Cet article est republié alors que Philippe Karsenty a été condamné, le 26 juin 2013, pour diffamation par la Cour d'appel de Paris. Je consacrerai un article à l'audience, puis un autre à l'arrêt.
Directeur de
Media-Ratings, maire-adjoint de
Neuilly, porte-parole et responsable de la politique étrangère au sein du Parti
Libéral Démocrate, Philippe Karsenty
doit-il être relaxé ou condamné pour avoir sciemment diffamé France Télévisions
et Charles Enderlin, correspondant de France 2 à Jérusalem, en qualifiant, en
novembre 2004, notamment d’« imposture médiatique » le reportage controversé sur « la mort de Mohamed al-Dura » diffusé au JT de
France 2 le 30 septembre 2000 ? Cette question a été au centre des débats
devant la Cour d’appel de Paris le 16 janvier 2013.
Doutes croissants sur l’authenticité des faits
allégués par ce reportage controversé ? Aura de Charles Enderlin
lézardée ? Censure sur un sujet tabou ? Crainte de susciter l’ire
procédurale des intimés ? Incompréhension des enjeux de "l’affaire
al-Dura" ? Agacement à l’égard de Philippe Karsenty ? Froid hivernal
rigoureux ? Questionnements à l'égard de Pallywood, Hezbollywood, Syriwood ou autres Arabwood ?
Malgré l’appel du SNJ (Syndicat national
des journalistes) à assister à l’audience en signe de solidarité avec Charles
Enderlin, peu de journalistes – aucun des médias communautaires - assistent aux
plus de six heures de débats judiciaires : Daniel Bilalian et Vincent
Nguyen de France 2, et Emilie Raffoul de Canal + (1).
Par contre, parmi la nombreuse assistance, citons Richard
Prasquier, président du CRIF (Conseil représentatif des institutions juives de
France).
A la différence de l’audience du 27 février 2008, aucun dirigeant de France
Télévisions ne s’est déplacé.
Avant le début de l’audience, Philippe Karsenty va serrer
la main de Charles Enderlin, et il échange quelques mots avec lui.
Une affaire ancienne
Président de la
Cour, Jacques Laylavoix rappelle les faits
et la procédure judiciaire.
Feuilletant un
document agrafé, il évoque curieusement « les positions israéliennes » au carrefour de Netzarim (bande
de Gaza). Une expression inexacte figurant dans les décisions judiciaires,
ainsi que dans les conclusions de Charles Enderlin et de France Télévisions.
Tous les magistrats ont donc repris l’erreur des plaignants.
Or, dans le
reportage du JT de France 2 du 30 septembre 2000 et aux images signées par le
cameraman palestinien Talal Abu Rahma, Charles Enderlin déclare : « 15 heures. Tout vient de basculer près de l’implantation
de Netzarim dans la bande de Gaza... Ici, Jamal et son fils Mohamed sont la
cible de tirs venus de la position israélienne... Mohamed a 12 ans. Son père
tente de le protéger... Il fait des signes... Mais une nouvelle rafale...
Mohamed est mort et son père gravement blessé ».
L’image du « petit Mohamed » devient l’icône de
l’Intifada II.
Ce reportage suscite des doutes, et des enquêtes dès 2000 de Nahum
Shahaf, physicien israélien, de Stéphane Juffa, rédacteur en chef de l’agence de presse Mena (Metula News Agency). Au sein de la Ména, Gérard Huber, psychanalyste, et Luc Rosenzweig, journaliste, poursuivent leurs investigations. Nahum Shahaf et la Ména contestent l'authenticité des faits allégués dans ce reportage, et concluent à la mise en scène.
Dans son documentaire Trois balles et un enfant mort. Qui a tué Mohamed al-Dura ? diffusé en 2002 par ARD, Esther Schapira, documentariste allemande, soutient que l'enfant serait mort vraisemblablement par des balles palestiniennes.
C'est Richard Landes, historien américain, qui parvient à interviewer Charles Enderlin, et forge le néologisme Pallywood pour désigner l'industrie audiovisuelle palestinienne de propagande…
Dans son documentaire Trois balles et un enfant mort. Qui a tué Mohamed al-Dura ? diffusé en 2002 par ARD, Esther Schapira, documentariste allemande, soutient que l'enfant serait mort vraisemblablement par des balles palestiniennes.
