mercredi 26 octobre 2022

Les Rothschild en France au XIXe siècle

La Bibliothèque de France (BnF) a proposé en son site Richelieu l’exposition éponyme, assortie d'une magnifique catalogue, et axée sur James de Rothschild (1792-1868). L’histoire des Rothschild, dynastie Juive importante, emblématique et éclairée de banquiers, mécènes et philanthropes profondément insérée dans l’histoire politique, économique, sociale, intellectuelle - saint-simonisme - et culturelle de la France et d’autres pays européens sur plusieurs siècles. Arte diffusera le 27 octobre 2022 à 11 h 00 « Les Rothschild - Ascension et tribulations d’une famille » (Die Rothschild-SagaAufstieg - Reichtum – Verfolgung), documentaire de Klaus T. Steindl. 

Le monde d'Albert Kahn. La fin d'une époque
« Le monde d’Albert Kahn. Moyen-Orient : la naissance des nations » de David Okuefuna 
« Une élite parisienne. Les familles de la grande bourgeoisie juive (1870-1939) » par Cyril Grange

En 2004-2005 et 2006-2007, le musée du Louvre a consacré des expositions à la collection d’Edmond de Rothschild (1845-1934), fils du baron James de Rothschild et HaNadiv Hayadoua (Bienfaiteur bien connu) sioniste - dès 1882, achats de terres insalubres et infestées par la malaria situées en Eretz Israël à des propriétaires arabes résidant au Liban comme la famille chrétienne Sursock, soutien aux localités juives, etc. - inhumé avec son épouse en Israël en 1954. Une collection de plus de 60 000 chefs d’œuvre - Finiguerra, Léonard de Vinci, Raphaël, Mantegna, Robetta, Bosch, Dürer, van Dyck, Seghers, Rembrandt, David… -, du dessin et de l’estampe, de manuscrits et livres rares, donnée au musée du Louvre par les héritiers d’Edmond de Rothschild en 1935. Ce « don exceptionnel modifia structurellement les collections » de ce musée.

« C’est à la famille que nous devons tout, et la meilleure fortune dont nous jouissons, avec l’aide de Dieu, est notre dévouement les uns aux autres et notre unité », a déclaré James de Rothschild.

« Histoire d’une famille et portrait de la haute finance éclairée du XIXe siècle », cette exposition est centrée sur « la personnalité emblématique » de James de Rothschild. 

En 1812, James de Rothschild (1792-1868), un des cinq frères de la famille Rothschild de Francfort - Mayer Amschel (1744-1812) y fonde la banque -, arrive à Paris pour y créer une filiale de la maison Rothschild. Agé de 20 ans, il devient rapidement grâce à son talent dans les affaires un des « acteurs éminents du monde de la haute banque » éclairée du XIXe siècle. Des banquiers venus de toute l’Europe comme lui vont transformer Paris en une place majeure de la finance et participer à la révolution industrielle.

Dans cette dynastie, James de Rothschild en est la figure centrale, « l’archétype de l’homme d’affaires du XIXe siècle, et d’autres grands banquiers Juifs, tantôt alliés, tantôt rivaux », les frères Pereire et les Camondo. Une profonde divergence oppose les Rothschild et les Pereire sur le recours à des emprunts populaires.

Ainsi, James de Rothschild « s’investit dans les chemins de fer, en particulier la ligne Paris-Boulogne, la construction de la Gare du Nord et de toutes les gares qui ponctuent le trajet. Ce sont aussi des investissements dans les mines, les fonderies et l’urbanisation de Paris ». « Accompagnant la révolution industrielle, James de Rothschild investit dans les chemins de fer (ligne Paris-Saint-Germain, Compagnie des chemins de fer du Nord, Compagnie des chemins de fer de l’Est), les mines, le transport de marchandises (or, mercure, tabac, etc.), lance des emprunts d’État, achète un grand cru bordelais (Château-Lafite). La réussite de celui qu’on surnomme « le Grand Baron » résiste à une vertigineuse succession de régimes politiques et le conduit à côtoyer les plus grands hommes de son temps. Témoins de la vie mondaine des Rothschild, leurs demeures de la rue Laffitte et de Ferrières sont le cadre de nombreuses réceptions brillantes où l’on croise les plus grandes figures des arts et des lettres : Delacroix, Balzac, Heinrich Heine, Berlioz, Rossini ou Chopin ».

Par le destin de la famille Rothschild, cette exposition dans la galerie Mansart évoque l’histoire du premier XIXe siècle, « le passage d’une société aristocratique et rurale à une société bourgeoise et industrielle, du Premier Empire aux prémices de la République via la Restauration, le règne de Louis Philippe et le Second Empire », le mode de vie et de représentation de ces grands banquiers - hôtels particuliers, châteaux, grands crus, collections d’œuvres d’art - ainsi que leur rôle important de mécènes. Elle montre un monde brillant et raffiné, une vie mondaine intense et loin d’être superficielle.

Les Rothschild ont contribué à façonner l’Europe économique, bancaire, industrielle et culturelle du XIXe siècle. « Entrepreneurs, ces grands banquiers s’engagent dans l’industrie, les matières premières, les transports. Esthètes, ils animent autour d’eux une vie artistique très riche ». Philanthropes à une ère sans Etat providence, ils ouvrent un hôpital qui porte leur nom, soutiennent la recherche médicale, créent la fondation de l’hôpital Rothschild, ou œuvrent pour la promotion d’un nouvel urbanisme. Grâce à « leurs liens familiaux et leurs réseaux » - de Francfort à Londres, Vienne, Naples et Paris -, ils « essaiment leurs affaires dans différents pays ». « Collectionneurs passionnés d’œuvres d’art, ils ont joué le rôle de mécènes auprès des institutions françaises : musée du Louvre, Bibliothèque nationale, musée national de la Renaissance, château d’Écouen, musée des Arts décoratifs, musée Camondo, etc. »

Témoins de la « vie mondaine des Rothschild, leurs demeures de la rue Laffitte à Paris et de Ferrières sont le cadre de nombreuses réceptions brillantes où l’on croise les plus grandes figures des arts et des lettres : Delacroix, Balzac, Heinrich Heine, Berlioz, Rossini ou Chopin ». Balzac (La Maison Nucingen), Zola (L’Argent) ou Stendhal (Lucien Leuwen) s’inspirent d’illustres membres de la branche parisienne pour créer des figures romanesques.

