Citéco présente l’exposition-dossier « L’abbé Pierre, faire la guerre à la misère ». En quelques repères chronologiques, l’histoire de ses actions comme résistant, député et fondateur-dirigeant du mouvement Emmaüs luttant contre l'exclusion, dont la Fondation Abbé-Pierre pour le logement des défavorisés. Célèbre pour son appel du 1er février 1954 sur RTL en faveur des sans-abris, l'abbé Pierre (1912-2007) a créé des cités d'urgence. En 1996, il soutient son ami Roger Garaudy accusé de négationnisme.
« Le monde change à chaque fois que quelqu’un partage. »
Henri Grouès
Citéco « est fier d’accueillir au sein de son parcours permanent l’exposition L’abbé Pierre, faire la guerre à la misère, retraçant en photos et en citations la vie d’une des personnalités les plus appréciées de la population française. »
« La figure de l’abbé Pierre nous rappelle avec force qu’une société ne peut se concevoir que par une solidarité de tous les instants. Lorsque l’on porte un regard historique, on constate que les droits hérités de la Révolution française ont été complétés par des dispositifs visant à sortir de l’indigence des populations alors sans avenir. Droit à l’éducation, code du travail, droit de la santé universel, droit à un revenu minimum de solidarité… Avec ses actions d’une vie dédiées notamment à l’insertion par le travail et à la mise en place d’une loi contraignante pour produire des logements accessibles, l’abbé Pierre a montré une voie renforçant la construction d’une société solidaire », a écrit Philippe Gineste, Directeur de Citéco.
Laurent Desmard, Président de la Fondation Abbé Pierre, a précisé : « Pour la première fois en France, une exposition est dédiée à la vie et à l’œuvre de l’abbé Pierre. C’est un honneur pour la Fondation qui porte son nom d’avoir pu l’organiser, à l‘invitation de Citéco et avec l’aide précieuse d’Emmaüs International. Vous le découvrirez ici, la vie et l’œuvre de l’abbé Pierre n’ont jamais cessé de ne faire qu’un : toute sa vie, notre fondateur s’est investi pour que chaque être humain puisse vivre dignement, pour faire entendre la voix des plus petits, des plus modestes qu’il appelait « les sans-voix ». Sans relâche, l’abbé Pierre a défendu et fait vivre les valeurs de fraternité et de solidarité. Anciens chiffonniers, compagnons d’Emmaüs qui vivent de la récupération en France et dans le monde ; familles entières logées ou relogées dans des conditions dignes… en luttant contre l’injustice et en travaillant au bonheur des autres, l’abbé Pierre s’est accompli et a permis à tant d’autres de s’accomplir ! C’est cette vie si riche « au service du premier souffrant » que nous vous proposons de découvrir. »
Le Commissariat est assuré par Laurent Desmard, Président de la Fondation Abbé Pierre, Emmanuelle Larcher, Responsable Mémoire d’Emmaüs International, Nicolas Huet, Archiviste Emmaüs International, Delphine Picard, Laëtitia Lopez et Samuel Tiano - Fondation Abbé Pierre, Amandine Blier, Aurélie Passerel, Eugénie de Vregille - Cité de l’Économie.
Des remerciements sont adressés à Emmaüs International, les Archives nationales du monde du travail (ANMT), Emmaüs Habitat, le centre Abbé Pierre, Frédéric Tellier.