C'est Richard Landes, historien américain, qui parvient à interviewer Charles Enderlin, et forge le néologisme Pallywood pour désigner l'industrie audiovisuelle palestinienne de propagande…
La polémique sur ce reportage controversé est alimentée par le
long refus de France 2 de rendre publics les rushes du reportage, et les
versions successives de Talal
Abu Rahma qui, le 3 octobre 2000, affirme sous serment,
au Centre palestinien des droits de l’homme : « L’enfant a été tué intentionnellement et de sang-froid par l’armée
israélienne », puis se rétracte le 30 septembre 2002, soit deux ans plus tard, dans un fax adressé à
France 2 Jérusalem : « Je n’ai jamais dit
à l’Organisation palestinienne des droits de l’homme à Gaza que les soldats
israéliens avaient tué intentionnellement et en connaissance de cause Mohamed
al-Dura et blessé son père ».
Dans deux textes
électroniques de novembre 2004, Philippe Karsenty, directeur de l’agence de
notation des médias Media-Ratings,
qualifie en particulier d’« imposture
médiatique », de « faux
reportage », « pure fiction »
et « supercherie » ce
reportage controversé et exhorte aux licenciements
de Charles Enderlin et d’Arlette Chabot, alors directrice de l’information de
France 2.
Ceux-ci portent
plainte contre lui pour diffamation.
Condamné le 19 octobre 2006 par le Tribunal de Grande instance de Paris, Philippe Karsenty interjette appel.
Après avoir demandé
par un arrêt du 3 octobre 2007
les rushes du reportage à France 2 et les
avoir visionnés,
la Cour d’appel de Paris relaxe Philippe Karsenty, le 21 mai 2008, dans un arrêt tançant sévèrement les intimés.
Le 28 février 2012, l a
Cour de cassation casse ces deux arrêts pour raison de procédure : c'est au seul prévenu d'apporter la preuve de sa bonne foi.
Autrement composée,
la Cour d’appel de Paris entend les parties ce 16 janvier 2013 afin de
confirmer ou d’infirmer le jugement de première instance.
Saynètes de guerre jouée
Philippe Karsenty montre le matériel avec lequel il va
présenter sa position : sa présentation Powerpoint composée de rushes
d’agences de presse du 30 septembre 2000 et sa maquette du carrefour de
Netzarim réalisée au centième.
Puis, il rectifie l’erreur factuelle du président de la
Cour : il n’y avait qu’une seule « position israélienne » au carrefour de Netzarim.
Après avoir rappelé ses fonctions politiques -
maire-adjoint de Neuilly, porte-parole et responsable de la Politique étrangère
du Parti Libéral Démocrate -, il replace l’affaire al Dura dans son contexte
historique et insiste sur « l’impact
planétaire des images » controversées : de Ben Laden les utilisant pour inciter
des djihadistes à la haine jusqu’à Mohamed Merah assassinant pour « venger les enfants palestiniens », via
la vidéo de l’égorgement du journaliste américain Juif Daniel Pearl dans
laquelle est incrustée l’image des al-Dura.
« En 2002, comme
pour beaucoup de monde, il me semblait totalement impensable que France 2, la télévision
publique française ait diffusé un faux reportage, ou même qu’elle ait pu
commettre la moindre erreur, surtout dans le cadre d’un reportage commenté par
Charles Enderlin. C’est en France la voix du Proche-Orient. Ainsi, avant
d’ouvrir une réunion avec la presse à l’ambassade de France en Israël,
Dominique de Villepin a interrogé : « Qu’en pense Charles ? » Il faut rappeler la force du personnage
Enderlin. C’est quelqu’un de très convaincant. Si j’osais, je dirais que c’est le Thierry Roland du Proche-Orient »,
indique Philippe Karsenty.
Et de rappeler les soutiens politiques dont bénéficie
Charles Enderlin : Jacques Chirac, ancien Président de la République,
Bertrand Delanoë, maire de Paris. « Et
Shimon Peres », ajoute Charles Enderlin.
« En fait, je
pense que Charles Enderlin est une victime. Victime de son caméraman qui lui a
refilé des images douteuses. Victime de sa réputation qui l’a peut-être empêché
de revenir sur son erreur initiale. Victime de ses amis, ou ceux qui se
prétendent être ses amis, qui ont bâti autour de lui une muraille destinée à le
protéger de la vérité », estime l’appelant.
