Citations

« Le goût de la vérité n’empêche pas la prise de parti. » (Albert Camus)
« La lucidité est la blessure la plus rapprochée du Soleil. » (René Char).
« Il faut commencer par le commencement, et le commencement de tout est le courage. » (Vladimir Jankélévitch)
« Notre métier n’est pas de faire plaisir, non plus de faire du tort. Il est de porter la plume dans la plaie. » (Albert Londres)
« Le plus difficile n'est pas de dire ce que l'on voit, mais d'accepter de voir ce que l'on voit. » (Charles Péguy)

mardi 6 février 2024

« H+, transhumanisme(s) » de Matthieu Gafsou

Le Lavoir Numérique présente l’exposition « H+, transhumanisme(s) » 
de Matthieu Gafsou. Ce mouvement mondial vise à "améliorer" l'être humain et le groupe humain par le recours aux progrès scientifiques : biotechnologies, neurosciences, Intelligence artificielle (IA). Bref, de repousser les limites naturelles de l'organisme humain : vieillissement, voire mort. C'est un posthumanisme.

Une problématique Fondation Casip-Cojasor 
L’affaire Krief, exemple d’antisémitisme d’Etat (version courte)

Le transhumanisme est un mouvement mondial,  intellectuel, "prônant l'usage des sciences et des techniques pour améliorer la condition humaine par l'augmentation des capacités physiques et mentales des êtres humains et de supprimer le vieillissement et la mort (et quelques maladies)". Il vise à améliorer l'individu et le groupe humain. Attentif aux biotechnologies, aux neurosciences et à l'Intelligence artificielle (IA), il s'oppose ainsi au bioconservatisme. Il est perçu comme un posthumanisme. 

En France, ce mouvement a pour principal représentant l'Association française transhumaniste. Si certains (
Francis Fukuyama) soulignent les dangers du transhumanisme, d'autres (Ray Kurzweil, Ronald Bailey) en sont de farouches défenseurs. En 2014, la journaliste Monique Atlan et le philosophe Roger-Pol Droit avaient enquêté sur "ces révolutions qui changent nos vies" : "Ce qu’il y a de radicalement neuf n’est pas l’éternel combat des humains pour dépasser les limites, les transgresser, les inscrire ou les déplacer. C’est bien plutôt le désir obstiné de leur effacement, l’obsession d’en finir avec les limites, de les neutraliser. Mieux : de les annihiler. Et ce dans tous les domaines".

"Cette transformation s’envisage au niveau individuel, mais aussi collectif, conduisant alors à une humanité nouvelle. Différentes facultés physiques ou mentales et cognitives de l’être humain seraient concernées : il verra dans l’obscurité, ne connaîtra plus la fatigue et ne se cassera pas le col du fémur en glissant… Ses capacités intellectuelles seront décuplées et sa mémoire prodigieuse. Équipé d’un exosquelette intelligent, doté de puces dans le cerveau, ce super-homme deviendra plus performant, plus créatif, plus empathique. Son cerveau s’il devient malade sera guéri ou au moins réparé efficacement. Le but ultime ? Fusionner l’homme et l’ordinateur après l’avoir soustrait au vieillissement et à la mort. Illusions, fantasmes, escroquerie, imposture ?... Les dangers sont multiples (pour la protection des données, par exemple), mais l’un des arguments contre le transhumanisme consiste à dire que seuls les plus riches auront accès aux technologies augmentatives (implants neuronaux, prothèses bioniques voire modifications génétiques), leur conférant un avantage indéniable... La tentation eugéniste est forte ! L’eugénisme de l’intelligence humaine considère le quotient intellectuel, le fameux QI, comme un indicateur fiable de l’intelligence et en infère des prédictions très incertaines sur l’héritabilité de celle-ci. Or, l’intelligence est difficile à définir en tant que telle", ont précisé Jean Mariani et Danièle Tritsch ("Transhumanisme : de l’illusion à l’imposture", Journal du CNRS, 31.08.2018). 

