Citations

« Le goût de la vérité n’empêche pas la prise de parti. » (Albert Camus)
« La lucidité est la blessure la plus rapprochée du Soleil. » (René Char).
« Il faut commencer par le commencement, et le commencement de tout est le courage. » (Vladimir Jankélévitch)
« Notre métier n’est pas de faire plaisir, non plus de faire du tort. Il est de porter la plume dans la plaie. » (Albert Londres)
« Le plus difficile n'est pas de dire ce que l'on voit, mais d'accepter de voir ce que l'on voit. » (Charles Péguy)

dimanche 27 juillet 2025

Robert Oppenheimer (1904-1967)

Robert Oppenheimer (1904-1967) était un brillant physicien polyglotte juif agnostique américain. Il est célèbre pour ses travaux en physique théorique et directeur scientifique du projet Manhattan (« père de la bombe atomique »). Hostile au développement d'armes thermonucléaires, il est au début des années 1950 la cible d’attaques politiques durant le maccarthysme. Il est réhabilité dans les années 1960. Il s'est rendu à plusieurs reprises en Israël. Arte diffusera le 29 juillet 2025 à 22 h 35 « Le cas Oppenheimer », documentaire de Bertina Henrichs.

« OGM - Mensonges et vérités » de Frédéric Castaignède 

Julius Robert Oppenheimer (1904-1967), dit Robert Oppenheimer, était né dans une famille bourgeoise aisée, intellectuelle et politiquement de gauche.

Polyglotte - il parle et comprend l'allemand, l'anglais et le français -, il a accès aux livres et articles de ses contemporains chimistes, mathématiciens et physiciens dans leur langue originelle. 

Il se fait remarquer par ses articles en mécanique quantique, physique des particules et physique nucléaire, et sa thèse sur la naissance des trous noirs dans l'Univers.

Dans les années 1930, ses travaux théoriques et son prestige font de l'université de Californie à Berkeley un centre majeur de recherche en physique.

Durant la Deuxième Guerre mondiale, malgré les réticences des services de sécurité de l'armée américaine suscitées par les relations d'Oppenheimer avec des représentants de la gauche, le général Leslie Richard Groves le nomme en février 1943 au poste éminent de directeur scientifique du projet Manhattan. Sous sa direction, le laboratoire national de Los Alamos conçoit et fabrique les trois premières bombes atomiques de l'Histoire. 

Si ce « père de la bombe atomique ») est favorable à l'usage tactique de ces bombes dans un but dissuasif, il s'est opposé temporairement au développement de bombes thermonucléaires, plus puissantes, car il jugeait leur pouvoir destructif exagéré au regard de leur utilisation défensive.

Après la victoire des Alliés, il est nommé Président du General Advisory Committee qui conseille la Commission de l'énergie atomique des États-Unis.

En 1954, durant le maccarthysme, l’habilitation de sécurité de Robert Oppenheimer est révoquée en raison de sa position sur les armes thermonucléaires et de soupçons de sympathie pour l’Union soviétique.

En mai 1958, J. Robert Oppenheimer s’est rendu en Israël pour l’inauguration du nouvel Institut de science nucléaire à l'Institut Weizmann des sciences de Rehovot. Il "a non seulement rencontré Ben Gourion, en public et en privé, mais il a également été reçu par le Président israélien, Yitzhak Ben-Zvi, et a rencontré le ministre des Affaires étrangères, Moshe Sharett". 

Le 2 décembre 1958, à l'hôtel Waldorf-Astoria de New York, il a participé à la collecte de fonds annuelle pour l'Institut Weizmann. Il a alors déclaré :
« J’ai personnellement appris non seulement des choses sur le pays que je visitais, mais aussi des choses pertinentes pour les sociétés occidentales plus anciennes, plus riches et plus vastes ; car l'Institut de Rehovot ce jour-là aurait été compréhensible et sympathique pour les hommes des Lumières, ou pour les pères fondateurs des États-Unis – Franklin peut-être plus que tout, ou Jefferson. Dans cette société, contrainte par le danger, les difficultés, l'hostilité de ses voisins, à un effort commun intense et continu, on trouve une santé d'esprit, une santé humaine, devenue rare aujourd'hui dans les grands pays d'Europe et d'Amérique, qui servira non seulement à attirer des hommes dévoués et dévoués à Israël, mais aussi à nous inciter à raviver et à renouveler les sources ancestrales de notre force et de notre santé ».
En 1963, Robert Oppenheimer est réhabilité politiquement, et l’administration démocrate remet le Prix Enrico-Fermi, qui récompense des scientifiques d’envergure internationale pour leurs travaux dans le développement, le recours ou la production d'énergie.

Sous sa direction, l’Institute for Advanced Study devient un centre de recherche fondamentale incontournable. 

En 1965, Robert Oppenheimer "a été reçu par Levi Eshkol, successeur de Ben Gourion au poste de Premier ministre. Lors de cette visite, Oppenheimer a été transporté à Eilat par avion militaire, accompagné d'Ernst David Bergmann, directeur de la Commission israélienne de l'énergie atomique, et de Shimon Peres, alors directeur général du ministère de la Défense. (« Hier, j'ai survolé la mer Morte », a-t-il confié à Geulah Cohen. « J'ai vu Sodome et je me suis dit combien il était facile de vivre alors, dans un monde où tout le mal se concentrait en un seul endroit. »)

Robert Oppenheimer a été distingué par la Médaille présidentielle du mérite (1946), reçue le titre de Chevalier de la Légion d'honneur (1958) et été Membre étranger de la Royal Society (1962).

En 1942, convaincus que l’Allemagne nazie est en train de développer une arme nucléaire, les États-Unis initient, dans le plus grand secret, le "Projet Manhattan" destiné à mettre au point la première bombe atomique de l’histoire. Pour piloter ce dispositif, le gouvernement engage J. Robert Oppenheimer, brillant physicien, qui sera bientôt surnommé "le père de la bombe atomique". C’est dans le laboratoire ultra-secret de Los Alamos, au cœur du désert du Nouveau-Mexique, que le scientifique et son équipe mettent au point une arme révolutionnaire dont les conséquences, vertigineuses, continuent de peser sur le monde actuel…

"Oppenheimer" 
"Oppenheimer" est un film anglo-américain écrit, produit et réalisé par Christopher Nolan (2023, 180 minutes), interprété par Cillian Murphy, Emily Blunt, Matt Damon, Robert Downey Jr. et Florence Pugh.

"En 1942, convaincus que l’Allemagne nazie est en train de développer une arme nucléaire, les États-Unis initient, dans le plus grand secret, le "Projet Manhattan" destiné à mettre au point la première bombe atomique de l’histoire. Pour piloter ce dispositif, le gouvernement engage J. Robert Oppenheimer, brillant physicien, qui sera bientôt surnommé "le père de la bombe atomique". C’est dans le laboratoire ultra-secret de Los Alamos, au cœur du désert du Nouveau-Mexique, que le scientifique et son équipe mettent au point une arme révolutionnaire dont les conséquences, vertigineuses, continuent de peser sur le monde actuel…

Ce film est adapté du livre lauréat du prix Pulitzer, American Prometheus : The Triumph and Tragedy of J. Robert Oppenheimer (Robert Oppenheimer : Triomphe et tragédie d'un génie, 2005) de Kai Bird et Martin J. Sherwin. 