Philippe Karsenty décrit son implication progressive dans la polémique, au
fil des rebondissements, de ses recherches personnelles et de l’activité de son
agence.
Il démarre sa présentation en rappelant les principes de la
Charte des antennes de France Télévisions (2) avant de montrer,
extraits de JT à l’appui, les procédés de France 2 pour relater, à son avantage,
les péripéties judiciaires de l’affaire.
Puis, il évoque l’interpellation de Rémy Pfimlin, alors
candidat à la présidence de France Télévisions, par le sénateur Plancade, le 12
juillet 2010, au nom de la Charte du groupe audiovisuel public.
Comme en 2008, mais en début de sa démonstration, Philippe
Karsenty prouve, images à l’appui, que France 2 avait aussi diffusé le 1er
octobre 2000, comme fait réel une séquence mise en scène par des Gazaouis et,
commentée par Charles Enderlin. Gêne du côté des intimés.
Philippe Karsenty poursuit en montrant qu’au carrefour de
Netzarim, ce 30 septembre 2000, on tournait plusieurs fausses scènes de guerre
avec des Palestiniens anonymes. Dissèque ces saynètes jouées et présentées
comme incidents authentiques révélateurs de tensions. Liste des incohérences de
ce célèbre reportage. Détaille les invraisemblances : pas de traces de
sang sur le trottoir, sur les vêtements ou sur le mur, peu d’impacts de balles
sur ce mur pour une fusillade d’armes automatiques qui aurait duré 45 minutes,
etc. Souligne les contradictions entre les versions de Charles Enderlin et de
Talal Abu Rahma, qui a « choisi le
journalisme pour défendre la cause palestinienne », selon ses propres
termes rapportés dans Le Matin du Sahara
du 2 avril 2001.
Au terme d’une démonstration d’environ une heure et demie,
interrompue par un bref rappel contextuel de Charles Enderlin, Philippe
Karsenty conclut avec une citation extraite d’un de ses deux textes
incriminés : « Charles Enderlin
se trompe, et du même coup nous trompe ».
Pendant ce quasi-cours d’analyse des images, Charles
Enderlin ne conteste rien. Quand il s’y risque une fois, il est vite démenti
par les images qui défilent ou des arrêts sur images. Lorsque Philippe Karsenty
cite une déclaration du caméraman Talal Abu Rahma - « Les Israéliens ont tiré sans discontinuer sur l’enfant pendant 45
minutes » -, Charles Enderlin hoche négativement la tête, puis
réfute : « Ce n’est pas vrai ».
« Regardons alors ces images !
», invite l’appelant. Que voit-on ? Le caméraman de France 2 répéter
plusieurs fois : « Les soldats
israéliens ont visé l’enfant pendant 45 minutes ».
Parole aux plaignants. Charles Enderlin souligne combien il
est un bon citoyen israélien, qu’il a été soldat dans l’armée israélienne, et
ses enfants aussi. Sous-entendu : il n’a aucune raison de nuire à l’Etat
d’Israël dont il est citoyen.
En quelques phrases rapides, il brosse le tableau de
tensions liées à la visite d’Ariel Sharon sur « l’esplanade des
mosquées » (mont du Temple, Nda). Certes, il se trouvait ce 30 septembre
2000 à Ramallah, et non à Gaza, mais il connaît les lieux, et fait confiance à
Talal Abu Rahma qui, tout en filmant la scène controversée, lui a dit lors d’un
appel téléphonique dramatique : « Je
suis en train de filmer la mort d’un enfant ». Charles Enderlin
n’explique pas comment son cameraman savait, de façon prémonitoire, que
l’enfant, et non le père, allait mourir, alors qu’on ne voit aucune blessure
sur l’enfant. Puis, il justifie les refus de communication de rushes à Nahum
Shahaf, et évoque l’opacité de l’armée israélienne.
Le moindre doute l’a-t-il effleuré sur son cameraman ?
Il a interrogé le Shin Bet sur Talal Abu Rahma qui « sort régulièrement de Gaza ». Et de reconnaitre que Talal Abu Raham "n'a plus sa carte de presse".
Après avoir cité le dictionnaire Littré pour se justifier
d’avoir allégué à tort à Télérama
avoir coupé les images de « l’agonie
de Mohamed al-Dura », il convient « s’être trompé sur le mot agonie ».