Près de deux cents pièces, manuscrits, tableaux, photographies et documents d’archives… Il n’en faut pas mois pour évoquer le « mode de vie - châteaux, œuvres d’art et grands crus -, les activités bancaires, les entreprises industrielles, le rôle de philanthrope et de mécène culturel » des Rothschild au XIXe siècle.

Près de deux cents pièces, manuscrits, tableaux - La Laitière de Greuze, première œuvre achetée par James de Rothschild et conservée au musée du Louvre -, photographies et documents d’archives et de collections de divers musées… Il n’en faut pas mois pour évoquer le « mode de vie, les activités bancaires, les entreprises industrielles, le rôle de philanthrope et de mécène culturel » des Rothschild au XIXe siècle.

Citons des objets d’orfèvrerie - tabatière de la reine Victoria en orfèvrerie, diamant et émail (musée du Louvre), nautile monté en hanap avec la représentation de Neptune, en coquillage, orfèvrerie et vermeil, (musée national de la Renaissance, château d’Écouen) - ou des objets religieux telle cette plaque ornementale pour la Torah en argent, corail, perles et pierres semi-précieuses (musée d’art et d’histoire du Judaïsme), des manuscrits enluminés dont le Chansonnier de Jean de Montchenu du XVe siècle, le Bréviaire de Martin d’Aragon du XIV-XVe siècle, des autographes de Pierre Corneille et Madame de Maintenon (département des Manuscrits de la BnF) ainsi que des ouvrages à reliure précieuse de la bibliothèque de James-Édouard, le troisième fils de James et Betty et léguées par sa veuve à la Bibliothèque nationale de France en 1922 (département de la Réserve des Livres rares).

Ajoutons des photographies, dont une série de cartes de visites d’Eugène Disderi (1819-1889) représentant James de Rothschild ou l’Album de vues photographiques, Chemins de fer du Nord, Ligne de Paris à Boulogne, commandé par James, président de la Compagnie, au célèbre photographe Edouard Baldus (1813-1889), illustrant gares, rails et viaducs (département des Estampes et de la photographie de la BnF).

La dynastie
Un immense arbre généalogique de la famille Rothschild sur huit générations accueille le visiteur.

A son sommet : Mayer Amschel Rothschild (1744-1812), fondateur de la dynastie.

Puis ses cinq fils et ses cinq filles. Banquier à Francfort, Mayer Amschel édifie avec ses fils un « réseau familial d’affaires et de commerce ». Amschel reste à ses côtés, Nathan va à Londres, Salomon à Vienne, Carl à Naples et James à Paris.

« Anoblis par l’empereur d’Autriche François Ier en 1822, les cinq frères font figurer dans leur blason un bouclier rouge - « rote Schild » en allemand - au centre de l’écu et cinq flèches symboles de l’unité de la famille, tenue par une main ferme, sans doute celle du père ».

Une unité renforcée par les mariages entre cousins des diverses branches.

À 20 ans, James de Rothschild arrive à Paris
James de Rothschild, le futur « Grand Baron », était le benjamin des fils et le cadet des dix enfants de Mayer Amschel Rothschild.

James a grandi dans la Judengasse - la rue des Juifs - à Francfort. Il est élève à l’école juive et a appris à écrire en « jüdisch », version francfortoise du yiddish. La langue de sa correspondance avec ses frères.

En 1809, James de Rothschild « séjourne en Angleterre chez son frère Nathan, le premier Rothschild à avoir émigré à l’époque où ce dernier diversifie son entreprise, délaissant le commerce du textile et d’autres marchandises pour s’intéresser au monde de la finance et transformer sa société « NM Rothschild» en « Rothschild Brothers ».

En 1812, James se fixe à Paris. En témoigne un rapport de la police.

Dès 1814, les frères Rothschild « sont chargés du financement de l’effort de guerre de la coalition emmenée par la Grande-Bretagne contre Napoléon Ier. La situation de James en France est pour le moins délicate et il doit user de tout son talent diplomatique, une fois la guerre terminée, pour que l’entreprise familiale puisse obtenir des contrats gouvernementaux face à des concurrents bien établis comme la maison britannique « Baring Brothers » et la maison parisienne de Jacques Laffitte ».

En 1816, à l’initiative de James, la maison de Paris est enregistrée au registre du commerce.

En 1817, James choisit comme siège de la société « Messieurs de Rothschild Frères » le quartier des affaires, à l’hôtel d’Otrante, situé rue Laffitte, ancienne propriété de Fouché. C’est la troisième entité de la firme Rothschild après Francfort et Londres.

L’empereur d’Autriche accorde alors aux cinq frères le droit d’utiliser une particule, puis les anoblit en 1822. Lors d’un voyage en Angleterre chez Nathan, son frère Salomon confie à James que « de Rothschild Frères » est un « grand sujet de conversation dans la capitale » : « il n’a jamais existé à Paris une maison aussi fameuse que la vôtre ».

James et Betty
En 1824, James épouse sa nièce Betty, âgée de 19 ans. Betty est la fille de son frère Salomon, installé à Vienne, et de Caroline Stern. Le couple aura cinq enfants : Charlotte, Alphonse, Gustave, Salomon et Edmond.

Les femmes de la famille Rothschild « sont encouragées à jouer un rôle dans la société, à être des hôtesses accomplies, à représenter leur famille dans ses activités philanthropiques, à s’occuper de l’éducation des enfants et à aider leur époux dans les affaires en rendant une myriade de services à leurs clients et à leurs amis ».

A l’instar d’autres femmes de la famille, Betty sera médiatrice entre les générations, notamment entre les pères et les fils. Elle jouera un rôle éminent dans la création de fondations caritatives. 

Banque, industrie et affaires
Après des guerres napoléoniennes, James et ses frères consacrent plusieurs années au règlement et aux transferts de subsides aux Etats victorieux.

Enrichi, James s’impose vite dans les milieux financiers de la haute-banque parisienne.

En 1820, il « accorde un prêt d’un million de francs au gouvernement de Louis XVIII face aux émeutes de juin survenues après l’assassinat du duc de Berry ».

Et ainsi, pendant un demi-siècle, James aide « les différents gouvernements, de la Restauration au Second Empire en passant par la monarchie de Juillet, au travers de prêts, emprunts, rentes et autres obligations. Banquier puissant, il a la confiance des souverains dont il gère les fortunes, celle de Louis-Philippe ou de la famille royale de Belgique, mais aussi des politiques comme Metternich ou Thiers et des artistes parmi lesquels Balzac et Vigny ».

En relation avec ses frères, James développe des activités commerciales : acquisition de coton aux Etats-Unis, de cigares à Cuba, de bois, de métaux précieux, or, cuivre et mercure. Mais il est surtout un des promoteurs de la modernisation de la société française et de son essor économique. Il joue un rôle essentiel dans le développement du réseau de chemin de fer français.

Il s’investit dans la création des Chemins de Fer du Nord, œuvre de sa vie, et participe au développement des lignes Paris-Orléans, Paris-Lyon-Méditerranée (PLM) et aux Chemins de fer de l’Est.

James intervient aussi dans l’exploitation des minerais et des métaux, investissant dans les charbonnages de Belgique ou les mines de mercure d’Almadén, en Espagne.

Enfin, il s’intéresse aux vignobles : en 1868, il achète Château Lafitte, grand crû du Médoc, après que son gendre et neveu Nathaniel, le mari de sa fille Charlotte, a acheté Château-Mouton en 1853. 

Résidences
Résidence principale de James et de Betty, l’hôtel particulier du 19 rue Laffitte à Paris dans le IXe arrondissement de Paris, ancienne propriété de Fouché, abrite les bureaux de la banque et les appartements privés luxueux.

« L’hôtel du baron de Rothschild est comme on le sait, un des splendides hôtels de Paris… Au fond de la vaste cour qui le sépare du portail donnant sur la rue Laffitte et placées en bas du perron, deux statues tenant des torches dans lesquelles le gaz ingénieusement transformé brûle d’une façon toute pittoresque, attirent l’attention du passant et éclairent le visiteur. Une galerie règne de ce côté dans presque toute la longueur de la façade » (Édouard Ferdinand Beaumont-Vassy, Les Salons de Paris et la société parisienne sous Louis-Philippe Ier, 1866).

En 1817, à l’âge de 25 ans, James achète un château près de Paris, à Boulogne, entouré d’un vaste parc. En 1855, il le fait reconstruire entièrement dans le style néo-XVIIe siècle inspiré du château de Clagny, édifié par Mansart en 1680 à côté de Versailles. Le décorateur : le peintre Eugène Lami. Dans ce château, les Rothschild reçoivent la haute société parisienne, les personnalités du monde politique et du monde culturel lors de réceptions brillantes.

En 1838, James acquiert l’hôtel de Saint-Florentin, auparavant résidence de Talleyrand situé place de la Concorde, près de la rue de Rivoli, une adresse prestigieuse face au ministère de la Marine.

Entre 1853 et 1860, James fait construire un château à Ferrières, domaine acheté aux héritiers de Fouché en 1829. Sur les plans de l’architecte anglais Joseph Paxton, le château est achevé en 1860. Son aménagement et sa décoration sont de nouveau confiés à Eugène Lami. Ce château est confortable, luxueux ; sa décoration représentative du « style Rothschild » allie style Renaissance et Louis XIV, son grand hall et ses vastes salons sont les écrins de collections exceptionnelles d’œuvres d’art. Ferrières est le cadre de magnifiques réceptions et de chasses. Napoléon III, qui « l’honore de sa présence » le 16 décembre 1862, le décrira comme un « château des Mille et Une Nuits ». 

Collections de tableaux
En mai 1821, à 29 ans, James de Rothschild achète sa première toile, La Laitière de Jean-Baptiste Greuze (1783, Musée du Louvre, Paris). Il s’impose comme le premier collectionneur de sa famille. « Même si son père avait mené à Francfort un prospère négoce de monnaies, médailles et antiques, aucun des Rothschild n’a acquis d’œuvres de maîtres anciens avant l’arrivée de James à Paris, centre majeur du marché de l’art. A sa mort en 1868, sa collection compte une soixantaine de tableaux ».

Les « écoles hollandaises et flamandes sont les plus représentées avec une quarantaine de tableaux, notamment le Portrait de Willem van Heythuysen par Frans Hals et Le Porteur d’étendard de Rembrandt. Le goût de James l’inscrit dans la lignée des grands collectionneurs de la seconde moitié du XVIIe siècle. Sa collection se complète de tableaux de l’école française », Portrait de Mlle Duclos dans le rôle d’Ariane de Nicolas de Largillière, l’école italienne, La Sainte Famille d’Andrea del Sarto et l’école espagnole, Portrait de don Luis de Haro, marquis de Carpio de Vélasquez.

L’achat de deux primitifs flamands, La Vierge à l’Enfant avec saints et donateur par Jan Van Eyck (vers 1441 -1443) et La Fuite en Égypte de Hans Memling (avant 1494), conservés actuellement au musée du Louvre, est symbolique de la collection de James qui se distingue de celles de ses nombreux parents devenus collectionneurs à sa suite. James a développé un goût qui lui est propre et qu’il exprime avec audace, sans reculer devant des prix souvent élevés. La fonction première des tableaux qu’il achète est de décorer ses demeures ».

Sa fille Charlotte, baronne Nathaniel de Rothschild, fait don de La Laitière au musée du Louvre en 1899 et « lègue ses collections à de nombreuses institutions françaises, tout comme le feront ses frères et ses cousins ».

Henri de Rothschild, arrière-petit fils de Jamest et fils de James-Edouard, offre une bibliothèque à la BN.

Depuis plus d’un siècle, cette « tradition de mécénat est emblématique de la famille Rothschild ».

Parmi les collections d’œuvres d’art : de nombreuses représentations de la Vierge. C’est la figure de la maternité qui touche les Rothschild. 

Vie sociale et culturelle
James et Betty de Rothschild évoluent dans cette haute bourgeoisie qui, « comme la noblesse, ouvre ses salons et fait de Paris une ville de légende par ses soirées enchanteresses et ses mondanités brillantes ».

Dans « leur hôtel particulier de la rue Laffitte à Paris, ils invitent pour des concerts, tiennent quatre dîners par semaine réunissant trente à cinquante invités en habit du soir et donnent un bal tous les samedis soirs. La table de James et de Betty est la plus célèbre de Paris. Ils ont à leur service Antonin-Marie Carême (1784 -1833), l’un des plus talentueux cuisiniers de l’histoire de la gastronomie. Pour eux, il invente, entre autres, le soufflé, le saumon, et le filet de bœuf « à la Rothschild » .

Banquier, James finance des investissements français, lance des emprunts et des obligations d’état.

