Alain Adler (1923-1997) était un résistant, journaliste, puis photographe de plateau talentueux, et enfin libraire français juif d’origine hongroise. La Galerie Roger-Viollet propose l’exposition « ALAIN ADLER - La photographie de cinéma sur un plateau » : « 86 tirages contemporains en édition limitée et numérotées immortalisant les stars emblématiques d’une époque charnière du cinéma marqué par le « qualité française » et l’avènement de la Nouvelle Vague.
« C’est en découvrant dans un magazine, suite à la disparition de Jean-Paul Belmondo, le nom du photographe Alain Adler au crédit d’une photo d’À bout de souffle, que son souvenir est revenu soudainement à ma mémoire. La figure de mon oncle Albert, l’ainé des frères de mon père, celui qui, entré à 19 ans dans la Résistance dès le début de la Seconde Guerre Mondiale, les avait sauvés grâce à ses réseaux FTP-MOI (Francs-tireurs et partisans – Main-d’œuvre immigrée) et ceux de l’OSE (Œuvre de secours aux enfants). Alain était son nom de Résistant. Lui si discret, secret, taiseux, ne racontait rien de sa vie, de ses vies, il tenait probablement de la Résistance cette façon de compartimenter... J’ignorais que la photo avait pris cette importance dans sa vie au point d’en faire son métier pendant dix ans. Son abandon reste tout autant un mystère », s'est souvenu Guillaume Adler, neveu du photographe talentueux injustement méconnu.
Et Guillaume Adler, dont le père et un oncle ont été placés chez des fermiers, juste avant la rafle, par Sabine Zlatin qui co-dirigeait la Maison d'Izieu, de poursuivre : « Alain Adler (1923-1997) est né en Hongrie dans une famille juive qui immigre à Paris dans les années 30. Il suit son cursus scolaire à l’école Maïmonide, quand la guerre met fin à des études prometteuses. Dès 1942, il s’engage dans la Résistance, FTP-MOI, puis FFI (Forces françaises de l'intérieur). Au lendemain de la guerre, il devient rédacteur pour des journaux comme Franc-Tireur ou Renouveau. Très rapidement, pour compléter ses articles il se tourne vers la photographie et est envoyé en reportage sur les plateaux de cinéma ».
« Lors de l’élaboration de l’exposition, mon cousin Yves évoque un dernier carton qu’aurait laissé notre oncle Alain. Dans ce carton s’entassent des dossiers bien rangés et quelques photos en surface, comme celles d’un reportage sur un acupuncteur ou celui sur un radiesthésiste, accompagnés de leur article. Puis des papiers administratifs, des coupures de journaux, des portraits d’acteurs, d’actrices… Voilà donc la façon dont Alain Adler est venu à la photographie, par l’entremise de l’écriture. Les rédactions lui commandant alors des articles illustrés par des photos, plus attractifs. Ouvrant un nouveau dossier, ce sont maintenant des articles de journaux avec leur brouillon, comme un portrait de Corinne Marchand, l’actrice de Cléo de 5 à 7, dont Alain Adler a pris des clichés… », explique Guillaume Adler.
Alain Adler « collabore alors à des magazines comme l’Avant-garde, Ciné-Révélation et Regards, où la photo et le 7e art tiennent une place prépondérante. » Et ce, à une époque où la télévision ne s'est pas encore imposée dans quasiment tous les foyers.
« Du travail d’Alain Adler, il ne subsiste que la période 1954 à 1964, décennie riche en productions, où la Nouvelle Vague émerge à la suite et en opposition au cinéma classique d’après-guerre. »
« De 1954 à 1964, Alain Adler arpente les plateaux de cinéma français riche en productions variées. Des débuts de La Nouvelle Vague (Godard, Truffaut, Chabrol…) en passant par la longévité de la "qualité à la française" (Delannoy, Duvivier, Carné…) contre laquelle elle s’est construite, du cinéma de Jean-Pierre Melville jusqu’aux productions plus légères aux titres évocateurs (Sois belle et tais-toi, Le long des trottoirs, Miss Catastrophe…) qui en disent long sur la place de la femme dans la société », précise Guillaume Alder.
