre de citoyens ou d’inscrits sur les listes électorales plutôt que celui des habitants ». Une solution ayant inspiré une proposition d'Alain Marleix et du gouvernement Fillon en 2009, mais censurée par le Conseil constitutionnel. 

Curieusement, l'espace consacré à la Préhistoire se situe au milieu du parcours de l'exposition.

Des livrets pour les jeunes visiteurs sont offerts afin qu'ils découvrent le parcours de trois migrants : la danseuse Pandimi, Claudia et Alvine.

« C’est un état des lieux de la recherche scientifique sur le phénomène migratoire qu’offre le Musée de l’Homme avec cette grande exposition temporaire. Dans la ligne de celles qu'il produit sur des grands sujets de société depuis sa réouverture en 2015, comme Nous et les autres, des préjugés au racisme (2017), le musée investit aujourd'hui la question des migrations humaines. Pour la décrypter, à partir de données fiables, et examiner l’idée que l’on s’en fait. »

« Face aux fantasmes et aux interprétations antagonistes de chiffres contestables, l’exposition convoque l’anthropologie, la démographie, l’archéologie, la génétique, la sociologie, le droit, la géographie et l’histoire. »

« Son parcours, déployé dans une scénographie audacieuse et colorée, présente des objets caractéristiques des migrations issus des collections du Muséum ou de prêts, des témoignages, des films pédagogiques, des visualisations de données, des documents d’archives et des œuvres d’art. Les œuvres d’art et les témoignages qui jalonnent l’exposition invitent parallèlement à une découverte tout en sensibilité des parcours individuels. » 

« L’ensemble fournit des clés de compréhension essentielles pour saisir la complexité des phénomènes migratoires, à l’échelle de la planète et sur le temps long. Elle s’appuie sur les représentations des migrations pour mieux les déconstruire, oppose les faits aux idées reçues, les chiffres aux croyances et le temps long aux vues court-termistes. »

« C’est par l’imaginaire et l’image que l’on entre dans l’exposition, avec une introduction en vidéo qui projette des représentations de déplacements humains à différentes époques. Files d’attente, moyens de transports, joie ou crainte de l’arrivée, ces images imprègnent nos consciences et nos inconscients, peuplés de figures d’explorateurs héroïques, de pionniers courageux, d’exilés désespérés et d’envahisseurs menaçants… »

Un parcours en trois temps
« La première partie de l’exposition « Les mots de la migration », explore justement les représentations que l’on se fait des migrations, en commençant par définir les mots employés : migrant, immigré, exilé, sans-papier, réfugié, expatrié… Quelles réalités se cachent derrière ces termes ? Quels droits garantissent ces statuts et quelles étiquettes imposent-elles aux personnes qu’elles désignent ? Comment la société les représente-t-elle ? Alors que les profils des personnes en migration diffèrent suivant les époques, les clichés, eux, se répètent invariablement. Les migrations sont la plupart du temps associées à une idée de menace, d’invasion, et restent perçues comme incontrôlables et imprévisibles. Pourtant, elles sont non seulement une réalité durable et répétée dans l’Histoire, mais aussi une ressource démographique et économique. Et loin de la submersion souvent évoquée, la proportion d’humains vivant en dehors de leur pays de naissance reste relativement faible : 4 % de la population mondiale. »

« La deuxième partie de l’exposition « Comprendre les migrations contemporaines », permet de cerner le phénomène tel qu’il existe aujourd’hui et tel que les scientifiques l’étudient. Sa caractéristique actuelle réside moins dans son ampleur que dans la grande diversité géographique, sociale, d’âges et de genres des personnes qui migrent. On constate aussi que le nombre d’individus fuyant leur pays a presque triplé en dix ans, et que le passage des frontières est devenu de plus en plus périlleux pour ces personnes. La révolution numérique a quant à elle profondément bouleversé le lien social entre pays de départ et d’arrivée. »

Le temps long des migrations
« Migrations et évolution », la troisième partie de l’exposition, enfin, explore le temps long des migrations. Elle montre le parcours des humains depuis les premières sorties d’Afrique d’Homo sapiens, et s’applique à révéler à partir de quels éléments et avec quels moyens la science parvient à cartographier les voyages de nos ancêtres. Si les raisons qui ont poussé l’homme à avancer toujours plus loin, se dispersant sur presque toute la planète, ne peuvent que rarement s’expliquer, les rythmes des déplacements, leurs échelles et les trajectoires sont de plus en plus finement étudiées grâce à l’émergence de nouvelles méthodes scientifiques. »

Des bagages insoupçonnés
« On comprend également dans cette partie que les humains d’hier, comme ceux d’aujourd’hui, ne migrent jamais seuls. Ils emportent avec eux d’importants bagages, visibles ou invisibles, transportés consciemment ou inconsciemment. » 

« Les individus et groupes humains migrent avec des savoir-faire, des techniques, des croyances, des pratiques sociales, symboliques, artistiques et culturelles qui leur sont propres : chants, danses, récits, mythes, recettes culinaires, objets-mémoire de l’exil… Mais ils déplacent également dans leur sillage des animaux, domestiques ou commensaux (rats, souris, insectes), des végétaux et des microorganismes.

D’hier à aujourd’hui, tout cet ensemble est finement observé par les scientifiques : traces de pas, restes biologiques, outils, poteries ou encore objets rituels témoignent de l’histoire des mouvements humains durant la Préhistoire. »

« Et le croisement des disciplines – de la paléoanthropologie à la génétique des populations, en passant par l’archéologie – permet désormais de mieux retracer ces migrations, ainsi que les rencontres, les échanges et les métissages qu’elles ont engendrés. Le fait apparait clairement : nos sociétés actuelles se sont constituées grâce aux migrations passées. »

« L’exposition, qui trouve son origine dans le Manifeste du Muséum sur les migrations, publié en 2018, s’applique donc à déconstruire les idées reçues sur le phénomène migratoire en s’appuyant sur les faits et leur analyse scientifique. Elle nous plonge dans cette étonnante et déterminante histoire de l’humanité et conclut sur la notion d’hospitalité. »

« Plus qu’un geste de compassion ou d’accueil, l’hospitalité engage l’interconnaissance, la reconnaissance de l’autre comme son égal dans une commune humanité. »

Ils ont fait l'exposition
Directrice du musée de l'Homme
Aurélie CLEMENTE-RUIZ

Responsable des expositions
Nala ALOUDAT

Commissariat scientifique
Sylvie MAZZELLA, sociologue, directrice de recherche au CNRS, Aix-Marseille Université, Mesopolhis
Christine VERNA, paléoanthropologue, chargée de recherche au CNRS, UMR HNHP (CNRS-MNHN-UPVD), Musée de l'Homme

Commissariat muséographique 
Mathilde BEAUJEAN, cheffe de projet expositions, Musée de l’Homme
Éléonore GROS, cheffe de projet expositions, Musée de l’Homme
ÉQUIPE PROJET
Véronique DECLERCQ, régisseuse d’œuvres d’art
Lizeth OSUNA-BROUSSARD, apprentie régie et production d’expositions
Esther GIRARD, assistante de conception et de production d’expositions
PARCOURS JEUNE PUBLIC
Chloé POURTIER, chargée de médiation scientifique et culturelle
Émilia RIQUET-PIRMAN, responsable du service médiation et action culturelle

Conseillers scientifiques 
Aline AVERBOUH, préhistorienne, chargée de recherche au CNRS, UMR AASPE (CNRS-MNHN)
Hassen BOUBAKRI, géographe, professeur à l’université de Sousse, Président du Centre de Tunis pour la migration et l’asile
Frédérique CHLOUS, anthropologue, directrice générale déléguée à la recherche, à l’expertise, à la valorisation et à l’enseignement-formation, MNHN
Théo DUCHARME, juriste, maître de conférences en droit à Paris 1 Panthéon-Sorbonne, juge à la Cour nationale du droit d'asile
Sébastien GŐKALP, Directeur du Musée de Grenoble
Christian GRATALOUP, géographe, professeur émérite à l'Université Paris Cité
François HÉRAN, démographe et sociologue, professeur et titulaire de la chaire « Migrations et Sociétés » au Collège de France
Claire MANEN, préhistorienne, directrice de recherche au CNRS, Université Toulouse Jean Jaurès
Swanie POTOT, sociologue, directrice de recherche au CNRS, directrice de l’unité Migrations et société (CNRS, IRD, Université de Paris, Université Côte d’Azur)
Paul VERDU, anthropologue et généticien des populations, directeur de recherche au CNRS, UMR EA (CNRS-MNHN-UPCité), Musée de l’Homme
Catherine WIHTOL DE WENDEN, politiste, directrice émérite de recherche au CNRS, CERI (Science Po)

« Le catalogue de l'exposition est dirigé par les commissaires, Sylvie Mazzella et Christine Verna. En une vingtaine de chapitres clairs et accessibles, auxquels se mêlent des témoignages recueillis aux quatre coins du monde, ce catalogue invite à adopter un regard critique et citoyen sur cette question d’actualité qui fait écho aux premiers temps de l’humanité. On y trouve des essais d'analyse et de décryptage qui s'appuient sur des données scientifiques et les observations les plus récentes, mais aussi de l'infographie, de la cartographie, une dizaine de témoignages illustrés par Aline Zalko, et des reproductions d'œuvres d'art contemporain. »

Autour de l'exposition
Aux enfants, le musée propose des contes.