Et ces auteurs de poursuivre : "Derrière le mythe transhumaniste s’avance masquée une gigantesque toile d’intérêts économiques. Les transhumanistes sont le pur produit d’une société où les puissances de l’argent, banques, multinationales industrielles et politiques règnent en maîtres. Ils créent une véritable « économie des promesses » que décrit notamment Yves Frégnac1 dans un récent article de revue (« Big data and the industrialization of neuroscience: A safe roadmap for understanding the brain? », Y. Frégnac, Science, 2017, vol. 358 (6362) : 470-477. DOI: 10.1126/science.aan8866) (investissons beaucoup d’argent, et ce sera à la fois la disparition des maladies, un cerveau plus performant, l’éternelle jeunesse et l’immortalité). Néanmoins, depuis peu, certains intérêts privés (Google, Facebook, Microsoft, IBM, Amazon) essayent de définir « les bonnes pratiques », notamment sur les questions éthiques. Face à ces allégations, il faut prendre un certain recul épistémologique et être conscients de nos biais culturels si nous voulons faire le tri entre les effets d’annonces, les promesses démiurgiques et la réalité des avancées scientifiques. Il ne s’agit pas de refuser d’emblée les implants intracérébraux, la thérapie génique, les prothèses bioniques ou la sélection des cellules souches, mais de rester vigilants quant au rôle systémique des usages qui en sera fait."

« Equipement de l’Etablissement Public Territorial Grand-Orly Seine Bièvre, implanté à Gentilly, Le Lavoir Numérique  est dédié à l’image et au son, résolument tourné vers la création audiovisuelle. Lieu de diffusion (expositions, projections, débats, concerts, spectacles) et de pratique (ateliers, stages, résidences), sa programmation est rythmée par des Séquences et interroge la large sphère numérique sous l’angle de l’image et du son. Le Lavoir Numérique incite chacun et chacune à garder les yeux grands ouverts et l’oreille attentive ». Et rédige son dossier de presse en écriture inclusive !?

La Séquence #6 du Lavoir Numérique est intitulée « H+, transhumanisme(s) » - la quatrième analysait le complotisme.

« Pour la première fois, le Lavoir Numérique et la Maison Doisneau (gérés par la même équipe) présentent en parallèle deux expositions photographiques autour d’une thématique commune : le corps humain. Si la Maison Doisneau avec son projet collectif « Et nos morts ? La photographie post mortem aujourd’hui en Europe » se penche sur la finitude du corps humain à l’heure de son trépas, l’exposition « H+, transhumanisme(s) » de Matthieu Gafsou du Lavoir Numérique explore, quant à elle, les différents moyens mis en oeuvre afin de dépasser les limites du corps et, pourquoi pas, repousser le terme de son existence », a expliqué Michaël Houlette, Direction du Lavoir Numérique et de la Maison Doisneau.

Et Michaël Houlette de poursuivre : « Le transhumanisme doit être considéré ici comme un vaste courant visant à améliorer ou encore transformer le corps (et, au passage, l’esprit). Le transhumanisme a bien évidemment ses adeptes, modérés et ultras. Certain.e.s ne s’identifient pas aux idées utopiques ou dystopiques (c’est selon) du transhumanisme. Mais ces personnes peuvent être néanmoins rattachées à ce courant simplement parce qu’elles/ils (le plus souvent des médecins, des chercheuses…) guérissent les corps, développe des thérapeutiques et des techniques qui contribuent au prolongement des vivants. D’autres, au contraire, rêvent à de nouveaux schémas pour les humains à venir et militent pour toutes les formes d’interventions génétiques ou technologiques qui permettront de les rendre meilleurs, plus forts ou plus beaux. D’autres enfin, voient dans la data un moyen de transcender le corps et l’être, un moyen de créer des avatars ou doubles numériques nous incarnant suffisamment pour prolonger notre présence, au-delà-même de notre propre mort, dans les sphères web et métavers. »

« La question du transhumanisme est souvent liée à l’image du corps, à une vision insatisfaite de ses potentiels et de ses contours. Cette question devait nécessairement faire l’objet d’une séquence spécifique au Lavoir Numérique avec une exposition, la programmation cinéma et les débats qui l’accompagnent », a conclu Michaël Houlette.