Tourné en IMAX, il a été récompensé par sept Oscars : ceux du Meilleur acteur pour Cillian Murphy qui interprète Robert Oppenheimer, du Meilleur acteur dans un second rôle pour Robert Downey Jr. qui incarne Lewis Strauss, président de la Commission de l'énergie atomique, du Meilleur réalisateur pour Christopher Nolan,  du meilleur film, de la Meilleure photographie pour Hoyte van Hoytema, du Meilleur montage pour  Jennifer Lame et de la Meilleure musique de film pour Ludwig Göransson.

« Le cas Oppenheimer »
Arte diffusera le 29 juillet 2025 à 22 h 35 « Le cas Oppenheimer », documentaire de Bertina Henrichs.

« Tandis que le FBI surveillait Robert Oppenheimer, figure centrale du projet Manhattan, qui visait à mettre au point la bombe atomique américaine, ses confrères livraient tranquillement des informations à l’URSS. Focus sur une affaire d’espionnage qui a contribué à déclencher la guerre froide. »

« De 1942 à 1946, le projet "Manhattan" est mené dans le plus grand secret afin de mettre au point la première bombe atomique de l’histoire. Tout au long du processus, les Américains tentent de contrer toute fuite d’information. »

« Robert Oppenheimer, célèbre directeur scientifique du laboratoire de Los Alamos (Nouveau-Mexique), est étroitement surveillé par le FBI depuis les années 1930, en raison de ses affinités communistes. »

« En revanche, rien ne freine son proche collaborateur Klaus Fuchs, physicien allemand naturalisé britannique, qui parvient à transmettre des données sensibles à l’URSS. C’est également le cas de deux Américains : Theodore Alvin Hall, physicien travaillant sur la bombe à implosion, et Oscar Seborer, technicien et ingénieur, identifié comme espion il y a seulement une dizaine d’années. »

« En 2023, le film Oppenheimer réalisé par Christopher Nolan contribuait à faire largement connaître les coulisses de la naissance de la bombe atomique, en explorant les dilemmes moraux vécus par le scientifique et les imbrications entre avancées techniques et responsabilités éthiques. »

« Nourri de nombreux témoignages et d’images d’archives, ce documentaire met quant à lui en lumière l’injustice vécue par Oppenheimer qui, sans jamais avoir trahi son camp, se vit interdire l’accès aux secrets atomiques en prévision d’une audition, en 1954, en plein maccarthysme, alors que plusieurs espions avérés ne furent jamais inquiétés ou ne furent démasqués que sur le tard. »

« Quatre-vingts ans après les bombardements d’Hiroshima et de Nagasaki, ce film dévoile les dessous d’une célèbre affaire d’espionnage, révélant comment le climat de méfiance et la surveillance exercée par les deux camps ont influencé le développement de la bombe atomique et contribué à instaurer l’équilibre de la terreur. »

« Retour sur un affrontement clé qui a précipité le début de la guerre froide. »


« Le cas Oppenheimer » de Bertina Henrich
s
Allemagne, France, 2025, 1 h 30 mn
Coproduction : ZDF/ARTE, Berlin Producers, Les Autres Films, AcquaAlta
Sur Arte les 29 juillet 2025 à 22 h 35, 18 août 2025 à 9 h 25
Sur arte.tv du 29/07/2025 au 26/10/2025
Visuels :
© Axel Schneppat
© DR


Artemisia Gentileschi (1593-1654)

Artemisia Gentileschi (1593-1654) était une peintre de cour talentueuse et à succès de l'école caravagesque pour souverains - 
roi d'Angleterre Charles Ier - et cardinaux.  Pionnière du baroque, elle a abordé des sujets historiques et religieux, notamment en peignant des thèmes bibliques (Judith décapitant Holopherne)Elle a bénéficié de mécénat d'art des Médicis. En 1611, elle avait été violée par le peintre Agostino Tassi. Son père avait porté plainte. Le procès qui s'en est suivi avait marqué la jeune femme. Le Musée Jacquemart-André propose l'exposition "Artemisia. Héroïne de l’art".

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"Artemisia. Héroïne de l’art"
Le Musée Jacquemart-André propose l'exposition "
Artemisia. Héroïne de l’art".

 « Le Musée Jacquemart-André met à l’honneur du 19 mars au 3 août 2025 l’artiste romaine Artemisia Gentileschi (1593 - vers 1656). Personnalité au destin hors norme, cette protagoniste de la peinture caravagesque est l’une des rares artistes femmes de l’époque moderne ayant connu de son vivant une gloire internationale et qui put vivre de sa peinture. À travers une quarantaine de tableaux, réunissant aussi bien des chefs-d’oeuvre reconnus de l’artiste, des toiles d’attribution récente, ou des peintures rarement montrées en dehors de leur lieu de conservation habituel, cette exposition met en valeur le rôle d’Artemisia Gentileschi dans l’histoire de l’art du XVIIe siècle. »

« L’exposition tend notamment à démontrer la profonde originalité de son oeuvre, de son parcours et de son identité, qui demeurent encore aujourd’hui une source d’inspiration et de fascination. L’histoire d’Artemisia traverse les siècles, et la lecture que l’on peut faire de son oeuvre – reflet de son vécu et de sa résilience – s’avère intemporelle et universelle. »

« Née à Rome en 1593, la jeune Artemisia se forme auprès de son père, Orazio Gentileschi (1563- 1639), artiste d’origine toscane influencé par Caravage, et témoigne très vite d’un talent singulier pour la peinture. Adulte, elle mène une brillante carrière, gagnant une renommée internationale et des commandes dans toute l’Europe, jusqu’à la cour de Charles Ier d’Angleterre où elle rejoint son père en 1638. Malgré le succès flamboyant qu’elle avait connu de son vivant, Artemisia tombe dans l’oubli vers la fin du XVIIIe siècle. Il faudra attendre le XXe siècle pour que son oeuvre soit de nouveau appréciée à sa juste valeur. »

« Sa formation initiale avec son père Orazio, fondamentale pour comprendre son art, ainsi que l’impact fort de Caravage, seront mis en exergue dans l’exposition, notamment grâce à des prêts exceptionnels, tels que l’imposante Suzanne et les vieillards (Pommersfelden, Schloss Weissenstein), sa première œuvre signée et datée, et le Couronnement d’épines de Caravage (collection de la Banca Popolare di VicenzaS.p.A. in L.C.A.). Dès ses débuts, Artemisia fait preuve d’une capacité unique à saisir la psychologie de ses personnages, dans des compositions à la puissance explosive, qui contrastent avec l’élégance lyrique d’Orazio. »