De son arrivée à Paris (1812) à sa mort (1868), il est « en relation avec les dirigeants politiques des différents régimes qui se succèdent » : Louis XVIII et la Restauration, Charles X, Louis-Philippe, l’éphémère Seconde République et le Second Empire. James et Betty sont particulièrement proches de Louis-Philippe et de sa famille. Grâce aux frères de James et au réseau de la banque Rothschild, ils nouent des relations amicales avec les familles royales et impériales d’ Europe.

Les Rothschild fréquentent aussi de nombreux artistes de leur temps. A leurs réceptions : des peintres, le baron Gros, Eugène Delacroix, Ary Scheffer et Ingres, ainsi que des écrivains. Client de la banque, Balzac dédicace son roman Esquisse d’homme d’affaires d’après nature à James et L’enfant maudit à Betty. Fils d’un banquier allemand, Heinrich Heine « fait partie du premier cercle des Rothschild et partage la vie de leur famille ».

Enfin, James de Rothschild voue une admiration sans faille pour les musiciens : la famille a une loge à l’Opéra, James commande à Hector Berlioz une cantate pour l’inauguration du tronçon de la ligne Paris-Lille en 1846, Chopin enseigne le piano à sa fille Charlotte et, pour elle il compose la très célèbre Valse en si mineur Opus 64. Preuve de l’intimité avec Rossini, les Rothschild le choisissent comme témoin au mariage de Lionel, le neveu de James, dans la maison familiale de la Judengasse, à Francfort.

Philanthropie
Dans la France des années 1840 et avant l’État-Providence, les malades, vieillards, orphelins et nécessiteux bénéficiaient d’initiatives de charité privée, souvent religieuse, pour pourvoir à leurs besoins. Malgré des bureaux de bienfaisance, et diverses tentatives d’organiser la solidarité parmi des groupes religieux, des pans entiers sont dépourvus de toute assistance. Ainsi, les Juifs n’ont pas d’hôpital à Paris.

James et Betty de Rothschild se distinguent par leurs actions dans de nombreuses entreprises philanthropiques, dont certaines visent la communauté juive : l’hôpital de la rue Picpus accueille des patients dès 1852, les dames de la famille Rothschild organisent des loteries au profit du Comité de Bienfaisance Israélite.

Dans certains cas, ces actions suppléent une carence dans le dispositif de bienfaisance : tels les dispensaires antituberculeux, les premiers logements sociaux de Paris et les aides à l’Assistance Publique.

Cette « dynamique philanthropique va se poursuivre au sein de la famille Rothschild pendant plusieurs générations, suffisamment longtemps pour voir des initiatives de bienfaisance ou de charité isolées se muer en philanthropie scientifique et en action sociale coordonnée ».

James de Rothschild, figure romanesque
Arrivé à Paris à 20 ans, James de Rothschild est demeuré jusqu’à sa mort dans ce pays dont il n’a jamais eu la nationalité. « Au fil des différents régimes politiques, il a conquis sa légitimité grâce à la confiance des gouvernants et de ses pairs de la haute banque, mais aussi grâce à sa vie sociale et aux réceptions de la rue Laffitte, du château de Boulogne et de Ferrières, qui lui ont permis d’honorer les personnalités de tous horizons, aussi bien politiques qu’artistiques ».

« Personnalité ancrée dans le monde des affaires et dans la vie mondaine de la haute bourgeoisie, riche, puissant, il rassemblait tous les éléments pour que la littérature s’empare de lui comme personnage de roman. Il devint ainsi un modèle pour trois des maîtres de la littérature du XIXe siècle, qui lui empruntent sans le camper totalement, des traits de sa vie » : Balzac dans La Maison Nucingen (1837), Stendhal dans Lucien Leuwen (1836) et Zola dans L’Argent (1881).

Dans ses mémoires, la comtesse Stéphanie de Tascher de La Pagerie, cousine par alliance de Joséphine de Beauharnais, écrit à propos de James lors de son décès le 13 novembre 1868 : « C’était positivement un grand financier, et il lui restera la gloire d’avoir été l’homme le plus riche de Paris. Il était le banquier des rois et le roi des banquiers. Son honorabilité et sa probité étaient au niveau de sa fortune ; il y joignait dit-on, une grande bienfaisance ».

Grands banquiers du XIXe siècle : les Pereire et les Camondo
En contrepoint de la partie principale dédiée à James de Rothschild, l’exposition présente deux grandes familles de banquiers représentatives de la haute-banque parisienne du XIXe siècle : les Camondo et les Pereire. Comme James de Rothschild, ce sont de grands financiers Juifs, « promoteurs de la société industrielle, acteurs de la vie mondaine et artistique, possédant de magnifiques demeures et des collections d’œuvres d’art léguées à leur mort aux grandes institutions françaises ».

Nés à Bordeaux, les frères Emile (1800 -1875) et Isaac (1806 -1880) Pereire se fixent à Paris dans les années 1820 et se lancent dans l’industrie et la banque. Leurs domaines d’intervention : la construction et la mise en exploitation des chemins de fer de Paris à Saint-Germain-en-Laye (1835-1837), de Paris à Versailles Rive-droite (1839). Les frères Pereire collaborent avec James de Rothschild sur le projet de la ligne Paris-Lyon (1840) et la création de la ligne Lyon-Méditerranée ; mais une rivalité et des divergences les opposent et croitront dans la banque et le chemin de fer.

Soutenu par Napoléon III, leur grand projet est la création en 1852 d’une banque de prêt à long terme pour l’industrie, le Crédit Mobilier, qui finance les travaux d’Haussmann, la création de la Compagnie générale transatlantique et la station balnéaire d’hiver d’Arcachon. Après la faillite du Crédit mobilier en 1867, les frères Pereire ne joueront plus de rôle de premier plan dans l’économie française bien qu’ils lui aient contribué à son essor très important.

L’épouse d’Isaac Pereire finance le premier vol d’Adler à bord de l’appareil L’Éole, qui se détache du sol pour la première fois, le 9 octobre 1890, dans les jardins du domaine Pereire du château de Gretz-Armainvilliers, à l’est de Paris.

Installés à Constantinople à la fin du XVIIIe siècle, les Camondo furent sans doute la famille Juive sépharade la plus puissante de l’Empire ottoman. Le manque de travaux historiques ne permet pas de décrire les origines de leur ascension sociale. Riches banquiers, ils se distinguent par leur dynamisme et leur philanthropie et sont perçus comme « Les Rothschild de l’Est ». Anoblis en 1867 par le roi d’Italie Victor Emmanuel II, les deux frères Abraham Behor et Nissim de Camondo se fixent peu après à Paris.