« H+ traite du transhumanisme, un mouvement qui prône l’usage des sciences et des techniques afin d’améliorer les caractéristiques physiques et mentales des êtres humains. Certains considèrent ce mouvement comme un phénomène «neutre», logique au vu des avancées scientifiques. On peut aussi considérer qu’il s’agit d’une nouvelle forme de spiritualité, dégagée du poids des religions et qui érige l’humain en animal tout puissant. D’autres enfin y voient une forme d’adoration de la technique et de l’individu, signes d’une mégalomanie fautive », a écrit Matthieu Gafsou

Et Matthieu Gafsou d’expliquer : « Entre les adeptes de l’homme-machine (le cyborg), les tenants d’un abandon du corps et du transfert de l’esprit dans un ordinateur ou encore les partisans d’une médecine qui vaincrait le vieillissement, le transhumanisme véhicule des projections diverses, dont les signes existent déjà. Des prothèses à la nourriture-médicament (nootropiques) en passant par les implants ou l’interaction humain-machine, on découvre que notre société a déjà fait le pas de considérer le corps comme une machine modifiable à loisir. » 

« H+ est une enquête philosophique, qui documente et questionne. Les photographies sont peu contextualisées et elliptiques. La sécheresse formelle, mariée à la simplicité des compositions, permet de saisir la vision d’un humain détaché de sa chair. Prises isolément, les images déroutent plus qu’elles n’explicitent. C’est mises en réseau qu’elles tissent la toile d’une histoire. Artificielles, les photos ressemblent à leur sujet: on ne sait plus si c’est le vivant qui s’éteint en devenant machine ou si l’inanimé prend vie. Cette série parle donc de notre corps, de notre quotidien et de notre rapport à la technique autant qu’elle ouvre sur des perspectives d’avenir. H+ ne donne aucune réponse mais peut fonctionner à la fois comme un outil pour penser une question essentielle de notre présent et comme un espace poétique qui nous confronte à l’absurde de notre finitude », a conclu Matthieu Gafsou.

La programmation cinématographique est imaginée par Benoît Dechaumont avec Loïc Blanchefleur (médiation cinéma au Lavoir Numérique).

Les Rencontres du Lavoir #8 ont proposé « L’immortalité numérique : quelle vie après la mort ? ». « Réparer le corps, le dépasser en augmentant ses capacités physiques, ralentir le vieillissement, c’est déjà possible grâce aux NBIC (nanotechnologies, biologie, informatique et sciences cognitives). Demain, pourrons-nous aussi transcender nos capacités intellectuelles grâce à une hybridation de l’humain avec la machine ? Apparier le cerveau humain avec une IA permettra-t-il de s’affranchir de notre enveloppe corporelle et faire perdurer notre existence au-delà de notre mort physique comme l’appellent de leurs vœux les transhumanistes ? Aujourd’hui déjà, des deadbots, sortes de doubles numériques de personnes défuntes, parfois véritables avatars animés en 3D, offrent la possibilité d’un dialogue outre-tombe. Mais qu’est-ce qui constitue l’identité post-mortem ? Est-ce simplement la trace figée de nos données en ligne orchestrée par des algorithmes ? Et ensuite, quel statut donner à ces représentations numériques désormais éternelles ? Sommes-nous prêts à vivre dans un monde virtuel peuplé de personnes décédées ? »« Chaque Rencontre est filmée sur place, puis disponible à emporter : en ligne et en podcasts ! »

Neil Harbisson "se considère comme un cyborg. Souffrant d’une maladie rare, l’achromatopsie, qui le prive de la vision des couleurs, il s’est fait implanter une prothèse nommée Eyeborg. Intégrée à la boite crânienne, elle capte les couleurs et les convertit en ondes sonores. Neil Harbisson plaide pour une augmentation créative de l’humain et se distancie parfois du transhumanisme, qu’il trouve trop figé dans des représentations stéréotypées ou commerciales. Il a une vision d’artiste plus que d’apôtre de la technoscience. Il se targue d’être le premier humain à apparaître avec sa prothèse sur la photo de son passeport.
Munich, 15 juillet 2015."
© Matthieu Gafsou / Courtoisie Galerie C