« Pour toucher aussi les jeunes visiteurs, l’exposition Migrations propose un parcours accessible dès 10 ans, différents ateliers, et une offre pour les scolaires. »
« Le Musée de l'Homme est très apprécié des jeunes visiteurs. Les enfants et les adolescents sont passionnés par la Préhistoire et les origines de l'humanité, qui font justement partie des thèmes de prédilection du musée.
Ils sont également friands de toutes les activités spécifiquement développées pour eux par l'équipe du service médiation et action culturelle du Musée de l'Homme, comme les ateliers, les visites dédiées, les contes, les chantiers de fouilles, les enquêtes, etc. »
« Pour sensibiliser ce public particulier à la thématique des migrations, l'exposition est rendue accessible aux enfants dès 10-12 ans, par l'intermédiaire d'un parcours dédié, accompagné d'un guide de visite.
Ces jeunes visiteurs pourront choisir entre trois histoires, incarnées chacune par un personnage : Pandimi qui est Grecque, Alvine, Ivoirien, et Claudia, Colombienne. Le parcours de visite est jalonné de points d’arrêt dans l’exposition, matérialisés par des cartels spécifiques, qui offrent du contenu simplifié et des illustrations liées aux activités ludiques du livret. C’est à travers elles que les jeunes visiteurs découvrent le parcours migratoire du personnage de leur livret. À la fin, les enfants ont accès à une interview de la personne réelle ayant inspiré le personnage choisi. Le public scolaire n'est pas oublié, puisque des visites guidées à distance (avec un médiateur équipé d'un robot et interagissant en direct avec les élèves) sont possibles à partir du CM1. Trois visites guidées in situ sont également proposées aux classes d'école primaire (cycle 3), de collège et de lycée. »

DÈS 12 ANS
JEU DE PLATEAU "TERRA MIGRA"
Pour embarquer en famille dans un jeu de voyage palpitant.
« Les joueurs vivent l'expérience d'un parcours de migration, en affrontant les défis et surmontant les obstacles qui jalonnent ce voyage imaginaire. Coopération, courage et stratégie seront essentiels pour avancer et arriver à destination ! Une aventure immersive et interactive qui invite à explorer les parcours migratoires tout en s'amusant. »
L'enfant doit être accompagné. Un samedi sur deux à 15h, à partir du 30 novembre. Durée : 1h30. Tarif : 5 €
DÈS 6 ANS
ATELIER DANS TES BAGAGES !
« Pour plonger en famille dans une enquête captivante, à partir de mystérieux bagages abandonnés »…
« En explorant l'intrigant contenu d'une valise oubliée au Musée de l'Homme, les enfants doivent découvrir les indices cachés qui leur permettront de retrouver l'identité de son propriétaire. En retraçant son parcours, ils redonnent vie à son histoire et à ses souvenir de migration. De quoi voyager à travers le temps et les cultures ! »
L'enfant doit être accompagné.
Un samedi sur deux à 15h, à partir du 30 novembre. Durée : 1h30. Tarif : 5 €

CONFÉRENCES
« LA GRANDE HISTOIRE DES MIGRATIONS HUMAINES »
Conférence inaugurale de l'exposition Migrations, avec les commissaires Christine Verna, paléoanthropologue et Sylvie Mazzella, sociologue.
Lundi 9 décembre à 18h. Libre et gratuit.
CONSTANTES ET CONTRASTES : UNE VISION MONDIALE DE LA MIGRATION
Avec le démographe François Héran.
Lundi 13 janvier 18h. Libre et gratuit.
LE WAX, UN TISSU À LA CROISÉE DE TROIS CONTINENTS
Conférence inaugurale de l'exposition Wax avec les commissaires Soloba Diakité et Cindy Olohou, historiennes de l'art, et Manuel Valentin, anthropologue.
Lundi 10 février à 18h. Libre et gratuit.
POUR UNE APPROCHE GLOBALE DES MIGRATIONS
Avec Catherine Wihtol de Wenden, politiste.
Lundi 3 mars à 18h. Libre et gratuit.
DÉBATS AGITEZ VOS IDÉES !
Un lundi soir par mois, le public débat avec des spécialistes de tous horizons, dans un cadre participatif qui bouscule les codes de la conférence. Programme « Migrations » à venir !
Un lundi par mois à 19h. Libre et gratuit.
VISITES GUIDÉES À LA DÉCOUVERTE DES MIGRATIONS HUMAINES
Découvrez comment la mobilité humaine a façonné notre monde.
Le samedi à 11h15, à partir du 30 novembre. Tarif : 5 €

Mercredi 5 février
COLLOQUE INTERNATIONAL « MIGRATIONS ! »
En écho à l’exposition, ce colloque organisé avec le groupe de recherche Achac (Association pour la connaissance de l'histoire de l'Afrique contemporaine) est dédié aux enjeux des migrations humaines. Il interrogera leur universalité et leur impact sur les sociétés à travers l’histoire, de la préhistoire aux dynamiques modernes et aux défis futurs. Chercheurs, anthropologues, historiens et écrivains échangeront sur les origines, les flux migratoires et les frontières, ainsi que sur les perceptions et préjugés entourant l’immigration.
En abordant les perspectives pour le XXIe siècle, l'événement vise à offrir une compréhension enrichie des migrations en tant que facteur essentiel de transformation et de diversité culturelles.
Samedi 5 et dimanche 6 avril
GRAND WEEK-END FESTIF AUTOUR DES MIGRATIONS
Le Musée de l'Homme propose un week-end riche en ateliers, rencontres, jeux, spectacles et surprises autour du thème de son exposition. Une fête pour petits et grands à ne pas manquer.
Samedi 17 et dimanche 18 mai
GRAND WEEK-END FESTIF
AUTOUR DU WAX
Cette année, le musée offre à ses visiteurs un deuxième week-end d'activités en tous genres, sur le wax et la création artistique. »

« CONCOURS LITTÉRAIRE LA NOUVELLE ODYSSÉE
Prix du Muséum littéraire 2025, concours international francophone.
Pour sa 3e édition, le Prix du Muséum littéraire, ouvert à tout auteur amateur ou professionnel de plus de 15 ans, se fait cette année en lien avec l'exposition Migrations. Il se décline en 5 catégories : nouvelle épistolaire, théâtre, carnet de voyage ou récit de vie, contes et légendes, poésie en prose ou lyrique (dont slam ou spoken word).
Intégré dans la démarche art-science du Muséum, il propose aux candidats de réfléchir aux impacts et aux réalités des déplacements humains à travers une approche mêlant littérature, sciences naturelles et philosophie. Soucieux de la qualité littéraire des textes, le jury attend également des auteurs qu'ils mobilisent des connaissances scientifiques et culturelles en lien avec les thématiques de l'exposition.
Concours ouvert du 7 novembre 2024 au 26 janvier 2025.
Remise des prix le 6 mai 2025.
Conditions sur mnhn.fr/fr/actualites/concours-nouvelle-odyssee »

Mécène de l'exposition, « Kinoshita Group développe ses actions avec pour leitmotiv de contribuer à l’enrichissement global de la vie de chacun sous le slogan « Total Lifestyle Company ». Depuis sa création il y a 34 ans comme société immobilière, notre champ d’activités s’est étendu dans les domaines de la construction, de la location immobilière, de la garde d’enfants et du secteur médical. Nous sommes convaincus que notre mission est de contribuer à la création d’une société dans laquelle chacun bénéficie d’une prospérité matérielle et spirituelle, tout en offrant un environnement harmonieux alliant tradition et modernité. Aujourd’hui, le groupe Kinoshita étend ainsi ses activités à de nouveaux domaines, tels que le cinéma, la musique et le sport. Bien qu'il soit courant que des entreprises soutiennent des projets artistiques et culturels en Europe, cette forme de philanthropie n'a malheureusement pas encore pris racine au Japon. Pourtant, l’art a le pouvoir de développer les consciences et d’unir les populations au-delà des frontières géographiques et des barrières culturelles. C’est pourquoi, nous soutenons de nombreux projets au Japon et à l’étranger, dans un objectif de transmission aux générations futures. Face aux difficultés et aux incertitudes qui caractérisent notre époque, nous sommes convaincus que l'art et la culture sont des outils indispensables pour apporter sérénité et soutien aux individus, essentiels au bien-être de la société dans son ensemble. Ainsi, nous sommes très honorés d’être le mécène de l’exposition Migrations, une odyssée humaine, présentée au Musée de l'Homme, qui propose une approche pluridisciplinaire du phénomène migratoire et permettra aux visiteurs de prendre du recul sur ce sujet. »


PLAN DE L'EXPOSITION

« 1 LES MOTS DE LA MIGRATION
Cet espace éclaire les termes employés pour désigner les migrants, et explore les perceptions, les idées reçues qui les accompagnent.
2 COMPRENDRE LES MIGRATIONS CONTEMPORAINES
Cette salle dresse un état des lieux des phénomènes migratoires actuels, à l'aide de données chiffrées éclairées par la sociologie, la géographie, la démographie, et de témoignages de réalités vécues.
3 MIGRATIONS ET ÉVOLUTION
Cette dernière grande salle permet de replacer le phénomène migratoire dans le temps long, Homo sapiens s'étant déplacé sur quasiment toute la planète depuis l'Afrique. Elle montre aussi que les humains ne migrent pas seuls, mais embarquent avec eux, volontairement ou non, des passagers vivants et des pratiques culturelles à partager. »

DES MOTS ET DES PRÉJUGÉS
« Comment percevons-nous la mobilité humaine sur la planète ? Quelles représentations conscientes et inconscientes nous imprègnent-elles ? Comment le vocabulaire employé conditionne-t-il le regard que nous portons sur les personnes migrant ou ayant migré ? »

« Cette première salle de l’exposition, « Les mots de la migration », montre que le phénomène migratoire s’accompagne d’un ensemble de représentations collectives, fruit de constructions sociales, elles-mêmes issues de contextes sociopolitiques, linguistiques, géographiques et culturels. »

« Les termes pour décrire la grande diversité des migrations sont d’ailleurs nombreux : migrant, étranger, immigré, réfugié, exilé, débouté, expatrié… Chacun de ces mots définit un statut évolutif et porte en lui une connotation spécifique qui va changer la manière dont est perçue la personne désignée. D’où l’importance de s’attarder sur la définition des mots et de s’interroger : qui utilise le terme ? Dans quel but ? Identifier, s’identifier ? L’image que l’on se fait du « migrant » est en effet loin de celle que l’on se fait de « l’expat ». Le visiteur est confronté à ces définitions et à des représentations associées à ces mots : affiches de films, jouets, poèmes, citations, passeports, actes administratifs, photographies, magazines… »