La génération suivante se passionne pour l’art. Fils d’Abraham Behor, Isaac est compositeur et soutient la construction du Théâtre des Champs-Elysées. A sa mort (1911), il donne au musée du Louvre toutes ses collections : mobilier, œuvres d’art d’Extrême-Orient et peinture impressionniste.

Passionné par les arts décoratifs français du XVIIIe siècle, son cousin Moïse rassemble une collection exceptionnelle dans son hôtel particulier de la rue de Monceau. Son fils unique, Nissim, meurt en combat aérien en 1917. A la mémoire de son fils, Moïse de Camondo lègue son hôtel et ses collections à l’Union centrale des Arts Décoratifs. Le musée Nissim de Camondo est inauguré en 1936.

Les derniers descendants de cette famille ont été déportés et assassinés à Auschwitz sous l’Occupation, lors de la Seconde Guerre mondiale.

ADDENDUM

En juin 2013, le Recueil de Rotschild (The Rothschild Miscellany) a inscrit sur le Registre Mémoire du Monde de l'UNESCO. Proposé en 2012 par l'Etat d'Israël, ce "manuscrit unique généreusement enluminé et orné de somptueuses miniatures réalisées en feuilles d’or et d’argent et avec des pigments précieux. Les illustrations offrent un aperçu inhabituel des coutumes religieuses, de la vie quotidienne et des modes des juifs italiens pendant la Renaissance. Ce recueil est un sommet de la peinture hébraïque sur manuscrits du XVe et un exemple sans équivalent du patrimoine culturel que les juifs ont laissé derrière eux (très peu d’objets culturels juifs de cette période sont parvenus jusqu’à nous)". James de Rothschild avait fait don de ce manuscrit fabriqué en Italie au musée d'Israël.
La baronne Philippine Rothschild (1933-2014) est morte à l'âge de 80 ans, dans la nuit de vendredi 22 à samedi 23 août 2014. Cette comédienne - Comédie Française (1958-1964), compagnie Renaud-Barrault (1973-1987), théâtre de boulevard -  était la fille de Philippe de Rothschild (1902-1988) – sixième génération de la « branche anglaise » de la célèbre dynastie de financiers –, dont elle avait hérité un château à Bordeaux et le célèbre vignoble produisant le Mouton-Rothschild, grand cru classé.  
Le Jerusalem Post (1er octobre 2014) a indiqué que Sabine Wölfleworking, politicienne allemande sociale-démocrate du Bade-Württemberg, a posté sur le mur de son compte Facebook la vidéo Le pouvoir des Rothschild sur une conspiration antisémite impliquant la famille Rothschild qui dominerait la capitale financière de Londres et les médias, et sont responsables de "meurtre de masse de millions".Devant le tollé suscité par cette vidéo antisémite, elle a retiré la vidéo de son compte Facebook et a présenté des excuses à ceux qu'elle a blessés.

Le Baron Lionel Walter Rothschild, fondateur du Rothschild Natural History Museum à London et propriétaire d'une des plus grandes collections de spécimens au monde - dont 2 250 000 papillons et 30 000 coléoptères -- est né le 8 février 1868. Fils ainé et héritier du banquier Nathan Rothschild, premier baron Juif en Angleterre, il a travaillé dans l'entreprise familiale pendant près de vingt ans sans grand intérêt. En 1908, il fut autorisé à se consacrer à sa passion. En 1938, il a fait don au British Museum d'une partie de sa collection. C'est à ce Baron Rothschild que la lettre connue comme Déclaration Balfour, par laquelle la Grande-Bretagne soutenait l'idée d'un foyer Juif en Palestine, a été adressée en 1917. 

Au printemps 2015, la famille Rothschild avait l'intention de vendre deux tableaux de Rembrandt de 1634 - Le Portrait de Marten Soolmans et le Portrait de Oopjen Coppit, son épouse - d'une valeur estimée à 150 millions d'euros. Au printemps 2015, le Louvre n'avait pas l'intention de les acquérir. Président du Mémorial de la Shoah, Eric de Rothschild, un des propriétaires de ces huiles sur toiles, a déclaré en mars 2015 : « Il y a eu ces derniers jours un certain nombre de commentaires médiatiques concernant le sort de tableaux de Rembrandt qui appartiennent à notre famille. Il est exact que nous avons sollicité un certificat de bien culturel auprès de la Direction des Musées de France et ce, dans le but de connaître le statut de ces 2 tableaux dans le cadre de nos successions. Nous avons reçu ce certificat de bien culturel et il nous permet aujourd'hui de prendre le temps de la réflexion pour décider de l'avenir de ces œuvres ». 

Le 29 mars 2015, les Pays-Bas ont annoncé qu'ils allaient acquérir « avec la France et pour 160 millions d'euros », les deux portraits datés de 1634, représentant Marten Soolmans et son épouse Oopjen Coppit, à la veille de leur mariage. Fleur Pellerin, ministre de la Culture et de la Communication, et Jet Bussemaker, ministre de la Culture des Pays-Bas "ont œuvré ensemble pendant plusieurs mois pour obtenir cet accord, selon les termes duquel les tableaux seront toujours présentés conjointement, en alternance au Louvre et au Rijksmuseum. Les propriétaires ont fait connaître leur accord pour cette vente conjointe. Les deux ministres les en remercient chaleureusement.Fleur Pellerin et Jet Bussemaker se félicitent de cette solution inédite, qui répond à l’objectif politique et culturel commun qu’elles s’étaient fixé : maintenir les deux toiles sur le sol européen et les présenter au plus grand nombre, dans deux des plus beaux et grands musées du monde. L’acquisition conjointe de ces deux chefs d’œuvre inestimables renforcera le partenariat entre le Rijksmuseum et le Louvre, et témoigne de la volonté partagée des deux pays d’approfondir encore leur très riche coopération culturelle", a déclaré le ministère français de la Culture le 30 septembre 2015.