« L’analyse de l’oeuvre d’Artemisia Gentileschi est difficilement séparable de celle de son destin, même s’il serait réducteur de comprendre son art uniquement à la lueur de sa vie. En 1611, son existence bascule : le peintre Agostino Tassi, employé par son père Orazio afin de lui enseigner la perspective, la viole. Refusant d’épouser la jeune fille en guise de réparation, Agostino Tassi se voit intenter un procès par Orazio Gentileschi, au cours duquel Artemisia est torturée afin de prouver la véracité de ses accusations. Les Gentileschi gagnent le procès mais Tassi, malgré sa condamnation à cinq ans d’exil, fut protégé par le pape Paul V Borghèse et put rapidement revenir à Rome. La manière dont Artemisia surmonta cette épreuve révèle sa résilience, son courage et sa détermination. »

Artemisia « joue avec sa propre image et ses autoportraits, comme la célèbre Joueuse de luth du Wadsworth Atheneum Museum of Art (Hartford), qui lui font notamment gagner la confiance du grand-duc Cosme II de Médicis, qui lui commande bientôt des oeuvres monumentales, aujourd’hui perdues. Son talent de portraitiste, loué par ses contemporains, constitue un point central de l’exposition qui présente une série de portraits, dont certains ont été récemment découverts. »

Artemisia Gentileschi « puise par ailleurs son inspiration dans les thèmes bibliques et littéraires pour mettre en avant des sujets féminins et héroïques, qu’elle représente avec une rare empathie. Parfois, elle les dote d’un pouvoir de séduction unique dont elle a bien conscience ; les nus féminins peints par une femme étaient à l’époque rares et très recherchés par les amateurs d’art. Une partie importante de l’exposition sera ainsi consacrée au duel symbolique d’Éros et Thanatos, crucial dans l’art et la culture du baroque et véritablement central dans l’oeuvre d’Artemisia Gentileschi. »

« Plusieurs représentations de Judith et Holopherne, sont illustrées dans l’exposition, comme la Judith et sa servante de la Galerie des Offices (Florence), qui appartint aux Médicis. La scène monumentale d’Esther et Assuérus du Metropolitan Museum de New York est un autre exemple significatif de l’importance de cette thématique de l’héroïsme au féminin dans l’oeuvre d’Artemisia Gentileschi. »

« Aujourd’hui, notamment depuis les années 1970 et l’émergence d’une histoire de l’art féministe, la figure d’Artemisia Gentileschi continue de fasciner. À son époque, il était difficile pour les femmes aspirant à devenir peintres de surmonter les limites imposées à leur sexe. Dans des circonstances très contraignantes, Artemisia, presque illettrée dans sa jeunesse, réinventant son style et se réinventant elle-même à plusieurs reprises, finit par être considérée comme une savante, détentrice d’une « belle main qui manie si bien le pinceau et la plume qu’elle confère l’immortalité » (Pietro della Valle). Elle entretient au cours de sa vie une correspondance nourrie avec des personnalités importantes, des souverains, notamment François Ier d’Este, duc de Modène, ou encore des hommes de science, comme Galilée et Cassiano dal Pozzo. »

« Célébrée dans une gravure de Jérôme David comme un « miracle dans la peinture », Artemisia Gentileschi sut tirer parti de son talent et de son intelligence pour gagner une indépendance exceptionnelle, et pour laisser à la postérité un formidable héritage, par l’exemple même de sa vie et de son oeuvre. Sa personnalité audacieuse et entreprenante ne correspondait en outre certainement pas aux attentes de la société de son époque, et si sa condition féminine n’est pas déterminante dans l’appréciation de son oeuvre, Artemisia Gentileschi n’en était pas moins en contact avec des personnalités et des milieux qui débattaient la place des femmes dans la société. Farouchement indépendante, volontaire et habile dans ses affaires, elle a tracé son propre chemin, nous laissant une peinture brillante, séduisante et dont la puissance gagne à être redécouverte. »

« À l’issue du procès, Artemisia épouse un Florentin et part s’installer à Florence. Elle atteint la pleine émancipation et la célébrité à cette époque, au cours de laquelle elle développe aussi bien ses compétences techniques que son érudition. Grâce aux relations qu’elle établit à Florence, elle développe plus tard un réseau international de commanditaires. Durant ces années, elle peint notamment avec d’autres artistes le plafond de la Casa Buonarroti, maison dédiée à la mémoire de Michel-Ange par son descendant, dont deux panneaux sont exceptionnellement présentés dans notre exposition. »

Le commissariat est assuré par Patrizia Cavazzini, et Pierre Curie.

Patrizia Cavazzini est chercheuse associée à la British School de Rome, conseillère de l’American Academy et membre du comité scientifique de la Galerie Borghèse. Elle est l’auteur de nombreux ouvrages sur le collectionnisme et le marché de l’art à Rome, ainsi que sur les biographies de peintres du XVIIe siècle, y compris Artemisia Gentileschi. Elle a été commissaire de l’exposition « Meraviglia senza tempo » à la Galerie Borghèse (2022-2023).

Maria Cristina Terzaghi est professeur titulaire en histoire de l’art moderne à l’université de Roma Tre et membre du comité scientifique du Museo di Capodimonte à Naples. Spécialiste de la peinture et de la sculpture du XVIIe siècle, ses recherches abordent la peinture des artistes caravagesques, ainsi que la peinture et la sculpture du Baroque romain. Elle a été consultante scientifique pour l’exposition « Caravage à Rome : amis et ennemis » (Musée Jacquemart-André, 2018-2019) et commissaire de l’exposition « Caravaggio e Artemisia » (Palais Barberini, Rome, 2021-2022). En 2017, elle a bénéficié d’une bourse du Paul Mellon Center à Londres pour finaliser son ouvrage Orazio and Artemisia Gentileschi : Between Paris and London.

Pierre Curie est Conservateur général du patrimoine. Spécialiste de peinture italienne et espagnole du XVIIe siècle, il a également travaillé sur celle du XIXe siècle français au Musée du Petit Palais où il a commencé sa carrière de conservateur. Par la suite chargé du domaine de la peinture à l’Inventaire général, il a corédigé et conduit le Vocabulaire typologique et technique de la peinture et du dessin (paru en 2009). Nommé responsable de la filière peinture du département restauration du Centre de recherche et de restauration des Musées de France en 2007, il a coordonné et suivi quelques grandes restaurations de tableaux des musées nationaux (Léonard de Vinci, Titien, Rembrandt, Poussin…). Pierre Curie est conservateur du musée Jacquemart-André depuis janvier 2016 et co-commissaire de toutes ses expositions.

La scénographie est signée par Hubert le Gall, sculpteur, designer et scénographe français.

