Les Archives nationales présentent l’exposition « MADE IN FRANCE. Une histoire du textile ». L’Etat a favorisé, protégé l’industrie textile française dès le règne du roi Louis XIV. Innovations techniques, variété des étoffes et de leurs clientèles et réglementations ont rythmé cette histoire. Dès les années 1970, le dirigisme économique a laissé la place à une idéologie privilégiant une société de services en sacrifiant les industries et un monde ouvrier. La pandémie de coronavirus a révélé que l'industrie textile, soumise à une concurrence mondiale, ployant sous les charges, normes "environnementales" ou "éthiques", et taxes, s'avérait aussi un élément de la souveraineté nationale.
La Mode retrouvée. Les robes trésors de la comtesse Greffulhe (Proust’s Muse, The Countess Greffulhe)
« Shocking ! Les mondes surréalistes d’Elsa Schiaparelli »
Madame Grès, la couture à l’œuvre
Madame Carven (1909-2015)
Madame Grès, la couture à l’œuvre
Madame Carven (1909-2015)
« Assassinat d'une modiste » de Catherine Bernstein
« Stitching History from the Holocaust »
Coco Chanel
« Stitching History from the Holocaust »
Coco Chanel
La France d’Avedon. Vieux monde, New Look L'Art de l'automobile. Chefs-d’œuvre de la collection Ralph Lauren
Sonia Rykiel (1930-2016)
Sonia Rykiel (1930-2016)
« Au bonheur des dames. L'invention du grand magasin », par Sally Aitken et Christine Le Goff
« Les Galeries Lafayette, Paris », par Elke Werry
« Les Galeries Lafayette, Paris », par Elke Werry
« Le design pour tous : de Prisunic à Monoprix, une aventure française »
« KaDeWe, Berlin » par Elke Werry
« Macy's, New York » documentaire par Janos Kereszti
« KaDeWe, Berlin » par Elke Werry
« Macy's, New York » documentaire par Janos Kereszti
« À l’heure où l’industrie textile est au cœur d’une prise de conscience environnementale et éthique, revenir sur son histoire en France est un moyen de saisir l’immense importance économique et sociale qu’elle a occupée dans notre pays, avant qu’elle ne s’effondre à la fin du XXe siècle. Made in France. Une histoire du textile souhaite montrer comment l’État a accompagné cette industrie, depuis les efforts de Jean-Baptiste Colbert sous Louis XIV jusqu’aux plans gouvernementaux des IVe et Ve Républiques pour tenter de la sauver des crises économiques. » Ou plutôt accompagner par des "plans sociaux" la suppressions des usines.
« Elle présente ainsi l’action des gouvernements sur plusieurs siècles pour contrôler, connaître et encourager la production du textile français, des fibres naturelles aux matières synthétiques. »
« L’exposition raconte une histoire du textile « Made in France » en s’appuyant essentiellement sur la riche collection d’échantillons conservés aux Archives nationales dans les fonds consacrés au commerce et à l’industrie, et pour la première fois montrés au public. Particulièrement bien documentés, ces échantillons sont représentatifs de la grande diversité d’une production disparue aujourd’hui, des étoffes les plus populaires aux plus luxueuses. »
« En dialogue avec des pièces provenant de diverses institutions, ces archives, mémoire des politiques commerciales menées dans le pays, témoignent de l’importance de cette industrie. Elles représentent une source indispensable pour comprendre l’histoire du textile en France du milieu du XVIIe siècle à nos jours et le rôle central qu’elle a occupé dans la vie de la multitude d’individus qui ont participé à son essor, de la production de matière première à la consommation finale. »
« Organisée en quatre temps, l’exposition parcourt plus de trois siècles de développement industriel en France qui dessinent en filigrane la doctrine de l’État pour cette filière : connaître, contrôler et soutenir. » Et depuis des décennies : saborder.