"Extrait du manifeste du body hacktivism écrit par Lukas Zpira : « Par opposition aux modernes primitifs qui travaillent sur des bases d’anthropologie tribale, les body hactivists pratiquent, théorisent et inventent des modifications corporelles avant-gardistes et prospectives, influencées par la culture manga, la bande dessinée, les films et la littérature de science- fiction. Rendues possibles par une curiosité sans cesse en éveil de l’évolution des découvertes techno-médicales, ces pratiques par essence expérimentales, sont définies comme body hacking, terme exprimant la volonté de ces artistes, chercheurs et penseurs de dépasser les frontières biologiques. Les termes body hacktivist et body hacktivism sous-entendent la nécessité d’action et de prise en main de nos destinées par la volonté perpétuelle de se réinventer. »
2017
© Matthieu Gafsou / Courtoisie Galerie C

"La bioluminescence chez la méduse Aequorea victoria a permis aux scientifiques de faire certaines avancées grâce à la transgenèse, à savoir le transfert d’un gène d’une cellule d’une espèce vers une cellule appartenant à une autre espèce. C’est ainsi que des souris ont reçu ce gène et l’expriment une fois exposées aux UV. Cette propriété est utilisée par les chercheurs comme marqueur permettant d’analyser le développement de tissus ou d’organes, de tumeurs, etc."
Fribourg, 30 mars 2017.
© Matthieu Gafsou / Courtoisie Galerie C

« Hériter de la couveuse, c’est grandir dans un environnement immensément fragile, qui n’apporte aucune garantie en dehors de celles fournies par des agencements inquiets de savoirs, de soins, de tuyaux, d’aliments, de températures et de moniteurs. Au lieu d’une technique support de désirs de puissance tournés vers le futur, la couveuse incite à raconter une autre histoire, activement concentrée sur un présent fragile, une histoire tissée d’innombrables relations vitales et incertaines. Hériter de la couveuse, c’est insister pour se souvenir que les techniques et nos biologies sont engagées dans la construction permanente de rapports éminemment précaires. »
Gabriel Dorthe in « Héritier de la couveuse », A contrario, n° 22, bsnPRESS, 2016.
© Matthieu Gafsou / Courtoisie Galerie C

"Yann Minh, né en 1957, est un artiste protéiforme spécialisé dans la cyberculture et les mondes persistants. On le voit ici dans son Nooscaphe. Il se décrit souvent comme un nooconteur (un conteur du cyberespace) cyberpunk explorateur au long cours du cyberespace et de la noosphère (sphère de la pensée humaine et par extension, internet, qui relie l’humanité à travers les œuvres d'art, la pensée, etc.). Il a été plusieurs fois primé pour ses créations artistiques dans les domaines de l’art contemporain et de la cyberculture. Son univers d’inspiration futuriste et transhumaniste mêle érotisme et science-fiction."
Paris, 16 juin 2016.
© Matthieu Gafsou / Courtoisie Galerie C


Matthieu Gafsou

« Matthieu Gafsou (CH, F, 1981) vit et travaille à Lausanne, en Suisse. Après avoir obtenu un master en philosophie, littérature et cinéma à l'Université de Lausanne, il a étudié la photographie à l'École d'arts appliqués de Vevey. Depuis 2006, Gafsou a participé à de nombreuses expositions collectives et individuelles, et a publié six livres. En 2009, Gafsou a reçu le “Prix de la fondation HSBC pour la photographie" et a ensuite été invité à contribuer à l'exposition reGeneration2 crée par le musée de l'Elysée. En 2014, le même musée a produit l'exposition personnelle Only God Can Judge Me. En 2018, l'exposition H+ est l'un des temps forts des Rencontres de la Photographie d'Arles et fait ensuite le tour du monde (Chine, Australie, Italie, Irlande, Espagne, Suisse, etc.). En 2022, le projet Vivants est présenté in extenso au musée de Pully ainsi qu'à Paris Photo où Gafsou gagne le pPix de la maison Ruinart. Gafsou enseigne depuis plusieurs années à l'École cantonale d'art de Lausanne (ECAL). Il est aussi membre fondateur de l'agence MAPS. »



Du 22 septembre 2023 au 11 février 2024
4, rue de Freiberg. 94250 Gentilly
Tél. : 01 49 08 91 63
Du mercredi au vendredi de 13h30 à 18h30. 
Samedi et dimanche : de 13h30 à 19h. 
Fermé les jours fériés. Entrée libre 

Articles sur ce blog concernant :
Les  citations sur le film proviennent du dossier de presse.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire