En 2008, le Centre Pompidou a présenté l’exposition éponyme assortie d’un catalogue et d'un dépliant gracieusement mis à la disposition du public, tous trois partiaux et problématiques notamment par leur terminologie biaisée, le mélange de fiction et de réalité, etc. Les œuvres – vidéos, installation et photographies - de cinq jeunes artistes – les Israéliens Yael Bartana, Omer Fast et Ahlam Shibli, les libanais Rabih Mroué et Akram Zaatari – portent sur les « questions liées à la guerre au Moyen-Orient ».
Les inquiets. Yael Bartana, Omer Fast, Rabih Mroué, Ahlam Shibli, Akram Zaatari. 5 artistes sous la pression de la guerre
Histoires » de Michal Rovner
"Ici", "Jérusalem plomb durci" et "J'ai soif"
Cinq jeunes artistes, vidéastes et photographes, « ont en commun un sentiment d'implication personnelle face aux questions liées à la guerre au Moyen-Orient [Nda : laquelle ?]. Ils sont capables de traduire l’oppression du conflit à l’aide d’un langage alternatif, en analysant ses causes et ses origines, dans une réflexion sur les méthodes de sa représentation ». On cherche vainement ces analyses…
Certains de ces artistes israéliens vivent hors d’Israël : Yael Bartana est née en Israël et habite à Amsterdam, Omar Fast a vu le jour à Jérusalem, a grandi à New York et réside à Berlin.
« Toutes les généralisations et les tentatives de relier les partis opposés dans le conflit du Moyen-Orient manquant de légitimité, une appréhension subjective semble la plus à même de relever le défi de cette représentation. De cette situation découle le titre – Les inquiets –, celui d'un roman de l'écrivain israélien d'origine polonaise Leo Lipski, Niespokojni (Les Inquiets), dans lequel l'auteur décrit la situation d'artistes qui, grâce à leur hypersensibilité ont pressenti, à la veille de la Seconde Guerre mondiale, l'horreur imminente ». Ne doit-on pas se garder des amalgames ?
Née en 1970, Yael Bartana « montre Low Relief (2004), une quadruple projection vidéo en longueur formant un bas-relief d'images mobiles. Ces images trafiquées digitalement donnent l'impression que les personnages appartiennent à une formation militaire. Le spectateur est invité à observer cette démonstration militaire mais on ne peut dire s'il s'agit d'un discours pour la paix, pour l'environnement ou pour autre chose encore. Cette œuvre peut être interprétée comme une métaphore de la vie en Israël où il est difficile d'éviter les références politiques et la réalité militaire ». Quelles références ? Mystère.
Dans son installation Casting (2007), Omer Fast né en 1972 filme un acteur contant des faits pénibles. Il « étudie l'impact du spectacle télévisé de la guerre. « Casting fictif ou réel pour un documentaire, Fast mène des entretiens avec des soldats américains ayant participé aux opérations en Irak. Les visages de l'artiste et du participant sont en permanence à l'écran. Nous ne saurons jamais si les différents intervenants évoquent des événements réels ou si nous sommes dans le domaine de la fiction ».
Né en 1967, Rabih Mroué « propose une vidéo Three Posters (2003) dans laquelle il questionne la possibilité de représenter un événement aussi dramatique que le suicide d'un martyr. À partir de bandes vidéo trouvées dans les années 80 au sein des bureaux du Parti Communiste Libanais, Mroué reconstitue le témoignage d'un martyr. Le visionnage de cette reconstitution entraine de nombreuses questions à propos de la transformation graduelle de l'idéologie sous-jacente des combattants d'abord de gauche puis Islamistes, à propos des politiques qui envoient les martyrs à la mort et enfin, à propos de l'influence de tout cela sur la vie d'un artiste et sa capacité à le représenter ». Il s’agit en fait d’un terroriste communiste qui s’est fait exploser parmi des soldats israéliens au sud-Liban. Qualifier un terroriste de « martyr » est pour le moins choquant, et n’est pas neutre, tout comme l’indifférence de l’artiste pour les victimes israéliennes.