LE MUSÉE JACQUEMART-ANDRÉ ET LES ARTISTES FEMMES
« Artemisia Gentileschi n’est pas la première femme artiste à orner de ses oeuvres les murs du musée Jacquemart-André. Ce dernier doit en effet son origine même à une femme peintre et collectionneuse, Nélie Jacquemart (1841-1912), qui légua l’hôtel particulier du boulevard Haussmann ainsi que le domaine de Chaalis à l’Institut de France. »

« Spécialisée dans le portrait, Nélie Jacquemart pose ses pinceaux une fois devenue l’épouse d’Édouard André et constitue avec celui-ci une collection exceptionnelle, aujourd’hui encore visible selon sa présentation originelle. »

« En 1872, Édouard André avait acquis un merveilleux portrait dû à une artiste fameuse, celui d’Ekaterina Vassilievna, comtesse Skavronskaia, peint par Elisabeth Vigée-Lebrun en 1790 et qui est toujours visible au musée Jacquemart-André. »


PARCOURS DE L’EXPOSITION

« Le succès européen »
« L’exposition s’ouvre sur le succès d’Artemisia et de son père Orazio auprès de plusieurs cours européennes, pour lesquelles tous deux ont réalisé des œuvres de grandes dimensions. Ces peintures tardives témoignent de l’importance des commandes reçues par l’un et l’autre. Celles d’Orazio furent peintes pour les rois de France et d’Angleterre, qui l’appelèrent à séjourner à leurs cours. En 1638, sa fille le rejoignit à Londres où il mourut un an plus tard. Au cours de sa longue carrière, Artemisia avait déjà travaillé pour d’autres souverains européens, la famille Médicis à Florence, mais aussi le vice-roi d’Espagne à Naples et, par l’intermédiaire de ce dernier, pour la cour espagnole. »

« Il importe de préciser que si elle n’a pas fait de voyage en France, Artemisia a entretenu au cours de sa carrière des contacts avec plusieurs artistes français vivant en Italie, notamment le peintre Simon Vouet, qui a réalisé d’elle un remarquable portrait, vers 1622-1626, l’associant à son homonyme antique, la puissante reine Artémise d’Halicarnasse (Pise, Palazzo Blu). »

« Les thèmes abordés par Artemisia — Esther et Assuérus (v. 1628), Ulysse reconnaissant Achille parmi les filles de Lycomède (v. 1640) — ainsi que les dimensions monumentales de ces tableaux, suggèrent qu’ils étaient également destinés à des environnements palatiaux. Peint peut-être peu après son séjour à Londres, Ulysse illustre un hommage stylistique de la fille pour son père, rappelant leur collaboration à Rome dans les premières années de la carrière d’Artemisia. »

« Père et fille : de la filiation à l’émancipation »
« La salle 2 explore la relation entre Orazio et Artemisia durant les années de formation de la jeune artiste dans l’atelier familial. Une oeuvre emblématique de cette période est la spectaculaire Suzanne et les vieillards de Pommersfelden (1610), signée par Artemisia et réalisée sous la supervision de son père, rappelant la composition du David et Goliath (v. 1605-1607) de ce dernier, conservé à Dublin et présenté dans cette salle. L’influence d’Orazio est souvent perceptible dans les premières oeuvres d’Artemisia, comme en témoigne la Judith et sa servante (v. 1615) de Florence, exposée ici à côté du modèle paternel. L’inédite Vierge de l’Annonciation, récemment réapparue comme une oeuvre attribuée au père, est ici restituée à la jeune Artemisia. »

« Dès ses débuts, Artemisia fait preuve d’une grande capacité à saisir la psychologie de ses personnages, dans des compositions puissamment dynamiques qui contrastent avec l’élégance sensible d’Orazio. Ce contraste est particulièrement visible dans la superbe Vierge à l’Enfant de la Galleria Spada, une œuvre démontrant qu’Artemisia s’éloigne progressivement du modèle paternel pour affirmer un style personnel et indépendant. »

« À un moment précis de sa vie, il devient impossible de dissocier les oeuvres d’Artemisia des événements qui marquent son existence : en 1611, le peintre Agostino Tassi, ami de son père et familier de la maison Gentileschi, la viole. Révoltée, Artemisia tente de le blesser avec un couteau, mais la promesse de mariage de Tassi la contraint à accepter une relation qui dure presque un an. Cependant, Tassi ne tient pas sa promesse — promesse qui, à l’époque, l’aurait légalement disculpé. »

« En conséquence de quoi, Orazio Gentileschi lui intente un procès. Pendant cette procédure, Artemisia est torturée pour prouver la véracité de ses accusations. »

« Avec beaucoup de difficulté, les Gentileschi parviennent à démontrer l’honorabilité de la jeune fille de dix-sept ans et la culpabilité de Tassi. Ce dernier est condamné à cinq ans d’exil, mais, protégé par le pape, il ne purge qu’une partie minime de sa peine. Au lendemain de la conclusion du procès, Artemisia épouse Pierantonio Stiattesi, une connaissance de son père, et s’installe avec lui à Florence. »

« Ce mariage marque une rupture brusque d’Artemisia avec le milieu artistique romain. »

« Artemisia, artiste caravagesque »
« Outre sa relation avec son père, l’influence de Caravage fut déterminante dans la formation artistique d’Artemisia Gentileschi. Son David et Goliath (v. 1610-1620), ici exposé pour la première fois en France, et sa Danaé (v. 1612), prêt exceptionnel du musée de Saint-Louis, révèlent son admiration pour le style de Caravage qui fut un proche de son père ; Artemisia aurait donc vraisemblablement pu le rencontrer pendant son enfance. Jusqu’à la fin de sa carrière, elle conservera un traitement du clair-obscur et un sens du pathos hérités du maître lombard. Elle emprunte également à ce dernier sa technique, peignant directement d’après un modèle vivant posant pour elle, sans dessin préparatoire. Le Couronnement d’épines de Caravage, mis en regard avec un chef-d'œuvre d’Orazio sur le même sujet, est présenté dans cette salle afin d’éclaircir les résonnances entre l’art de Caravage et les œuvres des Gentileschi, père et fille. »

« Orazio comme Artemisia ont adopté les innovations que Caravage a lancées à Rome au début du siècle. »

« Mais, tandis que son père, fidèle à la tradition de la Renaissance, choisit avec plus de sélectivité ceux des choix esthétiques du grand maître lombard qui l’intéressaient, Artemisia devient véritablement disciple de Caravage, prenant sur lui l’exemple d’un naturalisme cru, d’une peinture violente et visuellement frappante. »

« La reconnaissance »
« Les années florentines sont cruciales dans la carrière d’Artemisia. Au contact des peintres toscans, elle affine sa technique, acquérant notamment une maîtrise sophistiquée de l’anatomie, comme en témoigne la superbe Allégorie de l’Inclination (1615-1616), provenant d’un plafond de la Casa Buonarroti, commandée par Michelangelo Buonarroti le Jeune, poète et dramaturge, arrière-petit-neveu de Michel-Ange. Cette oeuvre récemment restaurée est prêtée pour la première fois hors d’Italie, accompagnée d’un autre tableau du même ensemble, réalisé par l’artiste toscan Francesco Bianchi Buonavita. Le réalisme saisissant de la toile d’Artemisia, pour laquelle elle reçut un cachet trois fois plus élevé que celui de son collègue, contraste nettement avec le style plus académique du reste de la décoration de la maison. »