Charles Enderlin et France Télévisions sont venus avec des
DVD renfermant des films déjà montrés devant la Cour d’appel en 2008, essentiellement le reportage controversé et des extraits
de journaux télévisés en 2000. Des films censés répondre aux questions
soulevées par l’appelant.
Incroyable, mais vrai : des problèmes techniques
empêchent longuement leur visionnage. Obligeamment, Philippe Karsenty prête ses
hauts parleurs pour permettre une audition à un volume sonore normal.
Fait amusant : certaines images montrées par les
plaignants ont déjà été décortiquées par Philippe Karsenty qui avait fait rire
la salle en pointant des bizarreries.
Quant à l’image d’un enfant palestinien prise à la morgue
ce 30 septembre 2000 et présentée par les plaignants comme étant celle de Mohamed
al-Dura, Philippe Karsenty prouve, chronologie de la journée à l’appui, que les
deux enfants sont différents.
Trois témoins
En soutien de l’appelant : trois témoins.
Journaliste, Esther Schapira a réalisé, en 2002, Drei
Kugeln und ein totes Kind (en français : Trois balles et un enfant mort), commercialisé sous les titres Three bullets and a dead child, et Qui a tué Mohamed al-Dura ?, en
interrogeant chaque partie, et à une époque où elle « ne s’interrogeait pas sur l’authenticité des images ». Elle
concluait que le garçon avait été plus vraisemblablement tué par les
Palestiniens que par les Israéliens. Elle a été surprise par le refus de
Charles Enderlin de lui communiquer ses rushes - France 2 et ARD font
partie d’un « réseau européen »
qui d’ordinaire coopère. Au « lieu
de soutien », elle a « reçu
des menaces ». Son documentaire est diffusé en 2002 par la chaine
allemande ARD. Esther Schapira raconte comment Philippe Karsenty a pris contact
avec elle, dès 2002, et comment il est alors allé à Francfort pour visionner
ses rushes de longues heures durant. Une phrase importante qui abonde dans le
sens de l’appelant et que ses avocats rappelleront dans leur plaidoirie pour
prouver son enquête sérieuse, et sa prise de conscience des incohérences et contradictions
du reportage de France 2 dès 2002.
Après avoir visionné les rushes de France 2 lors de
l’audience de 2007, Esther Schapira réalise
en 2009 Das Kind, Der Tod, und Die Wahrheit (The Child, the Death, and the Truth, L’enfant, la mort et la vérité), documentaire « composé aux deux tiers à partir de ses
rushes » de 2002. Elle tient à rectifier deux « erreurs graves » de Charles
Enderlin dans son livre Un enfant est
mort : elle rappelle s’être rendue à Gaza, et que ses documentaires
ont été vendus hors d’Allemagne : le premier à neuf pays, le second à cinq
pays.
Expert médical et chirurgien notamment de guerre, le Dr
Patrick Bloch précise qu’un enfant touché par balles « ne bouge plus, par un phénomène de choc
traumatique, dans un état de sidération », à la différence de l’enfant
filmé mobile. Dans ces situations-là, il « existe toujours des sorties des projectiles atteignant les membres »,
sauf la tête et le thorax où les projectiles peuvent rester. Et les dégâts de
balles à haute vélocité – projection de chair et écoulement de sang – sont
impressionnants, alors que le reportage ne montre aucun de ces dommages. Ainsi,
si l’artère fémorale est touchée par une de ces balles - ce que le père a
déclaré -, le sang s’écoule à « 300-600
ml/minutes, soit une perte de 4,5 litres de sang. En dix minutes, on est vidé
de son sang ». Or le père est censé être resté sur place pendant une
vingtaine de minutes avant qu’une ambulance arrive pour le récupérer.
Représentant le ministère public, esprit vif servi par une formulation concise,
Jean-François Cormaille de
Valbray, interroge ce médecin-expert sur une petite tache rouge qu’il affirme
discerner sur l’abdomen de Jamal al-Dura. Hésitant, le médecin les observe,
puis remarque, après réflexion que c’est probablement une petite tâche apparue
au développement, mais que cela ne peut être une tache de sang.
Expert balistique près de la Cour
d’appel de Paris, Jean-Claude Schlinger a effectué son expertise
à la demande de Philippe Karsenty, en janvier 2008 et à partir du reportage et
d’informations annexes. Des « huit impacts de balles » sur le mur errière les al-Dura,
il en induit l’impossibilité de tirs venant de la
position israélienne – la forme aurait été ovale (angle de tir de 30°), et non
ronde -, et l’invraisemblance de tirs à l’arme automatique pendant 45 minutes.
