Arte diffusera le 16 février 2022 à 20 h 55 « L'adieu à la nuit » (Abschied von der Nacht) d’André Téchiné. « Le désarroi d’une femme (Catherine Deneuve) confrontée à la radicalisation de son petit-fils (Kacey Mottet Klein)... André Téchiné signe un drame très actuel, qui explore avec justesse la relation complexe entre ses deux personnages. »
Brigitte Bardot
« L’ami Fritz » par Jacques de Baroncelli
Léon Barsacq (1906-1969) : « Maquettes de décors de films »
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Sami Frey
« 1940 - Main basse sur le cinéma français » de Pierre-Henri Gibert
Serge Gainsbourg (1928-1991)
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« La graine et le mulet » d'Abdellatif Kechiche
Diane Kurys
Jean-Pierre Mocky (1929-2019)
Diane Kurys
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Jeanne Moreau (1928-2017)
Bernard Natan (1886-1942)
« Charles Pathé et Léon Gaumont. Premiers géants du cinéma » par Emmanuelle Nobecourt
Des studios Pathé-Albatros à l’Espace Albatros
Les Studios Éclair de 1907 à 2007
Tournages Paris-Berlin-Hollywood 1910-1939
Bernard Natan (1886-1942)
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Joann Sfar, dessinateur et réalisateur
Simone Signoret (1921-1985)
Simone Simon (1911-2005)
Robert Siodmak (1900-1973)
Simone Signoret (1921-1985)
Simone Simon (1911-2005)
Robert Siodmak (1900-1973)
« Alex, la vingtaine, orphelin de mère et brouillé avec son père, rentre de voyage auprès de sa grand-mère qui l'a élevé, gérante d’un centre équestre au pied des Pyrénées. Il ne compte pas rester longtemps : le jeune homme a prévu de repartir – officiellement travailler au Canada – en emmenant avec lui sa petite amie, Lila. »
« Muriel peine à reconnaître son petit-fils, qui se montre agité et mutique. Lorsqu'elle apprend, d’abord avec un étonnement bienveillant, qu’Alex s’est converti comme Lila à un islam rigoriste, elle commence à douter de leurs véritables intentions ».
« Alex est là, mais il semble déjà parti, rejetant une à une ses attaches à la terre de sa famille pour embrasser en secret l’idéal sacrificiel du djihad. Le temps est désormais compté : comment retenir Alex, entraîné dans une mécanique exaltée qui le dépasse ? »
« Pour mieux ancrer dans le réel cette exploration de l’un de ses thèmes fétiches, les errances de la jeunesse – qui se heurte ici à une thématique d’une brûlante actualité –, André Téchiné s’est nourri d’abondantes recherches, notamment des entretiens réalisés par le journaliste David Thomson, spécialiste des djihadistes français ».
« Loin de vouloir expliquer de manière univoque la radicalisation de son personnage, le cinéaste donne épaisseur et vraisemblance à son parcours en peignant par petites touches, avec un regard presque documentaire et une belle humanité, le portrait d’un jeune homme égaré et naïf, fragilisé par le manque affectif, les échecs et le deuil, qui croit trouver son salut dans une idéologie mortifère tout en se débattant avec ses propres contradictions ».
« Aux côtés d’une Catherine Deneuve à la sobriété terrienne dans son rôle de grand-mère combattive et aimante, on saluera la justesse de l’interprétation du jeune Kacey Mottet Klein (déjà dirigé par Téchiné dans Quand on a 17 ans et récemment à l’affiche de L'événement), qui donne toute sa force à ce drame pudique et très actuel. »
Hors compétition, Berlinale 2019
INTERVIEW D’ANDRÉ TÉCHINÉ
« SERGE KAGANSKY : Comment a démarré le projet de L’Adieu à la nuit ?