Le Commissariat scientifique est assuré par Anne-Sophie Lienhard, conservatrice du patrimoine, Archives nationales, Esclarmonde Monteil, conservatrice en chef du patrimoine, ministère de la Culture, et Alexia Raimondo, chargée d’études documentaire, Archives nationales. Le Commissariat technique a été confié à Jérôme Séjourné et Régis Lapasin, service des expositions, département de l’Action culturelle et éducative, Archives nationales.
AUTOUR DE L’EXPOSITION
6 000 MÈTRES DE LIENS
FOCUS SUR L’OEUVRE D’ANAÏS BEAULIEU
« En dialogue avec l’exposition, les Archives nationales accueillent Anaïs Beaulieu, plasticienne et brodeuse. La présentation de ses œuvres, pour la plupart réalisées à base de matériaux de récupération, prolonge la réflexion sur les enjeux environnementaux de l’industrie textile. Dès la cour d’honneur, le visiteur pourra découvrir une oeuvre collective qui se déroulera tout le long de la colonnade. Une cinquantaine de personnes de Seine-Saint-Denis participent depuis le mois de mars à des ateliers de broderie urbaine pour tisser et broder un motif retrouvé dans un numéro de Modes et travaux des années 60. Une façon de faire du lien entre les deux sites des Archives nationales. »
« Ce projet n’aurait pu voir le jour sans la Société Choletaise de fabrication qui, impliquée dans un une démarche RSE (responsabilité sociétale et environnementale), a fourni les 6 000 m de galon nécessaires à la réalisation de l’œuvre. »
« L’INVENTION DE LA QUALITÉ À LA FRANÇAISE »
« L’exposition s’ouvre sur la fabrique du « Made in France », en plein XVIIe siècle, sous le règne de Louis XIV, alors que le mercantilisme devient la doctrine économique prédominante en Europe, et que Colbert la fait sienne pour transformer la filière textile française et la rendre compétitive. »
« Au début du règne personnel de Louis XIV, le textile est de loin la principale industrie française. Jean-Baptiste Colbert (1619-1683) juge cependant insuffisante la qualité des produits français par rapport à celle de leurs concurrents étrangers. Il met alors en place une politique consistant à éviter autant que possible les importations pour encourager au contraire l’exportation des produits français. »
« Des règlements généraux (pour la draperie, la teinture, etc.) viennent préciser la qualité des matières premières à employer, les dimensions des pièces, le nombre de fils ou encore les apprêts. Les pièces jugées conformes aux règlements doivent recevoir un plomb ou une marque garantissant leur qualité. »
« Si l’existence de règlements de fabrication n’est pas nouvelle, c’est la première fois qu’ils sont systématisés à l’échelle du royaume. La course à la qualité est lancée et se poursuit jusqu’à la Révolution. Pour veiller à l’application des règlements, Colbert décide d’envoyer des commis dans toutes les provinces du royaume. Ce sont les premiers inspecteurs des manufactures, chargés à la fois du contrôle et de l’encouragement de l’industrie textile. Ils sont les yeux et la main de l’État sur le terrain. Si les inspecteurs des manufactures n’ont jamais bénéficié d’une école, des élèves ont été nommés à partir de 1746. L’élève est placé auprès d’un inspecteur et effectue des stages chez des fabricants pour s’initier à la pratique, à côté de l’apprentissage des règlements. Il rédige des mémoires lui permettant de faire preuve de ses connaissances et de ses capacités rédactionnelles. Parmi ces élèves, on retrouve des fils d’inspecteurs. »
« Les deux premiers règlements publiés concernent la fabrication des étoffes de laine et de fil et leur teinture. Ils ont pour but d’obliger les fabricants à livrer des produits de qualité semblable. Ils édictent des règles (matières premières, processus, dimensions, etc.) qui doivent être respectées. Le consommateur est ainsi rassuré. Jusqu’à 1683, 44 règlements et instructions seront ainsi publiés. »
« L’inspecteur Briard envoie à l’administration des échantillons des textiles produits par une manufacture de toiles peintes installée à Amiens. Il rend compte à travers sa correspondance du nombre de salariés employés dans l’établissement (huit imprimeurs, trois graveurs, huit tireurs, vingt pinceauteurs – ouvriers appliquant de la couleur sur les étoffes –, deux teinturiers et quinze ouvriers) mais également du perfectionnement des outils de productions et de l’augmentation des rendements de la manufacture. »
Jean-Baptiste Colbert
« Jean-Baptiste Colbert (1619-1683) devient contrôleur général des finances en 1665. Il se consacre tout particulièrement au développement des manufactures françaises de textile en édictant des règlements et en mettant en place les inspecteurs des manufactures. Sa politique économique est une forme du mercantilisme qui a pris le nom de « colbertisme ».