« Elle fréquente des lettrés, des scientifiques et des musiciens qui gravitent autour de la cour des Médicis, des relations qui la transforment et lui permettent, par la suite, d’entrer en contact avec des poètes et des académies littéraires dans les autres villes où elle vivra. »

« Une portraitiste de talent »
« Les portraits représentent assurément un sommet de la production d’Artemisia, souvent mis en avant par ses contemporains, comme le documentent des éloges poétiques et littéraires anciens. Cette exposition illustre largement cet aspect méconnu de sa carrière. Aux côtés d’exemples célèbres, tels que la Dame tenant un éventail (peut-être un autoportrait, v. 1620-1625), et le Portrait d’un chevalier de l’ordre des Saints-Maurice-et-Lazare, dit aussi Portrait d’un gonfalonier (1622) provenant du Palazzo d’Accursio à Bologne, figurent deux œuvres inédites, une Tête d’héroïne (v. 1620-1630), stylistiquement proche de la Dame tenant un éventail, et un Chevalier de l’ordre Saint-Étienne (v. 1619-1620). Celui-ci est signé « Lomi », nom de famille que l’artiste utilise en Toscane. Les caractères en or fin de cette signature sont identiques à ceux présents sur un de ses chefs-d'œuvre, la Madeleine de la Galerie Palatine, confirmant ainsi l’attribution à Artemisia. »

« L’artiste recourt aussi au genre de l’autoportrait, variant sa propre image, comme le démontre la Joueuse de luth du Wadsworth Atheneum. Ces autoportraits séduisent le grand-duc, qui lui confie plusieurs commandes importantes, aujourd’hui perdues. »

« Artemisia et son temps »
« L’exposition présente plusieurs oeuvres d’autres artistes, illustrant la manière dont Artemisia Gentileschi était perçue par ses contemporains. À Rome, dans les années 1620, l’artiste fréquente des peintres caravagesques, dont plusieurs étrangers, tels que les Français Simon Vouet et Nicolas Régnier, ainsi que des artistes nordiques comme Gerrit van Honthorst et Leonaert Bramer. Ce dernier réalise en 1620 un ensemble de portraits dessinés de ses amis artistes, parmi lesquels figure Artemisia déguisée en homme et moustachue : une allusion évidente au statut hors norme de la jeune femme, qui sera bientôt recensée comme responsable de son propre foyer, après que son mari, Stiattesi, disparait de sa vie peu après leur réinstallation à Rome. »

« Dans ces années-là, Artemisia jouit d’une solide réputation, qui lui permet de travailler pour de nombreux commanditaires. La demande pour ses créations originales s’accompagne de celle pour des copies et variantes de ses compositions les plus connues. L’exposition inclut ainsi une copie ancienne (XVIIe siècle) de son oeuvre la plus célèbre, Judith décapitant Holopherne, prêtée par la Pinacoteca Nazionale de Bologne. L’original, conservé au Museo di Capodimonte, reprend un thème développé par Caravage, mais le traitement naturaliste d’Artemisia semble surpasser celui du maître, par la violence sanglante de l’acte représenté et l’intensité des couleurs. Datant de l’époque de son procès contre Agostino Tassi, ce tableau a fait couler beaucoup d’encre, notamment en raison de pistes d’interprétation protoféministe. »

« Il marqua également ses contemporains : l’artiste en réalisa notamment une réplique pour Cosme II de Médicis dans les années 1610. La composition fut ensuite reproduite à plusieurs reprises par des artistes de l’époque, ce dont témoigne la version de Bologne, preuve supplémentaire du succès précoce de la pittora. »

« Héros et héroïnes »
« La salle 7 est consacrée aux genres et aux thèmes dans lesquels Artemisia a excellé, rassemblant des exemples de héros et d’héroïnes issus de l’histoire sainte et de la mythologie. »

« Ces figures isolées sur un fond sombre se concentrent sur la psychologie des personnages, suivant de nouveau l’exemple de Caravage. Forte de son succès, Artemisia dirige un véritable atelier durant sa période napolitaine, ce qui lui permet de reproduire ses compositions et décliner ses modèles afin de répondre à la demande. »

« Parmi les œuvres présentées, un Saint Jean-Baptiste (v. 1630-1640) issu d’une collection particulière, jamais exposé auparavant, semble adapté de l’ébauche d’une allégorie de la Poésie, elle-même très proche de la Minerve (v. 1635-1639) de la Galerie des Offices. L’exposition bénéficie également du prêt exceptionnel de la Madeleine pénitente (v. 1625) de la cathédrale de Séville, mise en valeur par une récente restauration, présentée aux côtés d’une magnifique Madeleine (v. 1625-1630) issue d’une collection privée, jamais exposée en Europe auparavant. »
« Artemisia n’hésite pas à doter ses figures féminines d’un pouvoir de séduction érotique, qu’elle maîtrise consciemment. Les nus féminins peints par une femme étaient rares et recherchés des amateurs de l’époque. Nous en présentons un exemple captivant avec la
Vénus endormie (v. 1626) du Virginia Museum of Art. Ainsi, sa condition de femme peintre doit être prise en compte pour apprécier pleinement le travail d’Artemisia : elle en était consciente, car elle était en contact, à Florence comme à Venise, avec des cercles culturels où la valeur des femmes était débattue et défendue, ce qu’elle exprimait régulièrement dans ses lettres. Elle refusa toutefois l’image de l’artiste vertueuse souvent adoptée par ses contemporaines, telle Lavinia Fontana, et elle ne se conforma pas aux diktats de son époque. »

« Éros et Thanatos »
« L’exposition se conclut sur une thématique centrale dans l’art et la culture de l’époque baroque, et particulièrement significative dans l’imaginaire figuratif d’Artemisia : l’intrication d’Éros et Thanatos, de l’Amour et de la Mort. Artemisia met en scène ses héroïnes en assumant leur potentiel sensuel, jusqu’à une forme d’érotisme morbide. »

« Artemisia puise son inspiration dans des thèmes bibliques et littéraires pour mettre en avant des figures féminines héroïques, qu’elle dépeint avec une rare empathie. En témoignent deux exemples remarquables, une Cléopâtre (v. 1630-1635) issue d’une collection privée anglaise, connue des spécialistes mais jamais exposée jusqu’à présent, ainsi que la monumentale Judith et sa servante (v. 1640-1642) provenant du musée des explorations du monde de la ville de Cannes, signée de sa main et récemment restaurée. L’expression d’une certaine supériorité féminine culmine dans des oeuvres où des femmes triomphent des hommes grâce à la ruse ou à la violence, comme dans le tableau Yaël et Siséra (1620) du musée de Budapest. »