"Par l’immense écho qu’elles donnent à la fois aux thèmes d’accusation « antisionistes » et aux «thèses» négationnistes, les récentes interventions de l’abbé Pierre (depuis la mi-avril 1996), souvent sollicitées par des médias irresponsables, sont en train de réactiver l’imaginaire anti-juif, en France et ailleurs.... Depuis quelques mois, porté par sa forte légitimité culturelle, l’abbé Pierre réactive et reformule de plus en plus nettement le mythe du « complot juif mondial », c’est-à-dire le principal mythe d’accusation anti-juif de la modernité. Il repeint ce mythe conspirationniste aux couleurs d’un antisionisme absolu, démonologique, adapté à la conjoncture (le retour de la droite au pouvoir en Israël, les inévitables réactions islamistes, d’où les menaces pesant sur le processus de paix, etc.). L’abbé montre ainsi qu’il n’a pas perdu son sens aigu des effets de propagande. En dénonçant un « complot sioniste mondial », il va en un sens plus loin dans la judéophobie explicite que Le Pen, qui dénonçait en 1989 les agissements de «l’internationale juive». C’est au moment où les sectaires faurissoniens étaient totalement marginalisés, disqualifiés dans la communauté scientifique, que, par un classique court-circuit médiatique1, les dogmes négationnistes se sont engouffrés dans l’espace public au risque de le saturer, portés par la figure la plus populaire des néo-prophètes humanitaristes, et à vrai dire leur prototype. Son couplage avec Roger Garaudy, tardif imitateur du « professeur Faurisson », moins directement négationniste que prudemment dubitationniste, dévoile des affinités idéologiques trop souvent méconnues. Car le négationnisme, explicite ou voilé, est inséparable de l’antisionisme radical, postulant que l’État d’Israël n’a pas le droit d’exister, et qu’il est assimilable à un « cancer » (cliché de la propagande antisioniste dans le monde arabe). Le couple mal assorti Garaudy-l’abbé Pierre ne doit pas faire oublier le troisième personnage, Faurisson et sa secte. Le pseudo-expert qui toujours nie les crimes nazis fournit à l’ennemi d’Israël l’arme absolue qui lui manquait dans son entreprise de totale délégitimation. Au message diabolisateur d’un certain antijudaïsme chrétien (les Juifs « fils de Satan ») s’ajoute le thème d’accusation négationniste : l’État d’Israël serait fondé sur « le plus grand mensonge de tous les temps ». Certes, l’abbé Pierre substitue, à l’accusation traditionnelle de « déicide », celle de génocide, dont il croit trouver la preuve décisive dans le livre de Josué: le crime contre l’humanité, supposé commis originairement par les Juifs, chasse pour un temps le crime contre la divinité. Le peuple « élu » demeure un peuple « maudit », mais pour génocide originel. Du massacre des populations du pays de Canaan à la fondation de l’État d’Israël, l’abbé suggère la récurrence du même geste exterminateur d’un peuple-bourreau", a analysé le politologue et historien Pierre-André Taguieff in "L’abbé Pierre et Roger Garaudy. Négationnisme, antijudaïsme, antisionisme" (Esprit, no 224, août-septembre 1996).
Et Pierrre-André Taguieff de citer l'abbé Pierre : "Dans la lettre qu’il adresse le 15 avril 1996 à Roger Garaudy, l’abbé Pierre évoque ainsi l’une de ses « convictions relatives à la portion juive de l’univers humain »:
Tout a commencé, pour moi, dans le choc horrible qui m’a saisi lorsqu’après des années d’études théologiques, reprenant pour mon compte un peu d’études bibliques, j’ai découvert le livre de Josué. Déjà un trouble très grave m’avait saisi en voyant, peu avant, Moïse apportant des « Tables de la loi » qui enfin disaient : « Tu ne tueras pas », voyant le Veau d’or, or donner le massacre de 3 000 gens de son peuple. Mais avec Josué je découvrais (certes conté des siècles après l’événement), comment se réalisa une véritable «Shoah» sur toute vie existant sur la « Terre promise ». […] La violence ne détruit-elle pas tout fondement de la Promesse? »
Votée à l'initiative de l'abbé Pierre, la loi SRU impose un pourcentage de "logement social" dans des villes. Elle est instrumentalisée par des partis politiques pour modifier la composition socio-démographique de quartiers, et donc faire basculer, par électoralisme, des quartiers en leur faveur. Elle bénéficie davantage aux populations issues de l'immigration.
L’ABBÉ PIERRE, UNE VIE AU SERVICE DE L’ENGAGEMENT
« Henri Grouès naît le 5 août 1912 à Lyon. Il est le cinquième d’une fratrie de 8 enfants. Antoine, le père, est un industriel dans la soierie fortement engagé auprès des plus pauvres. »
« Au début d’août 1942, Henri Grouès est confronté au choix de la clandestinité et de la résistance. Dès lors, les évènements nécessitent que l’Abbé change souvent de nom. Aux derniers jours de l’Occupation, il adoptera définitivement celui d’« abbé Pierre ».