A tort, le Centre Pompidou présente Ahlam Shibli comme « palestinienne », alors qu'elle est une Bédouine israélienne. Née en 1970, Ahlam Shibli présente des « photographies récentes prises dans le village d'Al-Shibli. Capturant tous les détails topographiques, les vestiges historiques et les détails caractéristiques du quotidien de son village natal, Ahlam Shibli tente de reconstituer l'impact de l'histoire sur notre présent. La plupart des habitants sont enfuis durant la guerre de 1948, ils ont tout quitté pour une vie d'insécurité, incertains de leur nouveau rôle et de leur futur ». Ahlam Shibli a déclaré : « Avant la création d'Israël, les villages portaient leur nom d'origine, des noms de lieu et non de famille. Certains ont dû changer de nom au moment de la création de l'Etat d'Israël. Mon village est devenu Arab al-Shibli. Quand le village juif voisin a commencé à se développer, l'Etat juif a donné des terres du village palestinien à l'implantation juive. Ces changements - le déplacement vers la montage loin de ses terres et le changement de nom - ont encore une influence sur le village aujourd'hui ». Et d'ajouter : « Dans mon village, les gens craignent de parler de peur que l'Etat israélien ne les punisse en ne délivrant pas un permis de construire ou en ne donnant pas de travail à leurs enfants. A cause de la peur, ils refusent de raconter ce qui s'est passé. Pour moi, on a le choix entre deux options : se battre pour la liberté avec un fusil ou avec son cerveau ». Selon le Centre Pompidou alors présidé par Alain Seban, ces photographies « n'évoquent pas tant la violence que la faiblesse et la complexité des relations humaines ». Des clichés de faible intérêt, sans explication sur la cause de la fuite de ces villageois : incitation de leurs frères arabes ? Quid des réfugiés juifs des pays arabes; de Turquie et d'Iran ? Avec perspicacité, Laurent Boudier (Télérama, 15 mars 2008) écrit : « Ahlam Shibli a choisi les images pour armes. Ses clichés de paysages vides et de nature à la végétation rase peuvent paraître bien communs à bon nombre d'artistes contemporains ». Et de poursuivre : « Mais cette recherche à la limite du sentiment déprimant et du constat documentaire est plutôt une tentative pour raconter l'histoire de son village natal, Al-Shibli, du déplacement de ses habitants de la vallée vers la montagne, et pour approcher, par là, la complexité des relations humaines dans le chaudron du Moyen-Orient ».
Enfin, Akram Zaatari, né en 1966 à Sidon (Liban), a co-fondé la Fondation arabe pour l'image (FAI). Pour l'exposition il a filmé un abscons plan séquence deux hommes dont l’un coud, et l’autre semble préparer un engin explosif. Un texte indique : « un vieux résistant libanais se trouve de nouveau face à son uniforme qu'il prend lentement en mains, nettoie méticuleusement et essaie. En se réappropriant son uniforme l'homme reprend son identité de soldat. Le travail d'Akram Zaatari aborde la question fondamentale de ce qui fait l'histoire et comment les différentes vérités sont divulguées et déguisées à travers la production et la circulation d'images. Dans ce sens, Zaatari reflète les différentes représentations de la guerre, soulignant les dimensions émotionnelles et esthétiques, cherchant une place dans la société comme une personne hypersensible ». Ce « vieux résistant libanais » résistait à quoi ?
Finalement, cette exposition, dont la commissaire est Joanna Mytkowska, conservatrice au Musée national d’art moderne (MNAM) assistée de Anna Hiddleston, attachée de conservation, révèle la faible différence entre la bombe humaine communiste et celle islamiste, l’indifférence d’artistes à l’égard des Israéliens Juifs. Pire : ceux-ci sont absents de ces « œuvres ». La guerre, c’est aussi l’angoisse, la peur, les larmes, le courage, l’encadrement politique, etc. Des sentiments et faits qui n’affleurent dans aucune de ces œuvres.
Ces inquiets ? Ils m’ont semblé parfois des nombrilistes, souvent des mabouls pédants et inhumains.
Lors de ma visite au Centre Pompidou, peu de visiteurs parcouraient l’espace alloué à cette exposition. Peut-être en raison du tarif d’entrée élevé.
Le 3 avril 2008, sur RCJ, radio Juive francilienne liée au FSJU (Fonds social juif unifié), Francine Lutenberg, responsable des projets culturels à l'ambassade d’Israël en France, a recommandé cette exposition…
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Cet article a été publié en une version plus concise par L'Arche. Les citations sont extraites du dossier de presse.
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