« Au cours de l’histoire, les flux migratoires se sont accompagnés de phases de rejet des arrivants. Des représentations péjoratives se sont forgées. Selon les époques, l’incarnation de la différence varie : région de naissance, langue, religion, couleur de peau, divers attributs peuvent caractériser « l’autre ». Mais quelle que soit sa différence, l’étranger est celui qui vient d’ailleurs, celui qui, d’une certaine manière, envahit. Voire qui remplace. Un film pédagogique interroge ainsi le concept de « grand remplacement » ; un autre montre comment les discours de haine changent de cibles… mais pas de rhétorique au fil des décennies. »

Une sémantique alarmiste
« Au cœur des discours sur les migrations, le champ sémantique aquatique s’est ainsi imposé. On retrouve immanquablement les termes de flux, de tsunami, de marée humaine, de passoire, de débordement, ou de vague, comme l’illustre dans l’exposition une sélection de dessins de presse de différents pays. Ce champ sémantique induit une idée de phénomène incontrôlable, massif et inéluctable, qui participe à construire un imaginaire alarmiste autour du phénomène migratoire et entretient une sensation de submersion. Pour éviter le naufrage, la solution serait-elle donc l’immigration « au compte-goutte » ? Pourtant, les recherches montrent que les volumes migratoires sont loin d’être aussi importants que ce qui est souvent évoqué. »

« Le nombre de migrants dans le monde a quadruplé en 70 ans, mais leur part dans la population mondiale reste faible. Seuls 4 % des personnes vivent en dehors de leur pays de naissance en 2025. Cela représente 325 millions de migrants internationaux sur 8,2 milliards d’habitants. Si on observe une augmentation du nombre de migrants, cette dernière ne fait que suivre l’augmentation de la population mondiale… »

L’ÉTAT DES LIEUX
« La mobilité humaine est scrutée par les scientifiques. Démographes et sociologues, notamment, apportent des informations éclairantes, parfois contre-intuitives, sur les migrations mondiales. » 

« À quoi ressemble le phénomène migratoire aujourd’hui ? S’est-il amplifié ? Qui migre ? D’où à où ? Pour quelles raisons ? Les réponses des scientifiques vont souvent à l’encontre des idées reçues partagées dans les pays occidentaux. »

« Ce qui est inédit concernant les migrations actuelles, ce n’est pas leur ampleur, mais la grande diversité géographique, sociale, d’âges et de genres des personnes qui l’entreprennent. »

« L’analyse des trajectoires présentées dans l’exposition montre que celles-ci ne se font pas uniquement du Sud vers le Nord comme on l’imagine souvent, qu'elles incluent plusieurs pays, des séjours saisonniers, des allers-retours. En 2017, on évalue à 89 millions les personnes nées au Sud et qui vivent désormais au Nord, mais aussi à 57 millions celles ayant migré du Nord au Nord et à 97 millions celles ayant migré du Sud au Sud. L’Inde, les Émirats arabes unis et l’Afrique du Sud sont devenus des pôles d’attractivité. Près de la moitié des migrations restent même intracontinentales. Et les motifs de départ : économique, politique, familial, éducationnel climatique, récréatif… sont divers et imbriqués. »

« Dans ce contexte, le cliché du migrant masculin, pauvre et non diplômé est largement mis à mal. Généralement, les personnes qui migrent bénéficient déjà de moyens économiques et d’un niveau d’étude plutôt élevé. » 

« On voit par ailleurs que de plus en plus de femmes jeunes, célibataires ou avec une famille à charge, partent à l’étranger pour trouver du travail. Pourtant, cette part féminine dans la migration, bien qu’elle soit très ancienne, continue d’être invisibilisée et perçue comme marginale. »

« Le lien social entre pays de départ et d’arrivée a été profondément modifié par l’évolution des transports et la révolution numérique : on peut être à la fois ici et là-bas. La configuration familiale et conjugale en est transformée. »

« Une oeuvre de Séverine Sajous, artiste visuelle française installée en Tunisie, centrée sur l’usage du téléphone avant, pendant, et après la migration, permet d’en prendre pleinement conscience. Dans une démarche participative, elle valorise les récits autobiographiques et interroge la représentation de l’exil par les médias. Ses « téléphones-témoignages », réalisés à l’occasion de l’exposition, racontent les expériences de Hamza, en Tunisie, qui rêve de traverser la mer, de Hunaida, jeune libyenne en transit à Calais, et d'Anderson, journaliste exilé d'Haïti à Paris. Le dispositif interactif « j'entre, j'accueille », créé lui aussi pour l’exposition, confronte quant à lui le visiteur à certaines réalités, en l'invitant à se placer soit dans la peau d’un candidat à l’immigration devant se faire accepter, soit à la place d’un pays d’accueil qui doit définir ses critères de sélection. »