« Au printemps 1945, Pierre-Henri Teitgen, ancien résistant et l’un des fondateurs du Mouvement républicain populaire (MRP) persuade l’Abbé d’être candidat aux premières élections législatives de la République restaurée. Élu à la première Assemblée constituante, il se représentera et sera réélu à deux reprises, jusqu’en 1951. »
« Dès 1947, l’Abbé s’installe avec sa secrétaire personnelle, Lucie Coutaz, à Neuilly-Plaisance pour travailler à l’étage et accueillir des personnes dans le besoin au rez-de-chaussée. Le lieu est baptisé Emmaüs et deviendra la première communauté, avec le début de la chine, l’activité économique de récupération à l’origine des Chiffonniers d’Emmaüs. »
« À l’automne 1951, l’abbé Pierre n’est plus député et le salaire de Melle Coutaz est la seule ressource. Comme cela ne suffit pas, l’Abbé mendie. Auguste Le Gall, l’un des compagnons, a alors une idée : « Quand j’étais dans la mouise, je faisais les poubelles et ça rapporte. » La première communauté Emmaüs se lance dans cette activité économique appelée « la biffe ».
« L’hiver 1953-1954 est terrible, le thermomètre descend à – 15° à Paris. Toutes les nuits, l’abbé Pierre et ses compagnons parcourent les rues et découvrent chaque soir un plus grand nombre de gens désespérés. « J’ai raconté cette histoire horrible : un jour, une vieille femme agonise dans la rue. Mes amis l’emmènent au commissariat pour trouver un peu de chaleur. Trop tard, elle est morte. Dans ses mains, un avis d’expulsion, elle n’avait pas payé son loyer. Ce n’était plus possible. Un ami, Georges Verpraet, journaliste parlementaire, lance alors cette idée d’un appel à la radio. ».
« Cet appel, « l’insurrection de la bonté », provoque un gigantesque élan de solidarité populaire dans lequel l’abbé Pierre préfère voir « l’insurrection de l’intelligence contre l’absurde et pour la justice »
« Par la suite, des opérations de ce type auront lieu, dont celle de l’Opération « Paris vous aide », à la gare d’Orsay, 7 février 1954 : « On a demandé la gare d’Orsay, qui était vacante, mais c’était des tonnages tellement énormes qui étaient apportés qu’on est venu me dire qu’il fallait absolument étayer le sol, depuis les galeries du métro sous la gare, parce que le sol bougeait ».
« À la même période, l’Abbé convoque des entreprises sur le terrain du Plessis-Trévise et les supplie de commencer la construction de petites maisons. Le chantier démarre et soixante- dix jours après, 48 maisonnées sont construites. On loge 48 familles à « la Cité de la Joie ». Le coup d’envoi des cités d’urgence est lancé, l’Appel de l’abbé Pierre déclenche la construction de millions de logements neufs à loyers modérés. »
« L’Appel de l’hiver 1954 résonne partout dans le monde et une longue série de voyages à l’étranger commence pour l’abbé Pierre. En juillet 1963, il traverse le Rio de la Plata (entre Montevideo et Buenos Aires). Le bateau prend feu et l’Abbé survit au naufrage. »
« Le 24 mai 1969, 70 groupes Emmaüs provenant d’une vingtaine de pays présents sur 4 continents répondaient à l’appel de l’abbé Pierre et se rencontraient, pour la première fois, au Parlement fédéral à Berne, en Suisse. Emmaüs International était né.
« En 1985, Emmaüs France verra le jour. « J’ai pris conscience que si j’avais disparu dans l’eau, jamais les hommes et les femmes que je connaissais partout ne se seraient rencontrés les uns les autres. J’étais le seul à connaître tous ces groupes à travers le monde, le seul à savoir tout ce qui se faisait au nom d’Emmaüs. »
« Durant les années 1990, l’Abbé poursuit sa mission et multiplie les actions : Le 14 juillet 1992, il refuse sa nomination au rang de grand officier de la Légion d’honneur. Le 22 décembre 1992 le Haut Comité pour le Logement des personnes Défavorisées est créé, tandis que 6 ans plus tard, la loi du 29 juillet 1998 est votée, relative à la lutte contre les exclusions : son premier article stipule que « la lutte contre les exclusions est un impératif national fondé sur le respect de l’égale dignité de tous les êtres humains et une priorité de l’ensemble des politiques publiques de la Nation ».