L’EXPOSITION EN 5 OEUVRES PHARES

Artemisia Gentileschi
Suzanne et les vieillards, 1610, huile sur toile, 170 x 121 cm,
Pommersfelden, Kunstsammulungen Graf von Schonborn
credit : akg-images / MPortfolio / Electa

« Première oeuvre signée et datée d’Artemisia Gentileschi, cette toile démontre par la qualité de son exécution le talent précoce de l’artiste, qui n’était âgée que de dix-sept ans lorsqu’elle y apposa sa signature. Formée dans l’atelier paternel, Artemisia reçoit probablement l’aide de celui-ci dans la mise en place des personnages, mais le naturalisme du corps féminin au centre de la composition témoigne de sa volonté de se démarquer du style de son père. Point de référence incontournable pour la production de jeunesse d’Artemisia, le tableau a suscité beaucoup de réflexions sur ses résonnances avec l’histoire personnelle de la jeune artiste. »

Artemisia Gentileschi
Judith et sa servante
, vers 1615, huile sur toile, 114 x 93,5 cm,
Florence, Gallerie degli Uffizi, Galleria Palatina
credit : Su concessionne del Ministera della Cultura
 « Cette oeuvre a probablement été exécutée pour un membre de la famille Médicis à Florence, où l’artiste s’installe après le procès de 1612. Artemisia Gentileschi choisit de représenter la scène qui suit le meurtre d’Holopherne, dans une composition intimiste, s’attardant plus sur la psychologie des personnages que sur le caractère sanglant du sujet. Outre un hommage à l’art de Caravage, le raffinement des vêtements et les modulations chromatiques témoignent de l’influence du milieu artistique florentin sur l’artiste, tandis que la position des deux femmes est directement empruntée à une composition de son père, également présentée dans l’exposition (Museo de Bellas Artes de Bilbao). Privilégiant un cadrage resserré, Artemisia Gentileschi fait entrer le spectateur dans la tente d’Holopherne, le rendant presque complice de l’acte commis par Judith et sa servante Abra. »

Artemisia Gentileschi
Autoportrait en joueuse de luth
, 1614-1615, huile sur toile, 77,5 x 71,8 cm,
Hartford, CT., Wadsworth Atheneum Museum of Art, Charles H. Schwartz Endowment Fund
credit : Allen Phillips/Wadsworth Atheneum
« Artemisia Gentileschi se représente ici en joueuse de luth, portant une luxueuse robe bleue, son décolleté dévoilant sa poitrine. Le turban qu’elle porte sur la tête a pu être interprété comme un déguisement de tzigane, en lien avec une représentation donnée à la cour des Médicis en 1615, à laquelle une certaine « Signora Artemisia » aurait participé, mais cette hypothèse ne peut aujourd’hui être confirmée. Artemisia Gentileschi a immortalisé ses traits à l’aide d’un miroir, sur une toile où se trouvait préalablement une autre composition. Une sensualité certaine se dégage de ce tableau, probablement commandé ou offert au grand-duc Cosme II. Par l’entremise des Médicis, Artemisia Gentileschi fréquente l’intelligentsia toscane, se liant notamment d’amitié avec Galilée ou Cristofano Allori. »

Artemisia Gentileschi
Yaël et Siséra
, 1620, huile sur toile, 93 × 128 cm,
Budapest, Szepműveszeti Muzeum / Museum of Fine Arts
Photograph Szepműveszeti Muzeum/ Museum of Fine Arts, Budapest, 2025
« Artemisia Gentileschi commence à peindre cette oeuvre à Florence et l’achève probablement à Rome, vers 1620, alors qu’elle vient de regagner la Ville éternelle. Elle signe cette toile du nom de sa famille paternelle, « Lomi ». Lors de son séjour à Florence, elle adopte ce nom afin de s’émanciper de l’influence paternelle et de prendre ses distances avec les retombées de son procès. »
« Le personnage de Yaël est d’ailleurs habillé à la mode florentine de l’époque, avec une robe de damas doré, un corsage et arborant une coiffure sophistiquée. L’histoire de cette héroïne est tirée du Livre des Juges de l’Ancien Testament. Artemisia illustre le moment où Yaël, agenouillée à côté du corps inerte de Siséra, le chef de l’armée cananéenne endormi dans sa tente, s’apprête à le tuer de sang-froid à l’aide d’un marteau et d’un piquet. La violence de la scène contraste avec l’apparence sereine des personnages. »

Artemisia Gentileschi
Esther et Assuérus
, vers 1628, huile sur toile, 208,3 x 273,7 cm,
New York, The Metropolitan Museum of Art, Gift of Elinor Dorrance Ingersoll, 1969
credit : courtesy of the Metropolitan Museum of Art
« Seule oeuvre supposée peinte lors du séjour vénitien d’Artemisia Gentileschi qui nous soit parvenue, cette huile sur toile de grandes dimensions aborde de façon théâtrale le récit biblique d’Esther. Envoyée devant le roi Assuérus afin de négocier la libération de son peuple, l’héroïne s’évanouit lors de cette rencontre et gagne la faveur du monarque. L’opposition chromatique entre la robe dorée d’Esther et les vêtements noir et blanc d’Assuérus, ainsi que la présence d’une estrade sur laquelle se tient le roi, symbolisent la distance spirituelle des deux personnages. Le vide au centre du tableau était comblé à l’origine par la présence d’un jeune page et d’un chien, avant que l’artiste ne leur préfère une composition privilégiant le jeu de la perspective. Ces deux figures disparues s’inspiraient des figures de ce genre fréquentes dans les tableaux de Véronèse. »


"Artemisia. pouvoir, gloire et passions d’une femme peintre"
Par l'exposition "Artemisia. pouvoir, gloire et passions d’une femme peintre", le musée Maillol a rendu hommage à la célèbre artiste peintre italienne, Artemisia Gentileschi (1593-1654), peintre talentueuse pour souverains et cardinaux et violée par le peintre Agostino Tassi, et présenta quelques œuvres de son père, le fameux Orazio Gentileschi (1563-1639), dont David contemplant la tête de Goliath, tableau peint par son père, et récemment découvert

Deux artistes baroques, influencés par le Caravage (1571-1610). Le 21 juillet 2020, de 19 h à 20 h 30, aura lieu l’événement en ligne "Artemisia Gentileschi, le peintre est une femme !" par Marzia Fiorito-Biche, guide conférencière, et organisé par D'arts et d'histoires. 

L’exposition s’articule autour de quatre périodes : « les débuts à Rome aux côtés de son père, grand peintre baroque, les années florentines sous la protection du Grand-duc de Médicis et l’amitié de Galilée - elle sera la première femme admise à l’Accademia del Disegno -, les années 1620 à Rome - chef de file des peintres caravagesques, amie des grands maîtres tels que Simon Vouet et Massimo Stanzione, et reconnue par les plus grands collectionneurs européens – et la période napolitaine verra son apothéose. Pendant vingt-cinq ans elle dirige son atelier et forme les grands talents qui prendront la suite : Cavallino, Spardaro, Guarino ».