Les manufactures royales
« Avec Colbert, la « manufacture » en vient à désigner peu à peu un établissement unique de grande taille organisé pour optimiser la production. Certaines de ces manufactures sont les ancêtres d’entreprises qui ont perduré jusqu’à nos jours. Dans le cas des manufactures royales, la patente reçue du roi permet une exploitation grâce à des privilèges particulièrement protecteurs et favorables à la croissance des entreprises. »
Moire de soie made in France
« Le moirage est un effet optique produit lorsque le tissu est écrasé par calandrage. La moire de soie devient très à la mode vers 1750. Or, la France ne parvient pas à reproduire cette technique d’origine anglaise. »
« John Holker, Anglais passé au service de la France, est envoyé en Angleterre pour convaincre un calandreur londonien, John Badger, de s’installer à Lyon, sous la réserve exigée par ce dernier d’obtenir une protection de son savoir-faire innovant, ce qu’il obtient par un privilège exclusif qui lui impose en contrepartie, de former deux apprentis. Ces échantillons attestent la maîtrise de la technique. Avec l’appui de Daniel Charles Trudaine qui le recrute en 1755 comme inspecteur général des manufactures, John Holker (1719-1786) développe un complexe manufacturier à Rouen (tissage, calandrage, filature, teintureries et industrie chimique innovante, avec les chambres de plomb anglaises pour l’acide sulfurique). Par son intermédiaire, d’autres techniciens transitent en France. »
RUPTURES (1789-1815)
« La Révolution marque un tournant radical pour la filière textile. La libre concurrence, tant attendue mais qui tarde à se mettre en place, devient même un handicap pour les produits français dont la qualité n’est plus directement reconnue. Le brevet d’invention constitue alors un outil privilégié pour stimuler l’innovation. »
« Dès le milieu du XVIIIe siècle, le libéralisme s’oppose au mercantilisme. Un nombre croissant d’économistes et d’administrateurs pense qu’une « main invisible » pourrait réguler les marchés s’ils étaient laissés à la libre concurrence. Ils souhaitent donc la suppression des corporations et des règlements pour favoriser la liberté du commerce. L’interventionnisme d’État régresse. »
« Les lois d’Allarde, Le Chapelier et Goudard, adoptées par l’Assemblée nationale constituante en 1791, suppriment les corporations et toute la réglementation manufacturière. Chacun peut désormais choisir sa profession, à condition de payer la patente, un nouvel impôt direct. »
« Les manufactures textiles doivent s’adapter à cette nouvelle situation, que leurs dirigeants ne souhaitaient pas. Elles font face à l’impact des guerres qui provoquent la perte de main d’œuvre et la raréfaction des matières premières, à la suite du blocus continental décidé par Napoléon en 1806. »
« La soierie lyonnaise, en particulier, s’effondre et ne retrouve sa place majeure que grâce à l’action volontariste de l’Empire. Ce dernier rétablit les chambres de commerce, le protectionnisme douanier et tente de promouvoir le progrès technique à travers les brevets d’invention et les expositions des produits de l’industrie française. »
« L’innovation et l’invention ont toujours été au cœur des préoccupations de l’État qui cherche constamment à améliorer l’industrie et le commerce français. »
« L’une des actions les plus efficaces pour favoriser la recherche est la mise en place d’encouragements financiers et d’une législation protectrice des inventions, avec le système des brevets. »
« Pour l’industrie textile, cette période, entre la Révolution et le Premier Empire, est particulièrement intense car elle se concentre sur la mécanisation de sa production, mais également sur l’innovation dans le but de remplacer et adapter des matières premières devenues introuvables ou trop onéreuses. »