Le 21 juillet 2015, le  magazine en ligne marocain « Lamha » (« brefs aperçus ») a diffusé une vidéo alléguant que la famille Rothschild serait « responsable du meurtre de six présidents [américains]… ainsi que de celui du tsar de Russie, de nombreux membres du Congrès et de propriétaires de banques ». Ce magazine, "qui déclare sur son site se focaliser sur « des questions culturelles et scientifiques », ajoute dans la vidéo que la famille possède la moitié des richesses du monde, contrôle le prix de l’or dans le monde entier et entretient des liens profonds avec la franc-maçonnerie". Extrait traduit par MEMRI
"Voix-off : Les Rothschild sont une famille juive d’origine allemande. Elle a gagné une influence et une richesse incomparables. Elle possède la moitié des richesses du monde. Si nous devions parler en chiffres, cela atteint 500 trillions de dollars.
La famille a été fondée par Izaak Elchanan, qui prit plus tard le nom de « Rothschild », en référence au bouclier qui ornait le portail du palace de la famille.
Pourtant, cette famille n’était jamais rassasiée. Elle voulait devenir plus qu’une simple famille. C’est ainsi qu’ils ont entrepris de construire leur empire privé. La famille a envoyé cinq de ses fils en France, en Angleterre, en Italie, en Allemagne et en Autriche, afin d’établir des antennes et d’élargir la famille. La famille ne laissant personne de l’empêcher de satisfaire ses intérêts, fut responsable du meurtre de six présidents et chefs d’Etat : Abraham Lincoln, Taylor, Harrison, Jackson, Garfield et John Kennedy, ainsi que du tsar russe, et de nombreux membres du Congrès et propriétaires de banques. Ils ont joué un rôle majeur dans l’exécution du complot sioniste, et la souffrance infligée au peuple palestinien. La famille entretient également des relations étroites avec la franc-maçonnerie.
Les biens de la famille sont incommensurables. Elle possède la plupart des banques mondiales, ainsi que CNN TV, Hollywood et des satellites. La famille Rothschild est considérée comme la famille la plus aisée qui ait jamais existé. Elle domine la moitié de la richesse mondiale et contrôle le prix de l’or à travers le monde. La famille contrôle les médias américains. Fait étrange, les membres de la famille n’apparaissent pas beaucoup en public et n’utilisent pas leurs vrais noms".
Les portraits de Maerten Soolmans et de son épouse Oopjen Coppit, chefs-d’oeuvre de Rembrandt peints en 1634, acquis conjointement par le Louvre et le Rijksmuseum d’Amsterdam, sont présentés pour la première fois au public au musée du Louvre du 10 mars au 13 juin 2016. Les deux tableaux seront ensuite exposés ensemble pendant trois mois au Rijksmuseum.

Le 1er février 2016, ces "deux tableaux ont fait l’objet d’une procédure inédite d’acquisition commune entre l’État français et l’État néerlandais pour le compte du musée du Louvre et du Rijksmuseum, garantie par un accord intergouvernemental".
"Pour cette acquisition, le Louvre a bénéficié du mécénat exceptionnel de la Banque de France".
"Seuls portraits en pied grandeur nature dans l’oeuvre du plus grand peintre hollandais du Siècle d’or, ils témoignent de la perfection du maître à représenter la subtilité des matières tout en faisant preuve d’une éblouissante économie de moyens autour d’une symphonie de noirs et de blancs".
"L’accord intergouvernemental scellant l’acquisition conjointe de ces deux chefs-d’oeuvre de Rembrandt est signé à Paris le 1er février 2016, entre la ministre française et la ministre néerlandaise de la Culture ; la France et les Pays-Bas font chacun l’acquisition d’un des deux tableaux de Rembrandt dans une démarche conjointe, témoignant de leur ambition partagée pour un patrimoine commun : si les Pays-Bas acquièrent le portrait de Maerten Soolmans et la France celui de son épouse, les deux tableaux ne pourront jamais être séparés. Ce dispositif inédit tient compte de l’intérêt particulier des deux pays pour ces œuvres extraordinaires, des liens qu’ils souhaitent renforcer entre institutions, ainsi que du coût de l’acquisition. Le travail collectif entre les deux musées et les deux ministères est un exemple inédit de coopération européenne en matière de protection du patrimoine. Il permet de conserver en Europe la paire de portraits de Rembrandt, génie européen du XVIIe siècle".
Les "deux tableaux ayant été classés « Œuvres d’intérêt patrimonial majeur », l’acquisition du portrait d’Oopjen Coppit pour la France a pu bénéficier du mécénat de la Banque de France".
Le 10 mars 2016, M. François Hollande, Président de la République, Leurs Majestés le Roi Willem-Alexander et la Reine Máxima des Pays-Bas, en visite d'Etat en France, Mme Audrey Azoulay, ministre de la Culture et de la Communication, et Mme Jet Bussemaker, ministre de l’Éducation, de la Culture et de la Science des Pays-Bas "étaient réunis au musée du Louvre pour célébrer l’entrée des portraits dans les collections nationales des deux pays".
"Présentés d’abord trois mois au musée du Louvre à proximité immédiate de la Grande Galerie (aile Denon, 1er étage, salle 13, les salles de peinture hollandaise au 2e étage de l’aile Richelieu étant en travaux), ils seront ensuite exposés trois mois au Rijksmuseum, avant d’être restaurés aux Pays-Bas".
La "restauration sera suivie par un comité franco-néerlandais dirigé par Sébastien Allard, directeur du département des Peintures du musée du Louvre, et Taco Dibbits, directeur des collections du Rijksmuseum".
"Selon l’accord conclu entre le Louvre et le Rijksmuseum, les tableaux devront être exposés toujours ensemble, alternativement au Louvre et au Rijksmuseum, selon une périodicité longue (5 ans puis 8 ans) et avec interdiction de prêt en dehors des deux musées".
Rembrandt van Rijn (1606-1669) peint les deux portraits de Maerten Soolmans et de son épouse Oopjen Coppit en 1634. À 28 ans, il connait une de ses périodes les plus fécondes, comme le montrent les deux Autoportraits du Louvre, conçus à la même époque".
"Seuls portraits en pied grandeur nature en pendants connus, ils constituent une exception dans l’oeuvre du maître. Ce type, réservé aux cours d’Europe plus méridionale, des Flandres en particulier, était alors rarissime en Hollande. Il est probable que les modèles souhaitaient, par l’introduction de ce mode de représentation, afficher leur statut social. En effet, les époux appartenaient à la plus haute bourgeoisie d’Amsterdam. Maerten Soolmans (1613-1641), fils d’un réfugié anversois, venait d’épouser, en juin 1633, Oopjen Coppit (1611-1689) l’un des meilleurs partis de la ville".
"Pour cette commande prestigieuse, Rembrandt fait se répondre les deux compositions par l’introduction d’un mouvement : Maerten Soolmans tend un gant, gage de fidélité, à son épouse qui descend un escalier vers lui. Un grand rideau dans le fond unit les deux toiles, tout comme le coup de lumière qui tombe crûment sur l’épaule droite de Maerten et plus doucement sur le grand col de dentelles d’Oopjen. Dans ces années-là, tout le génie du maître d’Amsterdam réside dans le parti et les éblouissants effets qu’il tire de cette concentration de la gamme colorée autour du noir, du blanc et du gris. Le luxe des tenues noires, alors les plus coûteuses, lui offre l’occasion de faire montre de brio dans le rendu des matières : le vêtement empesé de Maerten, ses revers de satin contre la fluidité et la légèreté des soies, les satins et les tulles piqués de la robe d’Oopjen, dont la taille enflée laisse supposer la grossesse. Les nœuds à la ceinture créent comme une guirlande unissant les époux. La précision et le raffinement du détail se lisent dans les motifs qui décorent les chausses de l’époux, dans les extravagants nœuds de ses souliers ou l’éventail d’Oopjen".
"L’expression des modèles est très différente : le visage de Maerten est rond, son expression est plus générique que celle d’Oopjen, plus mélancolique et douce. La couleur des chairs est plus franche et rosée chez Maerten, elle est plus transparente et pâle chez Oopjen".
En 1877, la "collection de Willem van Loon, dont le portrait de Maerten Soolmans et celui d’Oopjen Coppit étaient les fleurons, est mise en vente. Le gouvernement néerlandais tente de participer à l’achat mais la somme atteint des sommets jamais égalés. Jugée exorbitante par une partie de la presse, la vente fait grand bruit à l’époque dans l’Europe entière. Un consortium de la famille Rothschild, mené par le baron Gustave, se porte acquéreur de 68 peintures flamandes et hollandaises de la collection Van Loon, dont les deux portraits aujourd’hui possédés en commun par le Louvre et le Rijksmuseum. Les tableaux quittent alors les Pays-Bas pour la France. Quasiment jamais vus, ils y devinrent aussi célèbres que mystérieux".
"Lorsque la famille Rothschild décide, au printemps 2014, de s’en séparer, ce qui s’était produit lors de la vente Van Loon en 1877 se reproduit, mais inversé. La France s’interroge sur la façon de conserver sur le sol national ces tableaux patrimoniaux, tandis que les Pays-Bas tentent de faire revenir les tableaux perdus en 1877. Après bien des réflexions et des échanges, la solution européenne d’une acquisition franco-néerlandaise apparaît comme la meilleure. Elle permet aux deux oeuvres d’être désormais admirées par les visiteurs du monde entier dans deux des plus grands musées européens".
Au Louvre, "l’entrée de ces tableaux bouleverse la collection de peintures hollandaises. En effet, bien qu’elle soit l’une des plus riches, sinon la plus riche, au monde après celle du Rijksmuseum, elle souffre d’un vide important que ces deux toiles monumentales viennent combler : Rembrandt est certes représenté par des chefs-d’oeuvre comme la Bethsabée, récemment restaurée, ou les autoportraits, mais ses grandes compositions sont rares. Au Louvre, les portraits de Maerten Soolmans et d’Oopjen Coppit s’intégreront dans la brillante collection de grands portraits du XVIIe siècle, qu’ils soient flamands, italiens ou français, tandis qu’au Rijksmuseum, ils viendront enrichir le parcours des œuvres du maître. Les deux musées s’engagent ainsi dans une collaboration scientifique au long cours".