Des traversées périlleuses
« Cette partie de l'exposition montre aussi que le nombre de personnes fuyant leur pays a presque triplé en dix ans, en raison des conflits et des crises économiques. Dans un contexte de repli et de montée des nationalismes, le passage des frontières est devenu de plus en plus périlleux, notamment la traversée de la mer Méditerranée qui est aujourd’hui la plus meurtrière au monde. La fragilité des embarcations et le caractère dérisoire des précautions prises, que l’on peut voir à travers divers objets récupérés par des associations comme SOS Méditerranée, en témoignent. »

« D’autres frontières, massives et dissuasives, sont aujourd’hui plus que jamais érigées pour tenter d’endiguer les flux. Mais leur contournement se maintient et s’accompagne de prises de risques et de mortalité croissantes pour les migrants. »

« Le nombre de décès en cours de migration est aujourd’hui estimé a plus de 58 000 personnes dans le monde depuis 2014 d’après l'Organisation internationale pour les migrations. »

Une encyclopédie des migrants
« Ce projet artistique européen, porté par l'artiste Paloma Fernandez Sobrino avec l'association L'âge de la tortue, réunit, dans une encyclopédie en trois tomes, 400 témoignages de personnes migrantes. Depuis huit villes de la façade atlantique, de Brest jusqu’à Gibraltar, chaque témoin a été invité à écrire une lettre à un proche, sur le thème de la distance. Écrites dans la langue maternelle des personnes, elles ont été traduites avec l'intention de respecter le langage des auteurs. Huit exemplaires de l'ouvrage, produit en édition limitée, ont été déposés dans les archives des villes investies dans le projet. Par ce geste, qui se réfère à l’Encyclopédie des Lumières, le projet propose de laisser la trace d’un patrimoine commun, celui de l’histoire intime des migrations. Chang Liu Mell, étudiante chinoise en France, avec une lettre à ses parents, et Giuseppe Lagomarsino, exilé depuis quarante ans d'Argentine, avec une lettre écrite à sa sœur. »

MIGRATIONS ET ÉVOLUTION
« L’archéologie le démontre sans ambiguïté : l'humain migre depuis qu'il existe, au point qu’il s’est dispersé sur toute la planète. Avec des méthodes de plus en plus précises, les scientifiques parviennent à retisser l’histoire complexe de ses mouvements. »

« Dès son émergence il y a 300 000 ans sur le continent africain, Homo sapiens s’est dispersé sur l’ensemble de la planète, colonisant la plupart des milieux, même les plus hostiles, en se métissant, chemin faisant, avec les autres espèces humaines existant alors, comme Néandertal. Jamais les mouvements de l’infatigable explorateur qu’est l’être humain ne se sont arrêtés. »

« En introduction de cette troisième partie de l’exposition, qui place les migrations dans le temps long, un film d'animation retrace l’histoire et la géographie des déplacements qui ont conduit à la dispersion de notre espèce sur toute la planète. »

« À commencer par la première sortie d’Afrique, il y a 200 000 ans, suivie d’autres aux trajets multiples, qui l’ont conduit jusqu’en Asie, en Australie, puis en Europe, et enfin en Amérique. »

« Les dates des arrivées à ces destinations sont débattues, puisqu’elles dépendent des traces archéologiques découvertes ; des traces toujours plus anciennes peuvent encore et toujours se révéler. »

« En présentant différentes pièces issues de ses collections et de prêts, le Musée de l’Homme révèle des indices archéologiques qui témoignent de ces déplacements et comment les scientifiques parviennent à les interpréter. Il peut s’agir de fossiles humains, comme la désormais fameuse dent de Mandrin, découverte en 2022 dans la Vallée du Rhône et datée à 54 000 ans, dont l'original est présenté dans l'exposition. Bien qu'encore controversée, cette découverte fait reculer de 10 000 ans la date présumée de l’arrivée de sapiens en Europe. »

« On s’émeut également devant une reconstitution des empreintes de pas de White Sands, découvertes en 2019 au Nouveau-Mexique. Ce vestige du cheminement d'un groupe d'Homo sapiens démontre l'arrivée de notre espèce en Amérique du Nord il y a 23 000 ans, une période glaciaire durant laquelle le passage à pied entre la Sibérie et l'Amérique était possible. »

Génétique et datations
« Sont également expliquées les méthodes qu’emploient les généticiens pour retracer les métissages et les déplacements humains, ou la technique permettant de retrouver dans l’émail dentaire les caractéristiques d’un lieu où s’est alimentée une personne. En effet, le strontium, qui provient des roches du sous-sol, varie légèrement (en composition isotopique) selon les régions. Le fait qu’il entre dans la chaîne alimentaire par l’ingestion de plantes, et s’incorpore dans les os et les dents, permet donc de retracer les zones géographiques dans lesquelles un individu s’est nourri ! En combinant les analyses du strontium à celles de la génétique, les données ont par exemple montré que les femmes adultes du site funéraire néolithique de Gurgy, dans l’Yonne, avaient grandi ailleurs alors que leurs compagnons étaient issus de la région. L’exogamie (les femmes quittent leur groupe pour se marier) est un modèle très fréquent de l’histoire d’Homo sapiens. À cette époque, les femmes migraient bien plus que les hommes ! »