« La période qui s’étend de la Révolution (1789) au premier Empire (1804-1815) est souvent perçue comme une rupture brutale qui aurait effacé l’action de l’Ancien Régime. »
« Pourtant, d’une certaine façon, l’interventionnisme de l’État, initié par Colbert, aurait continué à peser sur l’industrie française jusqu’à nos jours. »
Les expositions des produits de l’industrie
« La suppression de l’ancienne réglementation des étoffes, ainsi que les guerres de la Révolution et de l’Empire placent l’industrie française devant de nombreuses difficultés, sur fond de concurrence avec l’Angleterre qui dispose toujours d’une avance technique. Depuis la disparition des inspecteurs des manufactures en 1791, l’administration, quant à elle, n’a plus une connaissance aussi précise de la situation du secteur textile, faute d’exercer un contrôle direct. »
« L’intervention de l’État doit désormais prendre une nouvelle forme. En 1798, le ministre de l’Intérieur François de Neufchâteau fait venir à Paris des manufacturiers afin qu’ils présentent leurs produits. Cette première exposition se déroule pendant trois jours sur le Champ-de-Mars. 110 exposants y sont présents. En raison d’une organisation tardive, ils viennent majoritairement de Paris et de ses environs. L’inscription est nominative. Un jury de neuf personnalités est chargé de décerner des récompenses et de rédiger un rapport. Trois types de mérites sont définis : « les fruits de l’invention, les résultats du perfectionnement et les monuments de l’utilité publique ».
RÉVOLUTION INDUSTRIELLE, RÉVOLUTION COMMERCIALE (1814-1914)
« Avec la chute du Ier Empire, les pouvoirs publics portent leur attention sur les conditions de travail et en particulier sur l’exploitation de la main d’œuvre juvénile. Concernant le commerce extérieur, la période est marquée par les « missions » d’intelligence économique, ou, plus prosaïquement, de renseignement sur fond d’expansion coloniale. »
« L’industrie textile est, avec la sidérurgie, l’une des productions au centre de la première industrialisation. Les métiers à tisser ou à filer mécaniques se développent, ce qui permet la concentration du travail dans de grandes usines. C’est au cours de cette période qu’apparaissent les textiles et colorants artificiels, parfois nuisibles pour la santé. »
« Les efforts de l’État, auparavant concentrés sur la fabrication, portent désormais sur les conditions de travail et les ouvriers. Le travail des enfants, particulièrement présents dans les usines textiles, commence à être réglementé et contrôlé. Si l’intervention directe de l’État reste faible, celui-ci continue cependant à agir grâce à la réglementation douanière, alternant entre protectionnisme et libéralisme. Le traité de libre-échange avec le Royaume-Uni de 1860 est ainsi très mal reçu par les industriels du textile français. »
« L’État intervient aussi en créant des institutions et en encourageant les produits français. Le XIXe siècle est la grande période des expositions universelles, conçues pour faire connaître la production nationale. L’administration du commerce organise des missions commerciales à l’étranger dans le but de récolter des nouvelles matières premières et de chercher de nouveaux débouchés. »
« Des expérimentations ont lieu dès le XVIIIe siècle pour essayer de trouver une matière pouvant remplacer le coton impossible à cultiver en France métropolitaine. En 1861, l’administration s’intéresse à un nouveau procédé provenant des États-Unis autour d’une matière nommée fibrilia, fabriquée à partir de fibres de lin, de chanvre, de juste et autres produits végétaux. Les essais menés par la maison Schlumberger concluent cependant que cette matière ne peut être filée avec les machines en usage à l’époque. »