ANDRÉ TÉCHINÉ : Il y a eu convergence de plusieurs choses. D’abord un livre de David Thomson (Les Français jihadistes, Les Arènes), recueil d’entretiens très bruts, très crus, de jeunes français partis en Syrie faire le jihad. Leurs paroles m’ont fait penser au moment où Jacques Nolot m’avait montré le texte de La Matiouette. Ça m’intéressait de voir si on pouvait incarner ces paroles en mettant en scène des acteurs, si on pouvait transformer ce matériau de reportage en matière de cinéma. Il y avait aussi la question du regard d’une personne de ma génération, d’où la présence de Catherine (Deneuve), avec cette complicité et ce désir de renouvellement qui nous lient depuis longtemps. Je souhaitais un champ/contrechamp entre Catherine et ces dialogues bruts de jeunes jihadistes prélevés directement dans le réel. Enfin, il y avait aussi le motif de la transition juvénile qu’est l’adolescence, avec cette grand-mère qui découvre un aspect de la post-adolescence qui a pris un visage terrifiant. Qu’est-ce qu’on ferait à sa place, face à une telle situation ?
S.G. : L’Adieu à la nuit semble amener un sujet brûlant de l’actualité vers votre univers cinématographique où on retrouve la jeunesse, la famille, les paysages du sud-ouest, les saisons… Aviez-vous conscience de cette convergence entre le sujet « jeunes attirés par le jihad » et vos préoccupations de toujours ?
A.T. : Je n’en avais pas conscience. J’ai co-écrit avec Léa Mysius (réalisatrice de Ava) et c’est elle qui a rédigé le premier jet. J’ai ensuite repris tout ça et j’ai beaucoup travaillé sur le terrain, par rapport au milieu jihadiste dont je n’avais aucune connaissance ni expérience.
S.G. : Éprouviez-vous une crainte à l’idée d’aborder le contexte de la radicalisation religieuse, sujet sulfureux, délicat à manier, objet de multiples polémiques dans les médias ?
A.T. : Pour ces adolescents attirés par le jihad, il y a un « désir furieux de sacrifice ». Je trouvais ça certes brûlant, mais aussi susceptible de ne pas intéresser que moi, mais tout le monde. C’est un sujet clivant et ouvert à la fois. Et ce film ne représente que mon regard sur ce sujet, c’est une proposition de fiction. Quand des adolescents prennent ce nouveau visage « monstrueux », cherchent un nouvel enracinement, c’est comme une conversion maléfique dans un pays inconnu. Cinématographiquement, cela m’amenait vers une dimension de fantastique intérieur.
S.G. : Le film est renoirien au sens où vous ne jugez pas vos personnages et où vous les regardez tous avec la même attention. Les deux jeunes joués par Kacey Mottet Klein et Oulaya Amamra font des choix funestes, condamnables, mais en même temps, vous les montrez habités par un idéal romantique qui les rend troubles, passionnants, ambigus, aussi aimables que détestables. Et à l’inverse, la grand-mère est un personnage bienveillant mais qui a aussi ses zones d’ombres…
A.T. : On s’identifie forcément plus facilement à Muriel, la grand-mère jouée par Catherine. Quand elle prévient la police, c’est un geste de délation mais surtout un geste salvateur, protecteur. J’ai essayé d’éviter la caricature, j’ai recherché la complexité morale en dressant un constat.
Concernant Alex (Kacey Mottet Klein) et Lila (Oulaya Amamra), le processus de déshumanisation dans lequel ils s’engagent est terrifiant, mais en même temps, ils restent humains. À la fin, c’est la liberté de chaque spectateur d’être triste ou soulagé quand le rêve toxique de ces jeunes s’effondre avec l’arrestation.
S.G. : Le film est traversé par une tension, une énergie, un suspens, presque comme dans un thriller…
A.T. : Je voulais montrer ces jeunes dans la situation concrète des préparatifs de leur futur voyage. Comment fait-on pour réunir l’argent, comment on se regroupe, tout cela en se cachant de son entourage, en restant clandestin… Il y avait là des éléments de polar, de film de braquage, sans besoin de forcer sur les codes de genre. Je voulais suivre leur mouvement, suivre leur action.
S.G. : Vous avez évoqué le fantastique et le polar… On pourrait aussi voir un arrière-plan western dans L’Adieu à la nuit. Pourquoi avoir choisi de le situer dans un centre équestre ?