Dans son rapport, cet expert envisage la possibilité d’une « mise en scène ». « Mais
qu’est-ce qui permet d’affirmer que les tireurs ayant visé les al-Dura n’ont
pas tiré au coup par coup ? », s’enquiert Jean-François Cormaille de Valbray. « Le cameraman le dit », répond
l’expert.
Une diffamation
revendiquée
En cette fin
d’après-midi, débutent les plaidoiries.
Poursuivi pour diffamation (3),
le prévenu est relaxé s’il apporte la vérité des faits (exception de vérité) ou
démontre sa bonne foi qui, selon la jurisprudence, suppose la réunion de quatre
conditions : une enquête préalable sérieuse, un but légitime, la prudence dans
l’expression et l’absence d’animosité personnelle. La relaxe est généralement
prononcée en accordant le bénéfice de la bonne foi.
D’une voix qui ne porte pas, Me Bénédicte Amblard, avocate
de France Télévisions (4) et de Charles
Enderlin, dénonce une « entreprise
de démolition médiatique », s’emploie à démontrer que les éléments
constitutifs de la diffamation sont réunis, soutient que Philippe Karsenty ne
disposait pas en 2004 des informations justifiant les propos incriminés,
sollicite sa condamnation et « la
publication judiciaire pour tourner la page » : un livre et un
film sont annoncés...
Pour le parquet, l’avocat général Jean-François Cormaille de Valbray, a rappelé
que la Cour statue non sur la « vérité
historique » dans un « débat
délicat, difficile », mais sur « le
caractère diffamatoire des propos » poursuivis. Il s’en rapporte à
l’appréciation de la Cour. Comme il l’avait fait lors du procès de Jamal al-Dura contre le Dr Yéhuda David et le journaliste Clément Weill-Raynal.
Avocats de Philippe Karsenty, Me Delphine Meillet et Me
Patrick Maisonneuve revendiquent la stratégie de provocation délibérée de leur
client. Oui, celui-ci a recouru à la diffamation légitime, car c’était la seule
voie possible face au silence médiatique occultant en France les
questionnements sur la réalité des allégations du reportage. Et de citer des
jurisprudences récentes autorisant, pour des « débats d’intérêt général », « l’immodération des propos », « le recours à une certaine dose d’exagération, voire de provocation,
dans les propos » (Cour de Cassation, 3 février 2011).
Bref, Philippe Karsenty a commis une « infraction utile dans notre démocratie ».
Une diffamation dénuée d’animosité, dans un but légitime, de bonne foi, étayée
par une enquête sérieuse échelonnée au fil des ans et auprès de « sources différentes ».
Moment d’humour : Me Delphine Meillet ironise sur les
attestations produites par les intimés et visant à authentifier des attestations
antérieures cocasses de cameramen palestiniens.
L’arrêt de la Cour sera rendu le 3 avril 2013.
Silence de médias
français
Finalement, le clash est survenu au sortir de l’audience,
mais pas entre les parties au procès.
Dans le hall contigu à la salle d’audience, Charles
Enderlin traite en anglais Esther Schapira de « journaliste militante ».
Et il s’étonne qu’elle n’ait interviewé que trois des
quelques vingt soldats de la position israélienne ce 30 septembre 2000. « Pourquoi ne l’avez-vous pas dit à la Cour »,
lui ai-je rétorqué. Haussement las d’épaules de Charles Enderlin. « Vous auriez pu le dire à votre avocate, qui
l’aurait répété à la Cour », ai-je insisté.
A ma réplique « Talal
Abu Rahma est un cameraman militant », il ne répond rien et s’éloigne,
encadré par trois individus dont l’un lui murmure qu’il est filmé.
Esther Schapira m’expliquera ensuite avoir interviewé les
trois seuls soldats israéliens placés dans l’angle de la position des al-Dura,
les autres n’ayant pas pu être en situation de voir la scène controversée.
Journalisme à la française contre celui à l’anglo-saxonne,
opacité contre transparence, confiance inébranlée contre doute méthodique… Tout
oppose ces deux journalistes.