« Le cadre contient neuf médailles d’expositions remportées entre 1848 et 1878 par le fabricant de textile pour ameublement Mazure-Mazure, installé à Roubaix. Les récompenses obtenues par les entreprises sont souvent intégrées dans les stratégies commerciales, utilisées sur leur papier à en-tête, sur l’emballage des produits ou même comme ici exposées dans un cadre. Elles représentent une fierté et un outil d’autocélébration, mais également un outil efficace de promotion. »
Les petites mains de l’industrie textile
« Si le travail des enfants existe déjà sous l’Ancien Régime, le développement de l’industrie textile au XIXe siècle, qui conduit au regroupement de la production dans de grandes manufactures équipées de métiers mécaniques, accentue le recours à cette main d’oeuvre juvénile. Employés très jeunes (à partir de 6 ans), les enfants constituent en effet un personnel docile et peu coûteux : ils gagnent le quart du salaire d’un adulte. En Alsace, en 1844, les enfants de moins de 16 ans représentent entre 20 % et 30 % de la main d’œuvre textile. Ils sont employés à des tâches qui exploitent leur petite taille, leur souplesse et leur adresse manuelle : rattacheurs, bobineurs ou balayeurs, on leur demande de se glisser sous les métiers à filer en marche pour rattacher les fils cassés, nettoyer les bobines et ramasser les déchets de coton. Dans les tissages, ils sont affectés à des fonctions qui imposent de rester debout de longues heures. Ils sont souvent maltraités, travaillent dans des conditions insalubres et les accidents de travail sont nombreux. Si les industriels y trouvent leur compte, les familles n’ont pas le choix : les salaires sont alors si bas que les parents doivent faire travailler leurs enfants pour compléter les revenus de la famille. Les industriels du textile exploitent également, avec l’accord des autorités, la main d’œuvre mise à disposition par les orphelinats. À l’époque, la durée de travail des enfants est la même que celle des adultes dont ils sont les auxiliaires, à savoir entre 13 et 16 heures par jour ; ils peuvent également travailler la nuit et le dimanche. »
LE TEXTILE FRANÇAIS FACE À LA MONDIALISATION
« Dans cette dernière partie du parcours, la période contemporaine devient la toile de fond de l’évolution de tout le secteur textile. Malgré des politiques publiques volontaristes (réemploi des matières naturelles, essor des matières synthétiques innovantes) les vagues de fermetures d’usines se succèdent, détruisant massivement les emplois. Cette période de crise agit également comme un révélateur pour un secteur qui doit s’adapter aux nouvelles attentes des consommateurs. »
« Durant les conflits armés (Première et Seconde Guerres mondiales), l’État reprend un rôle dirigiste mais il doit aussi faire face, dans la seconde moitié du XXe siècle, au libre-échange des marchandises et s’adapter à la mondialisation croissante. »
« L’ouverture au marché commun européen (1957) et l’accélération de la mondialisation obligent la France à signer des accords commerciaux internationaux. Ces accords sont conclus pour tenter de maîtriser le volume des importations de tissus étrangers, moins chers car fabriqués dans des pays où le coût de la main-d'œuvre est moindre, notamment la Chine, et essayer de favoriser les exportations de textiles français. Mais ils n’évitent pas à l’industrie nationale d’être frappée de plein fouet par les crises économiques entre les années 1970 et 2000, entrainant délocalisations, licenciements, conflits sociaux et dépôts de bilan, malgré les tentatives de soutien financier de la part de l’État.