Des savoir-faire qui en disent long
« Mais les humains laissent d’autres indices que leurs propres ossements : ils exportent avec eux leurs savoir-faire, ainsi que leurs croyances et pratiques symboliques et culturelles. Un outil réalisé dans une matière typique d’une région et retrouvé loin de son sol d’origine permet d’attester de réseaux d’échanges entre groupes humains ou encore de déplacements. En outre, l’apparition d’une technique inédite (de taille de pierre, de confection de poterie, de décoration d’objets) sur des territoires où elle n’avait encore jamais été observée, peut révéler l’arrivée de nouveaux groupes humains. C’est ce que l’on peut observer dans l’exposition avec l’étude de la diffusion des céramiques Tupi-Guarani du Brésil sur plusieurs millénaires par exemple. »

TRADITIONS EN MOUVEMENT
« En botanique ou en cuisine, certaines fiertés régionales sont en fait les fruits d’anciennes migrations. Se souvient-on que la fraise de Plougastel vient du Chili ? Ou que le manioc, massivement consommé en Afrique, est d’origine sud-américaine ? »

« L’histoire des migrations végétales est étroitement reliée à l’histoire des déplacements humains : très tôt, les populations humaines ont transporté graines, plants, racines pour des raisons alimentaires, médicinales, esthétiques et symboliques. »

« Avec l’apparition et le développement des moyens de transport longue distance, on assiste peu à peu au cours du temps à une redistribution des espèces en dehors de leur environnement d’origine. C’est le cas par exemple de l’ajonc, une plante emblématique de la Bretagne et de ses paysages côtiers, qui s’est vue introduite par les européens dans de nombreuses colonies où elle est devenue invasive. À l’inverse, les colons ont ramené diverses plantes des colonies. Ainsi, le cacao, le thé et le café, autrement dit les trois « piliers » des petits-déjeuners occidentaux, sont issus de plantes dont aucune ne pousse à l’origine en Europe ! Quand au manioc, il est devenu l’aliment de base de nombreuses populations africaines après avoir été introduit par les Portugais à Sao Tomé pour nourrir les esclaves à peu de frais. »

« Certaines pratiques culinaires, nous racontent ainsi plusieurs histoires intrinsèquement interdépendantes : celles du commerce, de la diffusion des techniques, des pratiques culturelles et souvent celle des migrations forcées et de l’esclavage. »

La fraise de Plougastel... du Chili
« La fraise de Plougastel trouve son origine… dans différentes régions d’Amérique ! En effet, les fraises européennes, jusqu’au XVIe siècle, sont des fraises sauvages. Il s’agit de petites fraises des bois bien éloignées des fraises charnues que nous connaissons. C’est Amédée Frézier, le bien nommé, qui, de retour du Chili au début du XVIIIe siècle, introduit le premier en Europe des pieds de grosses fraises blanches qu’il offre au Jardin du Roy. C’est de l’hybridation naturelle survenue dans les jardins botaniques entre ces fraises chiliennes et celles rapportées d’Amérique du Nord par Jacques Cartier, que naitront la plupart des variétés de fraises à gros fruits que l’on mange encore aujourd’hui, dont la fameuse fraise de Plougastel. »

Le piment d'Espelette : de quoi piquer les Basques
Des végétaux venus d’ailleurs sont entrés dans notre quotidien au point que certains sont devenus des emblèmes locaux, bénéficiant d’une appellation d’origine protégée (AOP) ! C’est le cas par exemple du piment d’Espelette, symbole du Pays Basque et seule épice AOP en France. 
Il est pourtant originaire d’Amérique du Sud, où le piment est cultivé depuis plus de 8 000 ans par les civilisations inca et maya. Après son arrivée à la cour d’Espagne par Christophe Colomb, sa propagation vers les terres basques reste inconnue. On suppose toutefois qu’un marin en aurait ramené dans son sac en rentrant au pays. »

Un plat qui fait débat : la pizza hawaïenne
« La pizza est un élément emblématique et constitutif du patrimoine culinaire italien. Elle est pourtant relativement récente car l’arrivée de la tomate mexicaine vers l’Europe ne date que du XVIe siècle. Mais la pizza est aussi un plat mondialisé qui s’est transformé et se transforme encore au gré de ses voyages. Sa version « hawaïenne », souvent considérée comme une transgression voire une aberration, n’est en aucun cas le fruit de l’imagination débordante d’un hawaïen. Elle a en réalité vu le jour au Canada. Il est d’autant plus difficile de comprendre pourquoi les canadiens ont accusé les hawaïens de leurs méfaits, quand on sait que l’ananas est originaire d’Amérique du sud et qu’il est arrivé sur l’île seulement au XIXe siècle. »

