Véronique Chemla: Elliott Erwitt (1928-2023), photographe

Elliott Erwitt (1928-2023) est un photographe et producteur télévisuel (Contacts pour Arte) juif américain né en France. Il s’est illustré dans la publicité et comme documentariste, street photographer (photographe de rue, humaniste) par des photographies naïves en noir et blanc saisissant des situations ironiques ou absurdes dans des environnements quotidiens. Il est depuis 1953 membre de l’agence Magnum Photos. Le musée Maillol présente l’exposition « Elliott Erwitt. Une rétrospective ».

« Le cinéma dans l'œil de Magnum » par Sophie Bassaler

« En réalité, dire qu’il y a de l’humanité dans mes photos est le plus grand compliment qu’on m’ait jamais fait. Si mes photos permettent aux gens de voir le monde d'une certaine façon, c'est certainement d'y voir les choses sérieuses d'une manière non sérieuse »

Elliott Erwitt

Elliott Erwitt est né dans une famille juive russe à Paris en 1928. Après avoir séjourné dans différents pays européens (Allemagne, Italie), il se fixe avec sa famille aux Etats-Unis en 1938.

Adolescent vivant à Hollywood, il s'intéresse à la photographie.

En 1948, il étudie le cinéma à la New School for Social Research, à New York. L'année suivante, il sillonne l'Italie et la France qu'il photographie avec son Rolleiflex.

En 1951, durant son service militaire, il assure notamment des travaux de photographie.

"À New York, Erwitt a rencontré Edward Steichen, Robert Capa et Roy Stryker, l'ancien chef de la Farm Security Administration. Stryker a d'abord embauché Erwitt pour travailler pour la Standard Oil Company, où il construisait une photothèque pour l'entreprise, et lui a ensuite chargé d'entreprendre un projet de documentation sur la ville de Pittsburgh."

"Il se tourne ensuite vers le cinéma : dans les années 1970, il produit plusieurs documentaires notables et dans les années 1980 dix-huit films comiques pour HBO. Erwitt est devenu connu pour son ironie bienveillante et pour une sensibilité humaniste traditionnelle à l'esprit de Magnum".

Sa photographie la plus célèbre ou emblématique : "USA. North Carolina" ou "Segregated Water Fountains" (1950). Elle illustre la ségrégation raciale jusque dans les toilettes : pour les Blancs, un lavabo moderne, propre, encastré dans un meuble, et, pour les Noirs, un lavabo ancien, sale. « On voyait ce genre de scène partout dans le Sud dans les années 1950 », a déclaré Elliott Erwitt.

"Elliott Erwitt. Une rétrospective"

Le musée Maillol présente l’exposition « Elliott Erwitt. Une rétrospective », "hommage à l’un des photographes les plus importants du XXème siècle, membre de Magnum Photos depuis 1954". "Humanisme, ironie et humour".

"Le parcours présente son œuvre à travers un ensemble de 215 photographies en noir et blanc et en couleur."

"Photographe américain d’origine européenne, Elliott Erwitt est à la fois un peintre de l’intime, photojournaliste, photographe publicitaire, réalisateur et portraitiste de personnalités comme Marilyn Monroe ou encore Jackie Kennedy, Charles de Gaulle, Ernesto “Che” Guevara, Alfred Hitchcock, Nikita Khrouchtchev…"

"L’exposition rend compte de la diversité des sujets abordés et l’unité profonde de l’œuvre. Il a une manière d’immortaliser des moments de la vie quotidienne avec un regard qui n’appartient qu’à lui, mélangeant humour et émotion."

"À travers une scénographie exceptionnelle, vous découvrez la sensibilité unique du photographe, notamment dans ses clichés en couleurs."

"Visitez également les coulisses du travail du photographe avec l’espace « Fabrique » dans lequel se trouvent des objets destinés à évoquer son studio new-yorkais et l’étendue de ses activités en lien avec la photographie."

"Une exposition réalisée et conçue par Tempora en étroite collaboration avec Magnum Photos et le Musée Maillol." Le Commissariat collectif est assuré par Tempora : Isabelle Benoit, Élie Barnavi, Peter Logan, Benoit Remiche.

« Elliott Erwitt - Silence Sounds Good »

Arte diffusa le 6 juillet 2021 « Elliott Erwitt - Silence Sounds Good », documentaire d’Adriana Lopez Sanfeliu.

« Ancien directeur de l'agence Magnum, devenu célèbre pour ses portraits de onze présidents des États-Unis, ou de stars du cinéma, l'Américain Elliott Erwitt, né à Paris en 1928, s'est aussi distingué par des choix plus politiques ou humanistes, non sans un certain humour. Portrait sensible d'un des plus grands photographes du siècle passé, au regard toujours aiguisé ».

« Il a beau figurer parmi les photographes incontournables du XXe siècle, avec certains de ses clichés devenus iconiques, Elliott Erwitt, à plus de 90 ans, demeure toujours insatiable ».