Le XXe siècle voit l’explosion des textiles synthétiques, fabriqués à partir de composés chimiques d’hydrocarbures. Cette révolution technologique et la mondialisation des échanges font de l’industrie textile l’une des plus polluantes de la planète à la fois par les matériaux, mais aussi par l’empreinte carbone des transports qu’elle génère, entrainant ces dernières années une prise de conscience et une volonté de changement. »
« Dans les dernières années du XIXe siècle, trois procédés de « soie artificielle » à base de cellulose apparaissent : la rayonne, brevetée en 1884 par le Français Hilaire de Chardonnet, la viscose des Anglais Cross, Bevan et Beadle en 1892 et la soie Bemberg ou cupro-textile, brevetée en 1897. Le tableau est consacré à la promotion de cette dernière technique dans le cadre de conférences organisées par le Comptoir des textiles artificiels. »
« Le procédé de la viscose finit par s’imposer dans les années 1920 et la loi du 8 juillet 1934 interdit par la suite la dénomination de « soie artificielle ».
« Depuis les années 1970, les effectifs du secteur textile et de l’habillement ont drastiquement diminué, passant de 764 000 en 1970, à 693 000 en 1974, puis de 300 000 en 1990 à moins de 200 000 en 2009. Depuis 1995, 50 % des entreprises actives dans l’habillement et 40 % des entreprises textiles ont disparu. Les régions historiques de la production textile sont lourdement touchées : la région Rhône-Alpes par exemple a perdu près de 50 % de ses effectifs entre 1995 et 2008 et seules quatre filatures de laine demeurent en activité dans le Nord. La prise de conscience environnementale actuelle permettra-t-elle un renouveau de l’industrie textile française ? » Non. Car cette "prise de conscience" se traduit par une augmentation des normes coûteuses, dans un contexte déprimé, où les consommateurs peinent à préserver leur pouvoir d'achat. Internet a modifié aussi les modalités d'achat des vêtements : essor du site chinois Shein, échanges ou ventes d'articles usagés, etc.
Soies artificielles
« Lors de l’exposition universelle de 1889 à Paris, le comte Hilaire de Chardonnet présente des premiers essais de « soie artificielle », issus de ses recherches sur la nitrocellulose (brevet daté de 1884). En cette fin du XIXe siècle, les inventions se succèdent pour mettre au point des textiles artificiels destinés à imiter, si ce n’est remplacer, la soie qui connaît une grave crise de production depuis la fin des années 1850. Ainsi, aux côtés de la « soie Chardonnet » produite en France, la rayonne*-viscose* est exploitée en Grande-Bretagne par Courtauld à partir de 1904, et la soie au cuivre est produite industriellement par Bemberg en Allemagne la même année. Ces étoffes nouvelles, qui appartiennent toutes à la famille des textiles artificiels, sont obtenues grâce à des opérations chimiques complexes réalisées sur une matière naturelle, la cellulose (pâte de bois, coton, etc.). »
REPÈRES
1661-1715
Règne personnel de Louis XIV.
1665
Le manufacturier de draps hollandais Josse van Robais s’installe en France.
1669
Jean-Baptiste Colbert fait édicter des règlements généraux sur la fabrication des draps et la teinture. Mise en place des futurs inspecteurs des manufactures.
1686
Le commerce, l’importation et la fabrication des tissus imprimés nommés indiennes sont interdits dans le royaume de France.
1715-1774
Règne de Louis XV.
1733
John Kay invente la navette volante, qui permet d’accélérer le tissage des étoffes sur les métiers traditionnels.
1751
Le manufacturier anglais John Holker rencontre l’intendant des finances Daniel-Charles Trudaine et est chargé d’une mission d’espionnage en Angleterre.
1759
Fin de la prohibition des indiennes.
1760
Christophe-Philippe Oberkampf fonde la manufacture royale de toiles imprimées à Jouy-en-Josas.
1774-1792
Règne de Louis XVI.
1791
Les lois Allarde, Goudard et Le Chapelier suppriment l’ancienne législation et les inspecteurs des manufactures. Elles instaurent la liberté d’entreprendre.
Mise en place des brevets d’invention.
1789-1799
Révolution française.
1798
Première Exposition des produits de l’industrie française.
1801
Joseph Charles Jacquard invente un procédé automatisant le tissage de tissus à motifs. La « mécanique Jacquard » est une innovation majeure pour le tissage de la soie.