A.T. : Je voulais échapper à la sociologie, au cinéma sociétal, je souhaitais un cadre mythologique. Je recherchais un rapport plus élargi au monde, d’où le règne animal avec les chevaux et le sanglier, le règne végétal avec les fleurs qui deviennent des fruits, et puis le cosmos, l’éclipse… Ça me plaisait aussi que la politique soit absorbée par la religion, et que l’actualité soit transformée en un univers de fiction et de cinéma.
S.G. : L’éclipse au début du film a-t-elle une portée métaphorique au-delà de sa beauté plastique ?
A.T. : Elle a également une portée historique. L’année où se passe le film (2015), il y a bien eu une éclipse au printemps. On peut imaginer ce qu’on veut dans cette éclipse : les choix des jeunes, l’état de la relation entre Alex et Muriel, un changement de jour en nuit. Ce que vivent ces jeunes est très violent. Le psychologue Fethi Benslama l’analyse comme une espèce d’inceste entre Dieu et la personne, une fusion et une confusion où le croyant finit par prendre un pouvoir de vie ou de mort sans limite, absolument effrayant. On est très loin des notions de civilisation et de nation. L’éclipse, c’est ça aussi, l’extinction des valeurs des Lumières.
S.G. : À travers le personnage d’Alex, mais aussi avec Youssef, l’associé maghrébin de Muriel, ou Fouad, l’ex-jihadiste repenti, vous avez voulu montrer que l’appétence pour l’islamisme radical ou son rejet ne sont pas forcément une affaire d’origine ethnique ou sociale ?
A.T. : Fouad est peut-être l’incarnation du destin dont rêve Muriel pour Alex. Dans la documentation que j’ai consultée, les candidats jihadistes français viennent à 60% des classes moyennes, à 30% des classes populaires et à 10% des classes aisées. On voit bien qu’il n’y a pas un profil-type. De plus, je tenais absolument à éviter que les personnages soient des posters sociologiques. Je voulais rester dans la subjectivité et la singularité.
Benslama que je citais à l’instant, parle « d’individus ensauvagés ». Ce phénomène s’est précisé et accéléré depuis 2005 par le biais d’internet.
S.G. : Votre film indique une fracture finalement plutôt générationnelle qu’ethnique ou sociale, ce qui fait penser aux Roseaux sauvages.
A.T. : Les Roseaux, c’était l’intrusion de la guerre d’Algérie dans la France profonde. L’Adieu à la nuit, c’est l’intrusion de la radicalisation islamiste dans une nouvelle France. On peut y retrouver le préjudice causé par le colonialisme (entre autres la guerre d’Algérie) et brandi comme un étendard identitaire et vengeur. Par ailleurs le personnage de Youssef, l’associé de Muriel, est un exemple d’intégration.
S.G. : C’est votre sixième film consécutif avec le directeur de la photo Julien Hirsch. Pourquoi êtes-vous devenus si inséparables ?
A.T. : Longtemps, je tournais avec deux caméras. À un moment, j’en ai eu marre, ça devenait un système. Et puis il fallait faire des économies budgétaires. Avec Julien, avec qui j’ai commencé à collaborer sur Les Temps qui changent, j’ai donc abandonné les plans séquences à deux caméras. Mais pour éviter le caractère mécanique de la répétition des prises (allez, on la refait !), nous avons décidé de changer de grosseurs de cadres et de mouvements d’appareil à chaque nouvelle prise. On ne reproduit jamais le même plan. On ne vise pas la maîtrise, la perfection, mais l’accident heureux, le hasard fécond, le tremblement.
S.G. : Cette fièvre souterraine que l’on ressent en regardant vos films est sans doute due à cette méthode, mais aussi à votre façon de diriger les comédien-e-s. Pouvez-vous parler de ce travail avec les acteurs, en commençant par Catherine Deneuve, avec qui vous en êtes au 8ème film ensemble ?
A.T. : C’est peut-être dans ce film que je lui ai laissé le moins de liberté, j’espère qu’elle n’en a pas trop souffert. Je voulais éviter le risque de refaire la même chose, je craignais la routine de notre savoir-faire commun. Muriel est à la fois solide dans son métier et vulnérable dans la relation à son petit-fils. Je voulais être au plus près de ces sentiments-là, mais je me méfiais de la bonne conscience. Il fallait que Muriel soit complètement désarmée, déroutée, désarçonnée. Elle finit par perdre un peu la raison : elle séquestre Alex, elle ne sait plus comment réagir.