« Le travail reste sa motivation quotidienne et composer un plan ou orchestrer la sortie de son prochain livre l'occupe presque dix heures par jour ».

« C'est cette passion incandescente pour la "prochaine image" à saisir, cet esprit toujours en marche, que ce film, réalisé par son assistante Adriana Lopez Sanfeliu, se propose d'accompagner, non sans une tendresse manifeste. »

« Ancien directeur de l'agence Magnum, devenu célèbre pour ses portraits de onze présidents des États-Unis ou de stars du cinéma, cet Américain, né à Paris en 1928, s'est aussi distingué par des choix plus politiques (la ségrégation raciale, le Che) ou humanistes (les enfants, les chiens et leurs maîtres), non sans un certain humour ».

"Je mets beaucoup de sérieux à ne pas être sérieux", a-t-il avoué lors d'une rare interview accordée à un journaliste de télévision ».

« Une ironie douce, souvent adressée à lui-même, que parvient à capter Adriana Lopez Sanfeliu en suivant le quotidien de son mentor ».

« Portrait sensible, libre, son film rare – Elliott Erwitt n’aime pas être regardé – fait de la lenteur de son vieux personnage un motif récurrent, et aussi un motif d'étonnement, tant la force qu'il dégage derrière son appareil impressionne. "Le succès, c'est la liberté de pouvoir faire ce qu'on veut à tout moment."

BIOGRAPHIE DÉTAILLÉE

• "1928, 26 juillet : Naissance à Paris de Elio Romano Erwitz, fils d’immigrés juifs russes. La famille émigre bientôt à Milan.

• 1939 : La famille Erwitz part pour les Etats-Unis, où elle devient Erwitt.

• Années 1940 : Le jeune Elliott étudie la photographie et le cinéma au Los Angeles City College et à la New School for Social Research.

• 1949 : Erwitt retourne en Europe et voyage en France et en Italie. Toute sa vie, il sera pleinement, dans sa biographie comme dans son oeuvre, un homme des deux rives de l’Atlantique.

• 1951-1953 : Service militaire. Elliott est assistant photographe dans le corps des transmissions de l’armée américaine en France et en Allemagne.

• 1954 : Retour à New York, où il rencontre trois maîtres du métier : Edward Steichen, Robert Capa et Roy Stryker. Ce dernier l’engage dans un projet pour la Standard Oil Company, puis le charge d’un travail de documentation photographique de Pittsburgh.

A l’invitation de Capa, l’un des fondateurs de l’agence Magnum Photos, il en devient membre. L’agence, dont il assumera la présidence quelques années plus tard, jouera dans sa vie un rôle important. Il se lance dans une collaboration avec des magazines prestigieux : Collier’s, Look, LIFE, Holiday…

• Années 1970 : Erwitt entame une carrière de réalisateur de cinéma et de télévision. Parmi ses films les plus connus : Arthur Penn: the Director (1970), Beauty Knows No Pain (1971), Red, White and Bluegrass (1973), ainsi qu’un documentaire remarqué, Glassmakers of Herat, Afghanistan (1977).

• Années 1980 : Il produit également 17 comédies ainsi que des documentaires à la tonalité satirique pour le Home Box Office (HBO), dont une série sur les loisirs des milliardaires.

• 1988 : Erwitt prend le temps de revenir sur quarante ans de carrière et classe ses photographies, ce qui lui permet de publier de nombreux livres et d’organiser des expositions.

• Années 1990 et 2000 : Intense activité de publication portant sur l’ensemble de son oeuvre (Personal Exposures, 1988 ; Snaps 2001 ; Personal Best 2006 ; Unseen 2007 ; XXL 2012 ; ou des ouvrages portant sur des thématiques particulières, comme les chiens (To the Dogs, 1992 ; Dog Dogs, 1996 ; Woof, 2005 ; Elliott Erwitt's Dogs, 2008), les plages (On the Beach, 1991), les musées (Museum Watching,1998), les enfants (Kids; 2012), les femmes (Regarding Women, 2014) et des villes (Elliott Erwitt's New York, 2008 ; Rome, 2009 ; Paris, 2010).

• 2002 : Médaille du Centenaire de la Société photographique royale de Grande-Bretagne.

• Autour de 2009 : Parution de The Art of André S. Solidor, personnage fictif représentant une caricature de photographe excentrique et prétentieux.

• 2011 : Il reçoit à New York le Prix du Centre international de la photographie pour l’ensemble de son oeuvre.

• 2013 : Publication d’Elliott Erwitt’s Kolor sur ses travaux de commande en couleur.

• 2017 : Elliott Erwitt retourne à Cuba pour la réalisation d’un film souvenir et biographique : Silence Sounds Good.

• 2018 : Voyage en Ecosse pour une commande et publication de Elliott Erwitt’s Scotland.

• 2021 : Publication d’une série de photographies retrouvées dans ses archives : Found Not Lost."

Du 23 mars au 24 septembre 2023