1804-1815
Premier Empire.
1806
Début du blocus continental, empêchant l’importation de certaines matières premières comme l’indigo.
1810
Importante commande de soie de Napoléon Ier pour remeubler le château de Versailles.
1830-1848
Monarchie de Juillet.
1840
Rapport de Louis René Villermé sur le travail des enfants, très présents dans l’industrie textile. Il est à l’origine de la première loi réglementant le travail des mineurs, en 1841, qui interdit le travail des moins de 8 ans.
1843-1846
Mission en Chine de Théodose de Lagrené.
1852-1870
Second Empire.
1855
Première exposition universelle française, à Paris (organisée après celle de Londres en 1851).
1856
Invention par William Perkin de la mauvéine, premier colorant industriel de synthèse.
1870-1940
Troisième République.
1884
Invention du Nylon par l’américain DuPont de Nemours, fibre synthétique dérivée du pétrole (polyamide).
1934
Interdiction de l’emploi du terme « soie artificielle » pour la viscose à la suite d’une demande des producteurs de soie naturelle.
1935
Invention de la « soie artificielle » par le comte Hilaire de Chardonnet, première fibre artificielle produite à partir de cellulose, aussi appelée viscose ou rayonne.
1941-1947
Rationnement des textiles.
1958-
Cinquième République.
Années 1960
Début de la crise du l’industrie textile en France, liée à la nécessité de moderniser les usines et à la concurrence des pays émergeants.
1963
Décret rendant obligatoire l’étiquetage des vêtements et l’indication des fibres qui les composent.
1973
Premier choc pétrolier entraînant une crise industrielle généralisée.
Signature de l’accord multifibres, chargé de protéger les industries textiles des pays dits « développés » de la concurrence des pays à la main d’oeuvre peu coûteuse, par le biais de quotas d’importations.
1995
Accords sur les textiles et les vêtements, destiné à lever progressivement les restrictions de l’accord multifibres.
2024
Mise en place de l’écobalyse, une étiquette mesurant l’impact écologique des vêtements neufs.
Aux Archives nationales, Paris
Hôtel de Soubise
60, rue des Francs-Bourgeois. 75003 Paris
Tél. +33 1 75 47 20 02
Du lundi au vendredi : 10 h - 17 h 30
Samedi et dimanche : 14 h - 19 h
Fermeture le mardi
Visuels :
Crédit de l'affiche : Échantillons provenant de l’enquête sur la situation de la manufacture de toiles peintes d’Amiens (détail),1763/Archives nationales de France, F/12/563
© Archives nationales de France
Échantillons provenant de l’enquête sur la situation de la manufacture de toiles peintes d’Amiens, 1763.
Dimensions : 37 x 49 cm
© Archives nationales de France, F/12/563.
Nouveau tour à tirer la soie par le sieur Bruté, inspecteur des manufactures à Montauban, 1779.
Dessin. Dimensions : 38x58 cm
© Archives nationales de France, F/12/2201.
Prix du ministre de l’Intérieur Chaptal pour le perfectionnement des machines à ouvrir, peigner, carder et filer la laine : affiche annonçant le prix, dessin de l’invention et échantillons, par Jubert, 1801.
© Archives nationales de France, F/12/2204.
Médailles d’or et d’argent reçues par le fabricant Gensse-Duminy & Cie pour la fabrication de casimirs en l’an 10 [1802] et 1806.
© Archives nationales de France, F/12/2414 (1806).
Articles de soierie vendus sur le marché de Batavia en 1845
© Archives nationales de France, F/12/2589.
Robe de jour tissu Flesa, griffe « AU PRINTEMPS » (grand magasin), vers 1948-1958
Viscose imprimée, ceinture noire en plastique.
© Palais Galliera, musée de la Mode de la Ville de Paris, GAL1961.82.4 (1-2).
A lire sur ce blog :
Les citations proviennent du dossier de presse.