Née en 1593, Artemisia est formée par son père, Orazio Gentileschi, peintre baroque célèbre. Ses premières œuvres remontent à 1608. Artemisia participe aussi aux tableaux de son père : préparation des fonds, etc.

En 1611, elle est violée par un collègue de son père, Agostino Tassi, qui promet de l’épouser. Tassi est déjà marié.

Motivé par des raisons morales et financières, Orazio Gentileschi décide au printemps 1612 de révéler cette tragédie. Il adresse une supplique au pape Paul V.

Au terme du procès de sept mois, Agostino Tassi est condamné à cinq ans d’exil de Rome dans les galères pontificales. Jugée injuste, cette peine n’est pas exécutée.

Peu après, Artemisia épouse le peintre florentin Pierantonio Stiattesi. En 1613, la famille s’installe à Florence où Artemisia installe son atelier en 1614 et réalise des œuvres pour des commanditaires prestigieux.

Tout au long de sa carrière, elle alterne les peintures illustrant des thèmes historiques ou bibliques - Judith, Cléopâtre, Bethsabée, Suzanne, Yaël - et des portraits. Avec une même puissance dans la composition, un talent pour « capacité à composer ses tableaux de façon à en maximiser l’impact Emotionnel » (Judith W. Mann), des qualités narratives, un naturalisme rigoureux dans sa représentation du corps féminin dans des positions originales et la restitution de la lumière par des contrastes accentués.

En 1616, fait exceptionnel, Artemisia est inscrite à l’Accademia del Disegno de Florence. Elle se lie d’amitié avec Galileo Galilei, membre de cette Académie réputée depuis 1613 et son futur correspondant.

Artemisia rencontre le noble Francesco Maria Maringhi, son « amour béni », et réalise des œuvres notamment pour le Grand-duc Côme II de Médicis.

En 1620, le couple Stiattesi endetté arrive à Rome. Il se sépare en 1623. Artemisia élève leur fille, seule enfant survivant de leur union. De cette époque date Yaël et Sisra.

Vers 1626-1227, Artemisia travaille à Venise. Ses œuvres – portraits et tableaux religieux - sont acquises notamment par le vice-roi de Naples (juillet 1629-mai 1631), le duc d’Alcalá.

Vers 1630, Artemisia s’établit à Naples.

Après avoir marié sa fille et tenté en vain de s’établir à Modène, Florence ou Rome, Artemisia rejoint son père à Londres dès l’automne 1626. Vers 1642, elle retourne à Naples. Elle décède en 1654.

"David méditant devant la tête de Goliath" d'Orazio Gentileschi
Dans le cadre de l’Artemisia. Pouvoir, gloire et passions d’une femme peintre, le musée Maillol présenta aussi un tableau découvert récemment dans une collection privée belge : David méditant devant la tête de Goliath d’Orazio Gentileschi (Pise, 1563 - Londres, 1639), père d’Artemisia et « grand peintre baroque ».

Orazio Gentileschi aurait peint en 1612 ce tableau de petit format commandé par le pape qui souhaitait l’offrir en cadeau diplomatique à un prince d’Europe. Il s’agit d’une version autographe du David contemplant la tête de Goliath de la Galerie Spada à Rome.

Les auteurs de cette découverte exceptionnelle ? Roberto Contini et Francesco Solinas, commissaires de cette exposition. Sous la peinture d’une plaque de lapis-lazuli d'Afghanistan, ils révèlent une œuvre certifiée d'Orazio Gentileschi. Un tableau repéré par Axel Rondouin. Restauratrice de la "Saint Anne" de Léonard de Vinci, Cinzia Pasquali a restitué, par nettoyage, cette œuvre bien conservée.

Documentaire

Histoire diffusa les 14 et 20 juin 2014 Artemisia, documentaire de Marco  Visalberghi"Reine de la peinture baroque, favorite des historiennes d'art, sujet d'au moins trois best-sellers et d'un film controversé sorti en 1997… Ce que l'on retient essentiellement de la vie d'Artemisia Gentileschi demeure le viol qu'elle a subi à l'âge de 17 ans. Mais doit-on considérer que son génie est intrinsèquement lié à cet acte cruel dont elle a été victime ? Qui était vraiment Artemisia ? Une victime qui ne parvenait pas à se défaire de l'horrible traumatisme de sa jeunesse ? Une sorcière qui projetait ses fantaisies vengeresses sur ses toiles ? Une artiste extraordinaire qui a triomphé et émergé dans une époque dominée par des peintres masculins immensément talentueux tels Le Caravage et Rubens ? Dans ce documentaire qui constitue le premier portrait TV de l'artiste, des historiens d'art et des écrivains de renom dévoilent le chemin parcouru, de l'humiliation à la célébrité, par Artemisia Gentileschi, la première femme qui parvint à vivre de sa peinture". 

Conférence

Le 21 juillet 2020, de 19 h à 20 h 30, a eu lieu l’événement en ligne "Artemisia Gentileschi, le peintre est une femme !" avec Marzia Fiorito-Biche, guide conférencière, et organisé par D'arts et d'histoires. "Elle peignait à la façon d'un homme et a pris son existence en main, à une époque où les femmes n’avaient aucun droit. Femme scandaleuse et rebelle, elle se hissa au rang de légende vivante, puis sombra dans l'oubli durant plus de trois siècles. Le fabuleux destin de Artemisia Gentileschi (1593-1654)." Vous recevrez le lien zoom en échange du règlement sur ce lien https://py.pl/deVSu ou via Lydia (tel: 06 12 76 21 13). Toute les visites sont sur la page "événements" facebook" ou sur ce lien (mis à jour chaque dimanche) : http://visitevirtuelle.art/cal 

REPÈRES CHRONOLOGIQUES
ARTEMISIA GENTILESCHI (1593-v.1656)