Depuis 2000, les positions de France 2 et de Talal AbuRahma ont évolué. Ainsi, Arlette Chabot alors directrice de
l’information de France 2, a
déclaré le 16 novembre 2004 : « On ne saura
jamais quelle est l’origine des tirs. Venaient-ils de la positon israélienne ou
palestinienne ? »
Pourtant, malgré les révélations sur Pallywood (5), Hezbollywood et autres
Arabwood, Charles Enderlin campe sur sa position : il maintient à ce jour
son commentaire de 2000. Sans convaincre.
Charles Enderlin connaît bien les lieux ? Pourtant,
interrogé par Richard Landes voici quelques années, il s'est trompé dans la localisation de la position militaire israélienne dans un plan.
Et donne des détails troublants. Lors de cette audience,
Charles Enderlin affirme que l’ambulancier a tenté vainement de réanimer
Mohamed al-Dura. Un fait semble-t-il nouveau. Or, l’ambulance est arrivée au
carrefour après l’image sur laquelle ce journaliste affirme que Mohamed al-Dura
est mort. Donc, cet ambulancier était-il médecin ? Si oui, pourquoi et
comment a-t-il tenté de le réanimer ? Mystère. D’autant que pendant les 45
minutes de la fusillade – durée alléguée par les plaignants -, Mohamed al-Dura
s’est vidé de son sang. Un sang pourtant invisible sur les images.
Curieusement, la dépêche
AFP sur cette audience n’a été reprise par aucun média français.
Seul Rue 89
a publié un article plutôt partial.
Le 21 janvier 2013,
Charles Enderlin a publié sur son blog un compte-rendu factuel de l’audience.
A la troisième personne du singulier. Et sans répondre aux questions soulevées
par son reportage.
Bizarrement, et au 8 février 2013, soit plus de trois semaines après cette audience, le site et la newsletter du CRIF n'ont publié aucun article sur cette audience judiciaire. Alors qu'ils ont publié un article sur l'appel à manifester du SNJ et l'interview filmée d'Esther Schapira, et alors que Richard Prasquier a assisté à l'audience et n'a pas caché son soutien à Philippe Karsenty.
Dans sa lettre à Charles Enderlin publiée le 10 février 2013 et intitulée "Vous saviez que l'enfant n'était pas mort", la journaliste-productrice Esther Schapira revient notamment sur l'épisode relaté en fin d'article et par aucun autre média.
Les 11 et 12 février 2013, Charles Enderlin a publié deux textes virulents intitulés Esther Schapira et Esther à Gaza.
Bizarrement, et au 8 février 2013, soit plus de trois semaines après cette audience, le site et la newsletter du CRIF n'ont publié aucun article sur cette audience judiciaire. Alors qu'ils ont publié un article sur l'appel à manifester du SNJ et l'interview filmée d'Esther Schapira, et alors que Richard Prasquier a assisté à l'audience et n'a pas caché son soutien à Philippe Karsenty.
Dans sa lettre à Charles Enderlin publiée le 10 février 2013 et intitulée "Vous saviez que l'enfant n'était pas mort", la journaliste-productrice Esther Schapira revient notamment sur l'épisode relaté en fin d'article et par aucun autre média.
Les 11 et 12 février 2013, Charles Enderlin a publié deux textes virulents intitulés Esther Schapira et Esther à Gaza.
Le 26 juin 2013, après deux reports de son délibéré - 3 avril et 22 mai 2013 -, la Cour d'appel de Paris a rendu son délibéré. Elle a confirmé la condamnation de Philippe Karsenty pour diffamation à l'égard de Charles Enderlin et de France Télévisions. Elle l'a aussi condamné à leur verser 7 000 euros, au lieu d'un euro, à titre de dommages et intérêts.
(1)
Emilie Raffoul a signé Pour Charles Enderlin. Avec Stéphane
Haumant, elle a est l’auteur du numéro Rumeurs, intox : les nouvelles de
guerre de l’info, réalisé par Stéphane Malterre, produit par Tac Presse, et
diffusé le 24 avril 2008 dans le cadre de l’émission Jeudi Investigation sur Canal +. Celle-ci et Tac Presse ont
été condamnés pour diffamation à l’encontre de Philippe Karsenty le 10 juin 2010.
Une condamnation confirmée par la Cour d’appel de Versailles le 5 janvier 2012
(2)
http://www.francetelevisions.fr/downloads/charte_des_antennes_web.pdf.