« Les stars emblématiques du moment ou en devenir, défilent devant l’objectif du photographe, Jean Seberg, Brigitte Bardot, Anna Karina, Bernadette Laffont, Corinne Marchand, Jean Gabin, Alain Delon, Jean-Pierre Léaud, Jean-Claude Brialy, Jean-Paul Belmondo… »
« Alain Adler travaille essentiellement pendant les temps morts des tournages. Le décor est en place mais les acteurs « off » et en quelque sorte redevenus un peu eux-mêmes, ayant abandonné, le temps d’une pause, leur personnage filmique. »
« Alain Adler n’est pas un photographe de plateau, c’est un photographe sur un plateau. » Il en montre les coulisses, l'attente des acteurs qui posent ou sont saisis pensifs, dialoguant...
« Le noir et blanc et le format carré 6X6 systématique de ses images, apportent une touche qui lui est propre, une prise de position qui transfigure la vision habituelle des films en 35 mm ou en CinémaScope. De La traversée de Paris (Claude Autant-Lara) à A bout de souffle (Jean-Luc Godard), le travail d’Alain Adler pendant ces dix années est un formidable témoignage, celui du cinéma français en pleine mutation. »
« Sa carrière de photographe de plateau prend fin au milieu des années 60. Il classe alors tirages et négatifs dans deux valises qu’il range au-dessus d’une armoire d’où elles ne bougeront pas pendant presque trente ans. Après avoir ensuite été commercial chez Saunier Duval, il ouvre une librairie dans le 18e arrondissement de Paris. Je me souviens encore quand il m’offrait la moitié du rayon bandes dessinées ou qu’il "virait" volontiers les clients pénibles. Son commerce a tout de même perduré pendant plus de dix ans, notamment grâce aux ventes de cartes topographiques pour randonneurs. Ce n’est qu’au début des années 90 que mon cousin Yves, ayant connaissance des photos et négatifs (plus de 12 000) et sachant notre oncle dans le besoin, lui propose d’aller les vendre à une agence qui prendra soin de son travail en continuant à le faire vivre. L’agence Roger-Viollet s’est naturellement imposée à lui », a précisé Guillaume Adler.
« Les 12 000 photos de cinéma qui demeurent de la carrière d’Alain Adler, ont été acquises par l’agence Roger-Viollet en 1990. »
« Elles sont conservées par la Bibliothèque historique de la Ville de Paris (BHVP) et diffusées en exclusivité par la Galerie Roger-Viollet. »
« Élaborée en collaboration avec Guillaume Adler, neveu du photographe, cette exposition présente plus de 86 tirages contemporains en édition limitée et numérotées. » En 2022-2023, le Cinéma Pathé Les Fauvettes (75013) avait accueilli une exposition d’Alain Adler.
« J'ai rencontré Laurence Patrice, Adjointe à la Maire de Paris en charge de la mémoire et du monde combattant. Elle m'a proposé d'apposer une plaque sur l'immeuble rue Eugène-Sue, où toute la famille Adler a vécu avant et pendant la guerre, appartement récupéré par mon oncle au début des années 1950 et dans lequel il est mort. C'est l'aboutissement total d'une démarche mémorielle. La procédure a été engagée. Nous allons parler avec le syndic de l'immeuble... », m'a confié Guillaume Adler le 15 juin 2023.
A la Galerie Roger-Viollet
6, rue de Seine. 75006 Paris
Tél. : + 33 1 55 42 89 09
Du mardi au samedi de 11 h 00 à 19 h 00. Entrée libre
Visuels :
"Ariane" de Billy Wilder. Audrey Hepburn. France, 6 octobre 1956.
Édition limitée à 30 exemplaires numérotés
"Ce soir ou jamais" de Michel Deville. Françoise Dorléac. France, 1961.
Édition limitée à 30 exemplaires numérotés
Tournage du film "La Belle Américaine" de Robert Dhéry. France, 26 juin 1961.
Édition limitée à 30 exemplaires numérotés
"Ce soir ou jamais" de Michel Deville. Anna Karina. France, 1961.
Édition limitée à 30 exemplaires numérotés
"La Traversée de Paris" de Claude Autant-Lara. Jacques Marin, Jean Gabin et Bourvil. France, 1956.
Édition limitée à 30 exemplaires numérotés
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Les citations proviennent du communiqué de presse.
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