« 8 juillet 1593 : Naissance à Rome. Elle est la fille aînée du peintre Orazio Lomi Gentileschi et de Prudenzia di Ottaviano Montoni, qui auront par la suite trois fils.
1605 : Mort de sa mère en couches.
1609 : Artemisia commence sa formation artistique dans l’atelier de son père, où elle manifeste un talent précoce.
1610 : Première oeuvre signée, Suzanne et les vieillards (Pommersfelden, Schloss Weissenstein).
6 mai 1611 : Viol d’Artemisia par le peintre Agostino Tassi, un ami de son père.
2 mars–28 novembre 1612 : Procès intenté par Orazio Gentileschi contre Agostino Tassi, affectant grandement la réputation d’Artemisia ; elle est soumise à un interrogatoire par la torture, durant lequel elle maintient ses accusations contre Tassi. À l’issue du procès, le violeur est condamné à une peine d’un an de prison et à l’exil de Rome, mais cette punition ne sera jamais appliquée.
Artemisia peint Judith décapitant Holopherne (Naples, Museo di Capodimonte), un tableau impressionnant par sa violence, une image souvent interprétée comme une forme de revanche sur son agresseur.
29 novembre 1612 : Artemisia se marie avec un peintre et apothicaire florentin au talent modeste, Pierantonio Stiattesi. Ce mariage est arrangé par Orazio afin de redonner à sa fille un statut acceptable.
Parmi les cinq enfants qui naîtront de cette union, seule une fille née en 1617, Prudenzia, atteindra l’âge adulte.
Début 1613 : Installation d’Artemisia et de Pierantonio à Florence.
1614-1620 : Artemisia exécute des commandes pour les Médicis.
19 juillet 1616 : Inscription à l’Accademia delle Arti del Disegno de Florence : Artemisia devient la première femme membre de la guilde des peintres. Elle y rencontre peut-être Francesco Maria Maringhi, un noble florentin, avec qui elle entame une liaison amoureuse.
Février 1620 : Artemisia et Pierantonio, qui ont contracté de lourdes dettes, fuient Florence. Artemisia se réinstalle à Rome avec sa famille et ne tarde pas à faire partie du cercle des artistes caravagesques.
Elle renoue contact avec son père. La demande pour ses peintures d’histoire et ses portraits est très importante au sein de la haute société romaine.
1621 : Artemisia est mentionnée dans les archives romaines comme le « chef de famille » d’un foyer comprenant sa fille et deux domestiques. Après 1622, elle vit séparée de son mari.
Orazio Gentileschi quitte Rome pour s’installer à Gênes.
1626-1629 : Artemisia séjourne à Venise et à Gênes. À Venise, elle fréquente les académies littéraires et retrouve Simon Vouet et Nicolas Régnier, rencontrés à Rome.
1628 : L’artiste reçoit le paiement d’une grande peinture destinée à Philippe IV d’Espagne.
1630 : Fuyant une épidémie de peste à Venise, Artemisia s’installe à Naples sur l’invitation du duc d’Alcalá, vice-roi d’Espagne, à la recherche de nouvelles commandes. Elle fréquente les cercles de la cour.
1635–1637 : Première commande d’un cycle de tableaux pour la cathédrale de Pouzzoles, chantier habituellement réservé aux hommes.
1638 : Artemisia entreprend un long voyage pour gagner Londres où elle est invitée par le roi Charles Ier d’Angleterre afin d’assister son père Orazio qui y travaille depuis 1626 ; Artemisia reçoit personnellement des commandes pour la collection royale, dont l’Autoportrait en allégorie de la Peinture (Windsor Castle, Royal Collection Trust).
7 février 1639 : Mort d’Orazio à Londres ;
Artemisia est chargée de terminer les œuvres commencées par son père.
1640 : Retour à Naples.
1654 : Dernière trace d’activité dans les sources de l’époque. Artemisia, âgée de soixante ans, accepte encore des commandes, s’appuyant de manière croissante sur son collaborateur, Onofrio Palumbo.
1656 : Épidémie de peste à Naples ; Artemisia s’éteint probablement à cette époque. Elle est enterrée dans l’église San Giovanni Battista dei Fiorentini de Naples. »


Du 19 mars au 3 août 2025
Musée Jacquemart-André, propriété de l’Institut de France
158, bd Haussmann - 75008 Paris
Téléphone : 01 45 62 11 59
Ouvert du lundi au jeudi de 10h à 18h, le vendredi de 10h à 22h et les samedis et dimanches de 10h à 19h.
Visuels :
Caravage,
Le Couronnement d’épines, v. 1605,
Huile sur toile, 178 x 125 cm, Prato, Galleria di Palazzo degli Alberti, dépôt de la Banca Popolare di Vicenza S.p.A. in L.C.A.
Banca Popolare di Vicenza
S.p.A. in L.C.A

Simon Vouet, Portrait d’Artemisia Gentileschi,
vers 1622-1626, Huile sur toile, 90 x 71 cm,
Pise, Fondazione Pisa, Palazzo Blu
credit : Proprieta della Fondazione Pisa/Palazzo
Blu, Pisa - c Palazzo Blu_Ph. Nicola Gronchi

Orazio Gentileschi,
Le Couronnement d’épines, 1613-1615,
Huile sur toile, 119,5 x 148,5 cm Brunswick,
Herzog Anton Ulrich-Museum
credit : BPK, Berlin, Dist. GrandPalaisRmn / C. Cordes

Artemisia Gentileschi,
Allégorie de l’Inclination, 1615-1616,
Huile sur toile, 152 × 61 cm, Florence,
Casa Buonarroti
credit : Firenze, Casa Buonarroti, Archivio Buonarroti

Artemisia Gentileschi,
Portrait d’un gentilhomme (Antoine de Ville),
vers 1626-1627, Huile sur toile, 203,2 x 109,2 cm
Collection Todd-Avery Lenahan,
credit : c Christie’s

Artemisia Gentileschi, Madeleine pénitente, vers 1625,
Huile sur toile, 122,5 x 97,5 cm, Seville, Catedral de Sevilla
photo : Catedral de Sevilla

Artemisia Gentileschi, Vénus endormie, vers 1626, 96,5 x 143,8 cm,
Virginia Museum of Fine Arts, Richmond, Adolph D. and Wilkins C. Williams Fund
Photo: Troy Wilkinson c Virginia Museum of Fine Arts 

Jusqu’au 15 juillet 2012
61, rue de Grenelle, 75007 Paris
Tél. : 01 42 22 59 58
Tous les jours de 10 h 30 à 19 h, le vendredi jusqu’à 21 h 30

Visuels :
Artemisia Gentileschi
Autoportrait au luth
c.1615-1619
Huile sur toile
65,5 x 50,2 cm
Minneapolis, Curtis Galleries
© Curtis Galleries, Minneapolis, Minnesota  

Artemisia Gentileschi
Bethsabée au bain
c. 1636-39
Huile sur toile
185,2 x 145,4 cm
Londres, Matthiesen Gallery
© The Matthiesen Gallery Londres
Artemisia Gentileschi
Judith et la servante avec la tête d’Holopherne
1617-18
Huile sur toile
114 x 93,5 cm
Florence, Galleria Palatina
© Studio Fotografico Perotti, Milano/Su concessione del
Ministero per i Beni e le Attività Culturali

Orazio Gentileschi (Pise, 1563 - Londres, 1639)
David méditant devant la tête de Goliath
vers 1612-1615,
Huile sur lapis-lazuli
25 × 20 cm
© Collection particulière

Articles sur ce blog concernant :
Judaïsme/Juifs

Cet article a été publié sur ce blog le 12 juillet 2012, puis le :
- 2 août 2013. Histoire a diffusé le 3 août 2013 un documentaire sur Artemisia Gentileschi ;
- 11 juin 2014 et 20 juillet 2020.
Les citations proviennent des dossiers de presse.