Un Grec venu d'Asie
« Le kebab, dont le parcours migratoire est au croisement de l’Empire Ottoman et de l’Europe, existe depuis le Moyen Âge en Anatolie. Il est par ailleurs le reflet de questionnements sociaux, politiques et identitaires des sociétés d’aujourd’hui. En Île-de-France le kebab fait son apparition dans les années 90. Il y est parfois familièrement désigné par le terme « grec ». Il s’agit d’une confusion engendrée par le développement, dans les années 80, de restaurants grecs commercialisant des sandwichs similaires au kebab mais dans un pain pita. Symbole d’immigration, le kebab est investi par des revendications politiques, tour à tour symbole de réussite ou motif de stigmatisation de l’immigration magrébine et urbaine. »

« Regards d'artistes »
« Il y a les faits, les chiffres, l'analyse scientifique. Il y a les témoignages, les récits, les objets de la migration. Et puis il y a les productions artistiques. »

« Pour les commissaires de cette exposition, il était essentiel d'apporter à cette grande fresque sur la mobilité humaine, le regard sensible des artistes. Le choix a été de faire appel à des artistes d'aujourd'hui, ayant fait l'expérience de la migration. Photographies, œuvres plastiques, sculptures, céramiques, installations multimédia… 16 œuvres apportent une dimension poétique, métaphorique, et finalement une profondeur au propos. Certaines, comme celles de Pietro Ruffo ou de Séverine Sajous, ont été créées pour l'exposition, d'autres, comme celles de Reena Kallat, et de Marco Godinho, ont été adaptées. On retrouve aussi les créations de Cristina de Middel, Reena Kallat, Emeka Ogboh, Rubén Martín de Lucas, Alina et Jeff Bliumis, Tom Kieffer, Julie Polidoro, Mathieu Pernot, Zac Langdon-Pole, Lamyne M et Angélica Dass. »


Le Musée de l’Homme

Le Musée de l’Homme « est un des 12 sites français du Muséum national d’Histoire naturelle. Lieu culturel et scientifique ouvert sur le monde, il accueille le public dans sa Galerie de l’Homme, un fabuleux espace qui explore le passé, le présent et le futur de l’Humanité. Il propose également d’ambitieuses expositions temporaires qui éclairent les grands débats de sociétés et organise des événements culturels tous publics, festifs et inattendus. Les collections de préhistoire et d’anthropologie conservées dans ses réserves comptent plus d’un million d’éléments et ses laboratoires accueillent 150 chercheurs (généticiens, anthropologues, primatologues, préhistoriens, etc.). Le musée possède également une bibliothèque qui porte le nom d’Yvonne Oddon, grande figure de la résistance et cofondatrice du fameux « Réseau du Musée de l’Homme ». Il est aussi un lieu d’enseignement et de formation incontournable sur l’évolution de l’être humain et des sociétés. »

ÉCLAIRER LES MIGRATIONS
Par Aurélie Clemente-Ruiz, directrice du Musée de l’Homme

« Il n'existe pas de vivant sans migrations. Cette phrase, aussi simple qu'essentielle, a été le point de départ de notre réflexion pour l'exposition Migrations, une odyssée humaine.
En 2018, le Muséum national d'Histoire naturelle (MNHN) a publié un manifeste affirmant que toutes les espèces migrent, qu'il s'agisse de plantes, d'animaux ou d'humains, pour des raisons variées. Ainsi, depuis toujours, hommes et femmes ont migré, volontairement ou non. À partir de ce constat, nous avons conçu une exposition inédite, centrée sur l'espèce humaine et ses déplacements.
Face aux débats houleux sur cette question devenue brûlante dans l’actualité politique, nous souhaitons replacer le fait migratoire à l'échelle de la planète et du temps long. En offrant des données scientifiques et des perspectives nouvelles, passant aussi par des témoignages personnels et des travaux d’artistes, cette exposition propose de découvrir ce phénomène naturel, complexe et fondamental. Ces clés de compréhension permettront à nos visiteurs de mieux appréhender la question migratoire, dans une perspective plus large, avec des points de vue croisés. 
Avec ce projet, le Musée de l’Homme s’affirme comme un musée de société engagé dans les débats contemporains. Depuis sa réouverture en 2015 et sa première exposition Nous et les autres, des préjugés au racisme, le musée propose des approches aux multiples voix et des outils pour mieux appréhender le monde d'hier, d'aujourd'hui et de demain. Le Musée de l’Homme se positionne ainsi comme un lieu de débat citoyen, pour nous aider à éclairer le monde complexe qui nous entoure. »


Du 27 novembre 2024 au 8 juin 2025
Au Musée de l’Homme 
Place du Trocadéro. Paris 16e
Ouvert tous les jours de 11h à 19h, sauf le mardi. Fermé les 25 décembre, 1er janvier, 1er mai.
Visuels :
Affiche 
© MNHN 2024 © Gérard Dubois costume3pieces.com

Reena Kallat Woven chronicle © Reena Kallat Studio - Jamie Woodley

« Invasion ! » Dessin de Chappatte pour le journal The International New York Times, États-Unis, 2018 © Chappatte 

Frontière entre le Mexique et les Etats-Unis à Nogales © Robert Bushell/U.S. Customs and Border  Protection 

Les citations proviennent du dossier de presse.

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