« 24 septembre 1993 : L’abbé Pierre s’insurge contre les expulsions et se rend au 41, avenue René Coty, à Paris, afin de soutenir les familles expulsées de l’immeuble par la Ville. »
« Le 3 juin 2005, suite à la création du Haut Comité pour le Logement des Personnes Défavorisées, l’abbé Pierre accepte d’être décoré du titre de grand-croix de la Légion d’honneur par le Président de la République, Jacques Chirac. »
« La loi SRU de 2000, est issue d’un débat national lancé en 1999 concluant à la nécessité de décloisonner la ville en réduisant ses fractures principales, entre générations, géographiques et sociales. Elle vise principalement à répondre à la pénurie de logements sociaux accessibles aux plus modestes et oblige les communes importantes à disposer en 2025 d’au moins 25 % de logements sociaux en résidentiel en agissant sur l’offre, taux abaissé à 20 % pour celles où la demande de logement social est faible. Les communes concernées sont donc plutôt des communes d’une certaine taille dans des territoires où il existe des besoins en logement avérés, mais elles peuvent s’y soustraire par le paiement d’une taxe annuelle. Des objectifs qualitatifs sont également fixés aux communes déficitaires depuis 2014. »
« Il manquera globalement environ 600 000 logements sociaux pour atteindre l’objectif fixé en 2000 à l’horizon 2025. Le dynamisme démographique peut jouer aussi un rôle. »
« La mixité urbaine et sociale recherchée par la loi n’a pas été entièrement atteinte. Dans de nombreuses communes le logement social reste concentré là où le foncier demeure moins cher et plus disponible, renforçant ainsi la ségrégation entre quartiers. »
« Le 22 janvier 2007, l’abbé Pierre s’éteint à l’âge de 94 ans, à l’hôpital du Val-de-Grâce, à Paris. Un hommage lui est rendu à la chapelle du Val-de-Grâce et des obsèques nationales se déroulent le 26 janvier, en la cathédrale Notre-Dame de Paris, en présence du Président de la République, de nombreuses personnalités politiques de tous bords, de nombreux artistes et des différentes confessions religieuses ».
« Son corps repose au cimetière d’Esteville, en Seine-Maritime.
« Sur ma tombe, au lieu de fleurs et de couronnes, apportez-moi la liste de milliers de familles, de milliers de petits enfants auxquels vous aurez pu donner les clés de vrais logements », avait demandé l’abbé Pierre.
Le 22 janvier 2012, le Centre Abbé Pierre Emmaüs, lieu de mémoire, ouvre ses portes à Esteville, à 30 km de Rouen. »
LA FONDATION ABBÉ PIERRE
« La Fondation Abbé Pierre « existe depuis plus de 30 ans (1992), elle a été créée par l’abbé Pierre soucieux que son combat contre la précarité lui survive. Elle a trois principales missions :
- Accompagner les personnes sans-abri dans ses structures d’accueil ;
- Financer plus de 1000 projets, chaque année, conduits par 900 associations de lutte contre la précarité ;
- Et enfin, peser sur le débat public en sensibilisant l’opinion et en interpellant les pouvoirs publics sur la pauvreté et le mal-logement. »
La Fondation Abbé Pierre « est laïque, non partisane et indépendante. Elle agit uniquement grâce aux dons de particuliers et d’entreprises partenaires. »
La Fondation agit directement auprès des personnes en difficulté, en :
- Accueillant les personnes sans abri dans plus de 30 structures en France métropolitaine et à la Réunion ;
- Conseillant juridiquement par plateforme téléphonique, les personnes mal-logées, notamment dans le cadre de procédures d’expulsion (Espace Solidarité Habitat, Allô Prévention Expulsion). »
Du 12 mai au 5 novembre 2023
1, place du Général-Catroux. 75017 Paris
Du mardi au dimanche de 14 h à 18 h.
Le samedi jusqu’à 19 h
Nocturne le premier jeudi de chaque mois jusqu’à 22h : gratuit
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Les citations proviennent du communiqué de presse.
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