Pour commémorer la Déclaration Balfour du 2 novembre 1917, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a assisté au dîner de gala à la Lancashire House dont les hôtes étaient Lord Jacob Rothschild et Roderick Balfour, descendant du signataire de cette Déclaration, et en présence de la Première ministre Theresa May.

En mars 2018, Trayon White, conseiller municipal afroaméricain démocrate à Washington D.C., a allégué dans une vidéo postée sur sa page Facebook que les Rothschild contrôlaient, manipulaient le climat dans la vague récente de froid (chute abondante de neige), et ce, "afin de créer des désastres naturels" dans le but de "posséder des villes" (“Man, it just started snowing out of nowhere this morning, man. Y’all better pay attention to this climate control, man, this climate manipulation... And D.C. keep talking about, ‘We a resilient city.’ And that’s a model based off the Rothschilds controlling the climate to create natural disasters they can pay for to own the cities, man. Be careful.”). Devant l'indignation suscitée par ses propos antisémites et conspirationnistes, il a présenté des excuses en publiant un communiqué sur son compte Twitter : "I really do apologize. I work very closely with the Jewish community and never want to offend anyone, especially with Anti-Semitic remarks".


Les 8, 15, 22, 23, 29 et 30 décembre 2019, à 14 h, Cultures-J proposera la visite guidée "Banquiers, collectionneurs et mécènes Juifs à Paris au XIXe siècle". "Marchez sur les pas des illustres familles juives parisiennes, de leurs origines au lendemain de la Seconde guerre mondiale. Depuis l'hôtel de Salomon de Rothschild jusqu'au Jeu de Paume, venez découvrir plus d'un siècle d'histoire de la ville de Paris à travers les familles Rothschild, Camondo, Cahen d'Anvers et Pereire... Economie, rivalités, alliances mais aussi architecture, collections d'art et spoliations, ces quatre grandes familles, sous la direction de Napoléon III et d'Haussmann, vont donner à la capitale française son visage actuel."

« Les Rothschild - Ascension et tribulations d’une famille »
Arte diffusera le 27 octobre 2022 à 11 h 00 « Les Rothschild - Ascension et tribulations d’une famille » (Die Rothschild-SagaAufstieg - Reichtum – Verfolgung), documentaire de Klaus T. Steindl. "Retour aux origines de la famille Rothschild, qui partit du ghetto de Francfort pour établir un empire financier aux quatre coins de l'Europe. »

« 1756. Dans le ghetto juif de Francfort, un orphelin de 12 ans fait ses bagages. Mayer Amschel Rothschild s'apprête à partir pour Hanovre se former à l'un des métiers que peuvent alors exercer les juifs : le commerce de monnaies. Il sera le premier de ces négociants à créer des catalogues, du marketing avant l'heure. À la suite de sa formidable réussite personnelle, tous ses enfants seront investis du capital familial et envoyés, sur ordre du patriarche, aux quatre coins de l'Europe, pour y consolider l’entreprise familiale ». 

« Une dynastie naît ainsi, présente par la suite au rendez-vous de tous les investissements et profits : chemins de fer, fonderies, mines… Et la banque, bien sûr, à l'origine de leur incroyable longévité financière. »

« Synonyme d'immense richesse, de prestige et d'opulence, tout autant que l'objet de critiques, de théories du complot et de préjugés antisémites, le nom de Rothschild traverse deux siècles et demi d'histoire et contribua, pour le meilleur comme pour le pire, à façonner l'Europe moderne. »

« Les documentaristes Klaus T. Steindl et Robert Neumüller, en s'attachant à quelques moments clés de la saga familiale, dressent un portrait historique nuancé, qui dépeint tout autant le génie financier des uns que l'extravagance des autres (Lionel Walter de Rothschild, passionné de zoologie, chevauchait des tortues et attelait des zèbres à sa carriole…). 

« Sans faire l'impasse sur la part d'ombre de la fortune : mariages consanguins pour garder coûte que coûte l'argent dans la famille et exploitation sans merci des ouvriers, dont le sang versé servit de tribut à la domination dynastique. »


Autriche, 2021, 52 mn
Production : Metafilm
Sur Arte les 27 octobre 2022 à 11 h 00, 05 novembre 2022 à 3 h 35, 16 novembre 2022 à 10 h 55
Sur arte.tv du 26/10/2022 au 25/11/2022
Visuels :  © Helmut Wimmer/Metafilm

Sous la direction de Claude Collard et Melanie Aspey, Les Rothschild en France au XIXe siècle. Éditions de la BnF, 2012. 196 pages, 130 illustrations. 36 €. ISBN : 978-2717725230

Jusqu’au 10 février 2013
5, rue Vivienne. 75002 Paris
Tél. : 01 53 79 49 49
Du mardi au samedi 10 h à 19 h. Dimanche de 12 h à 19 h

Visuels : 
Jeton permettant à Lionel de Rothschild de voyager gratuitement sur les chemins de fer du Nord, dont il était l’administrateur.
The Rothschild Archive, London 

Édouard Baldus, Chemin de fer du Nord, Ligne de Paris à Compiègne par Chantilly,Petites Vues photographiques, vers 1865
– Page de garde - Carte illustrée de Paris à Boulogne,
BnF, Estampes et photographie

Album photographique anonyme,
Locomotives, vers 1874 
Archives de la Compagnie des Chemins de fer du Nord
ANMT, Roubaix 

Bon de transport pour une caisse de lingots d’or
Fonds Rothschild, ANMT, Roubaix

Émile Zola, L’Argent, 1891
Séance à la Bourse
BnF, département Littérature et art 

Émile Zola, L’Argent, 1891
Séance à la Bourse
BnF, département Littérature et art 

Armoiries octroyées en 1822
exemplaire officiel illustré, reliure, 1843,
The Rothschild Archive London

 Baron James de Rothschild, vers 1820, huile sur toile
The Rothschild Archive London 

Chèque du 12 février1871 qui a permis le rachat rapide et complet de la dette de la France à la Prusse après la défaite de Napoléon III,
manuscrit,
Peter Schwabach and The Rothschild Archive London 

Catherine et Alexandre Serebriakoff : Vue de l’hôtel de la rue Laffitte à Paris
Copie. Aquarelle, vers 1867,
©ADAGP, 2012 Coll. Part. Rothschild Paris

Eugène Disdéri, James de Rothschild,
photographie Planche contact avec sept portraits,
BnF, Estampes et photographie

 Photographie d’Olympe Aguado, octobre 1856 : La cour à Compiègne, avec James de Rothschild (à gauche)
BnF, Estampes et photographie

 Château Lafite, étiquette d’une bouteille de vin, 1894
Collection Château Lafite

Anonyme,
La Banque du 19 rue Laffitte vers 1880
Coll. Part. Rothschild, Paris

Paul Castelnau,
hôtel particulier,  2 rue Saint Florentin, place de la Concorde
Tirage d’après autochrome
© Ministère de la culture, Médiathèque de l’architecture et du patrimoine, RMN

 Eugène Lami,
Hall du château de Ferrières,
vers 1860, aquarelle.
Collection particulière, France 

Eugène Lami, Sortie de l’Opéra,
huile sur toile,1835
BnF, Bibliothèque-musée de l’Opéra 

Billet de la Loterie israélite, fondée en 1843 pour récolter des fonds servant à financer d’autres œuvres philanthropiques,1
1846, Paris, Archives du CASIP-COJASOR

Hôpital Nathaniel de Rothschild fondé en 1871 à Berck-sur-Mer, Pas de Calais
The Rothschild Archive London

Invitation à la vente de charité au profit de l’hospice des vieux marins et vieilles matelotes envoyée par la baronne Laura-Thérèse de Rothschild, 1902
The Rothschild Archive, London
Honoré de Balzac,
La maison Nucingen, 1853
BnF, Bibliothèque de l’Arsenal

Léon Bonnat,
Le comte Abraham-Béhor de Camondo,
1882, huile sur toile
Les Arts décoratifs, musée Nissim de Camondo

Le recueil de Rothschild
© The Israel Museum, Jerusalem
La fortune de Job restituée à la fin de l’histoire. Fol. 65v. Le recueil de Rothschild. Italie du Nord, vers 1460-80. Manuscrit sur vélin ; encre marron, détrempe, feuilles d’or et d’argent ; caractères droits et semi-cursifs Ashkénazes. Hauteur : 21 cm ; Largeur : 15.9 cm. Offert par James A. de Rothschild, Londres. Numéro de référence : B61.09.0803o.s.; 180/051.

Rembrandt van Rijn (1606-1669)
Portrait de Maerten Soolmans
Acquis par l’État néerlandais pour le Rijksmuseum
© RMN-Grand Palais / Mathieu Rabeau - See more at: http://presse.louvre.fr/les-portraits-de-maerten-soolmans-et-doopjen-coppit-par-rembrandt/#sthash.RgTJQUHI.dpuf

Rembrandt van Rijn (1606-1669)
Portrait d’Oopjen Coppit
Acquis par la République Française pour le musée du Louvre
© RMN-Grand Palais / Mathieu Rabeau - See more at: http://presse.louvre.fr/les-portraits-de-maerten-soolmans-et-doopjen-coppit-par-rembrandt/#sthash.RgTJQUHI.dpuf

Articles sur ce blog concernant :
Cet article a été publié le 8 février 2013. Il a été republié le :
- 19 juin 2013, 24 août et 6 octobre 2014, 8 février et 15 octobre 2015, 13 mars 2016, 3 novembre 2017, 16 avril 2018, 20 décembre 2019.

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