Voir page 50
(3) La diffamation est une « allégation ou imputation d’un fait qui porte atteinte à l’honneur ou à la considération de la personne » (article 29 de la loi du 29 juillet 1881)
(4) France 2 est une des chaines de France Televisions
(5) La scène du cadavre
tombant de la civière, se relevant prestement pour reprendre sa place sur la
civière, a été diffusée au printemps 2002 par France 2.
Articles
sur ce blog concernant :
Publié le 25 janvier et le 10 février 2013, cet article a été modifié le 29 juin 2013.
MERCI.
RépondreSupprimerComme d'habitude, un travail exceptionnel. Merci Véronique Chemla !
RépondreSupprimerExcellent travail journalistique. Merci.
RépondreSupprimerMerci pour la reconstruction. Reste incroyable que dans toute cette histoire de mensonges et supercherie, c'est Philippe Karsenty l'accusé! C'est le monde à l'envers!!
RépondreSupprimerMerci pour cet article.
RépondreSupprimerLe problème dans toute cette affaire,c'est
l'attitude de Charles Enderlin, qui semble
refuser l'authenticité des faits et de leurs
preuves par des spécialistes.
Le public a soiuf de vérité, de justice et pas
de manipulations.
chapeau
RépondreSupprimerMerci. Un souhait:que CH.Enderlin reconnaisse
RépondreSupprimer"qu'il a été trompé..."et que son reportage
a été une incitation à la haine qui a causé le lynchage de deux réservistes israéliens égarés à rammallah quelques jours aprés.Quand il y a eu des assassinats d'innocents,on a le droit et le devoir de dénoncer le Mal.
Merci Karsenty pour votre courage et votre combat qui n'est en rien "diffamation "
Ce que je trouve malsain, c'est le soutien qu'apportent certaines personnes du gouvernement Israélien et surtout le soutien de Shimon Peres, à Charles Enderlin, alors que Philippe Karsenty, que j'admire profondément, veut rétablir la vérité et à tout prix sauver l'honneur de Tsahal et d'Israël (le mot honneur ne veut plus dire grand chose, de nos jours).
RépondreSupprimerCe ne serait que justice et vérité, ras le bol des médias manipulateurs.
"Charles Enderlin souligne combien il est un bon citoyen israélien, qu’il a été soldat dans l’armée israélienne, et ses enfants aussi. Sous-entendu : il n’a aucune raison de nuire à l’Etat d’Israël dont il est citoyen."
Il est vraiment dangereux ce "journaliste", il ne s'est même pas rendu compte ou il ne le sait que trop, qu'à cause de lui, les Israéliens, donc les juifs, ont été détestés encore plus dans le monde et qu'il a justifié des actions de haine envers les juifs ?
Monsieur Philippe Karsenty, merci de nous donner de l'espoir vers une presse et des médias qui sauraient dorénavant qu'ils n'ont qu'à faire leur boulot, informer et non, déformer.
Michel C.
Aujourd'hui,tout le monde sait que ce reportage n'est pas crédible. Celui qui ment le sait toujours, même s'il refuse de l'admettre.
RépondreSupprimer"L'éternité, c'est long!"a dit Mitterrand en
quittant ses amis pour la dernière fois.
Mais pas pour tous.
Merci à Ph. Karsenty pour la défence de la
vérité,de la justice pour les victimes,
et l'espoir amical que ce long combat apporte
aux familles des victimes .
M.
Excellent Compte rendu de clarté
RépondreSupprimerUn vrai professionnalisme
Oui probablement mais aujourd'hui en France qui se souvient de cette affaire parmi le quidam des mortels ?
RépondreSupprimerC'est une querelle de menteurs qui n'interressent que très peu les simples citoyens qui feront les informations de demain si ça continue et là il sera peut-être plus difficile de les manipuler .
ici et maintenant
RépondreSupprimernous devons lutter contre ce terrorisme intellectuel et médiatique, autre forme de djihad antijuif, provenant des palestiniens
RépondreSupprimerde toutes nos forces
merci Mr Karsenty
pour daniel Pearl, pour Myriam qu'on a tirée par les cheveux comme les nazis dans les camps faisaient avec les enfants juifs
signé Perle
Un grand merçi pour ce travail de professionnel! Et la presse de répéter; "C'est la vérité puisque les journaleux l'ont dit!!!!"
RépondreSupprimer