Elle ne cesse de se battre et de se débattre. Il n’était donc pas question de se reposer sur l’acquis de nos expériences antérieures.
S.G. : Pourquoi en avoir fait une grand-mère plutôt qu’une mère ?
A.T. : Elle aurait pu jouer la mère d’Alex mais je préférais qu’il éprouve une lacune à l’endroit de ses parents. La mère est décédée, le père est parti refaire sa vie en Guadeloupe, et cette défaillance parentale fait partie de l’équation subjective du personnage. Son désir de s’enraciner ailleurs vient peut-être en partie de là.
S.G. : Vous retrouvez Kacey Mottet Klein. Est-il le prolongement du personnage de Quand on a 17 ans ?
A.T. : Il a beaucoup changé en deux ou trois ans. Alex est aussi volontaire que le personnage de Quand on a 17 ans, aussi résolu à devenir autre. Dans le précédent film, il ne savait pas qui devenir, alors que là, il le sait trop. Il accomplit avec rigueur tous les gestes et rituels de la nouvelle identité qu’il essaye de se construire. Je trouve que Kacey parvient à transmettre la rigidité d’Alex, tout un dégageant un tourment qui n’appartient qu’à lui.
S.G. : En même temps, il a en lui un reste d’enfance ?
A.T. : Quand il écrit une lettre d’adieu à sa grand-mère, c’est une déclaration d’amour qui lui permet de se livrer affectivement et de redevenir enfant. Bilal, le recruteur joué par Stéphane Bak, a lui aussi ses moments d’humanité : il est froidement déterminé, mais il fume souvent en douce, comme s’il avait du mal à respecter les prescriptions qu’il profère dans ses prédications.
Comme Alex, il reste humain à son insu. Ces jeunes gens font peur à cause de leur idéal mais ils ne sont pas encore totalement des robots, ça tremble encore en eux.
S.G. : Venons-en à Oulaya Amamra… Vous la dirigez dans un registre très différent de Divines, beaucoup plus calme, et elle est toute aussi convaincante.
A.T. : Lila (le personnage joué par Oulaya) est joyeuse, rieuse, ce qui contraste avec l’humeur plus sombre d’Alex, elle s’occupe avec soin et tendresse des pensionnaires de la maison de retraite où elle travaille… Il y a un mélange d’humilité, de gaieté et d’obstination farouche dans son interprétation. Lila est éperdument amoureuse d’Alex, mais dans une perspective très guerrière : elle serait heureuse et fière si Alex mourrait en combattant. Pour elle, la mort n’est pas une mélancolie. Pas de deuil à l’horizon. La mort est vue comme une vie au ciel plus parfaite et désirable que la vie terrestre.
S.G. : La fin du film est très ouverte…
A.T. : À la fin du film c’est le personnage de Fouad qui prend le relais de l’histoire. Fouad revient en France et dans la société parce qu’il a été confronté à la réalité de Daech en Syrie. Cette épreuve de la réalité lui a donné une lucidité et une distance que ne possède pas Alex puisqu’il n’est pas parti. L’avenir d’Alex reste indéterminé tandis que Fouad retrouve la liberté. »
France, Allemagne, 2018, 97 min
Scénario : André Téchiné, Léa Mysius
Production : Curiosa Films, Bellini Films, ARTE France Cinéma, ZDF/ARTE, Legato Films, Films Boutique
Producteur : Olivier Delbosc
Image : Julien Hirsch
Montage : Albertine Lastera
Musique : Alexis Rault
Avec Catherine Deneuve (Muriel), Kacey Mottet Klein (Alex), Oulaya Amamra (Lila), Stéphane Bak (Bilal), Mohamed Djouhri (Youssef), Kamel Labroudi (Fouad)
Sur Arte les 16 février 2022 à 20 h 55, 21 février 2022 à 13 h 35, 27 février 2022 à 13 h 30
Disponible du 09/02/2022 au 17/03/2022
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