


« Elles ont d'ailleurs accès à des lieux interdits à leurs confrères masculins ».
« Le film entrecroise les portraits de celles qui ont documenté diverses guerres au cours des XXe et XXIe siècles".
Alice Schalek
Alice Schalek (1874-1956), née dans une famille Juive viennoise, a fréquenté le lycée pour filles (Lyzeum) de la Wiener Frauenerwerbsverein (association viennoise pour la promotion du travail des femmes). Elle a débuté comme romancière - elle a publié à l'aube du XXe siècle son premier roman sous le pseudonyme Paul Michaely -, auteur de nouvelles, conférencière, et journaliste notamment pour Neue Freie Presse. Elle était membre du Verein der Schriftstellerinnen und Künstlerinnen in Wien (Association pour les auteurs et les artistes à Vienne). Elle s'était convertie au protestantisme à l'âge de 30 ans.
Sur ses voyages au Japon et en Asie (1903-1914), notamment au Moyen-Orient, Alice Schalek a publié des livres. Parmi les personnalités qu'elle a interviewées : Einstein, Gandhi, Tagore et George Bernard Shaw. En 1914, quand a éclaté la Première Guerre mondiale, elle travaillait pour Schwarz-Gelbes Kreuz, une organization charitable fournissant des repas aux enfants nécessiteux. Alice Schalek a publié peu dans les journaux. A l'été 1915, elle a tenté d'être accréditée comme correspondante de guerre auprès du Kriegspressequartier (KPQ; Bureau de presse de guerre) de l'Empire austro-hongrois. Elle « choqua ses contemporains en photographiant des soldats autrichiens au front » dans leur vie quotidienne.
La première mission d'Alice Schalek ? Le front alpin au sud du Tyrol. Elle se différencie de ses collègues masculins en "donnant un sens à la guerre, décrite comme force pour la modernisation". En octobre 1915, Karl Kraus (1874-1936) l'a critiquée dans Fackel. Selon certains, le fait que Schalek était une femme a joué un rôle dans ses attaques. En mars 1916, Schalek est allée au Front Isonzo. Elle a rassemblé ses photographies en des diapositives pour illustrer ses conférences dans plus de vingt villes. En février 1917, Schalek a été distinguée en étant décorée de la Médaille d'or du Courage (Goldenes Verdienstkreuz mit der Krone) pour sa couverture médiatique. Le succès de ses conférences sur Isonzo a suscité l'ire de politiciens. A la fin de 1916, des parlementaires chrétiens sociaux ont réclamé sa démission comme correspondante de guerre. Comme son mentor, Maximilian von Hoen (1867-1940), avait quitté sa fonction de dirigeant du KPQ au printemps1916, Schalek n'a pas bénéficié de soutien au sein de la direction du KPQ et a du mettre un terme à son travail à la fin août 1917. Après la Grande guerre, Schalek a repris ses activités de femme de lettres. Après l'Anschluss (annexion par l'Allemagne nazie de l'Autriche en 1938), Schalek est demeurée en Autriche où elle a été arrêtée par la Gestapo. Grâce à l'intervention du PEN-Club, elle a pu quitté Vienne en août 1939 et s'est réfugiée aux Etats-Unis, mais n'a pas pu retrouver professionnellement sa position.
Gerda Taro
Gerda Taro (1910-1937) est née Gerta Pohorylle à Stuttgart dans une famille de "modestes commerçants juifs" originaires de Galicie. A l'arrivée au pouvoir d'Hitler en 1933, cette « militante socialiste » a fui l'Allemagne nazie. Avec son amie Ruth Cerf, elle s'installe à Paris où elle survit en exerçant divers métiers. Elle est membre du groupe Leipziger Kreis aux côtés de Trudel Frank-Fromm, Ruth Cerf et Willi Chardack. Le lieu de rendez-vous de ce groupe auquel se joignent des membres du S.A.P en exil, dont Willy Brandt ? Le café Capoulade sur le boulevard Saint-Michel. Gerda Taro collabore comme assistante à l'agence Alliance-Photo fondée par Maria Eisner, Pierre Verger et Pierre Boucher. Alors que Capa utilise son Leica, elle recourt à son Roflex Korelle donnant des photos carrées.
Gerda Taro se lie à un jeune photographe hongrois, Robert Capa, dont elle a contribué à écrire la légende de "photographe américain". Le 4 février 1936, Gerda Taro a obtenu sa carte de presse de l'A.B.C.-Press-Service, agence de photos néerlandaise. Du côté républicain, elle « couvrit la guerre d’Espagne avec son compagnon, le légendaire Robert Capa. Certaines des images attribuées à ce dernier ont d’ailleurs été prises par elle, comme l’ont prouvé des recherches récentes. Elle est morte écrasée par un char allemand, première victime féminine dans l’exercice de ce métier de reporter de guerre ».
Le 1er août 1937, lors de son enterrement au cimetière du Père-Lachaise, son éloge funèbre est dit par Pablo Neruda et Louis Aragon. Sa tombe située près du mur des Fédérés, est conçue par le sculpteur Alberto Giacometti à l'invitation du poète et romancier communiste Louis Aragon : cet artiste "l'orne d'une simple vasque et d'un oiseau mythologique, le faucon Horus, symbole de lumière et de résurrection". En 1938, en hommage à Gerda Taro, Robert Capa a publié "Death in the Making", réunissant leurs photographies communes. Après la mort de Robert Capa en 1954, l'agence Magnum a attribué à Capa des photographies prises par Gerda Taro. Ce n'est que récemment que l'oeuvre de Gerda Taro est sortie de l'oubli.
Lee Miller
Alice Schalek



Gerda Taro



Lee Miller



Christine Spengler

Diverses expositions, notamment à la Maison européenne de la photographie, lui ont été consacrées.

Dans quelles conditions ces femmes photographes de guerre travaillent-elles ? En moins d’un siècle, leur condition s’est fragilisée avec le déclin des médias imprimés en termes de tirages, de lecteurs et de budgets. Et les chaines d’informations s’avèrent timorées, et privilégient le live multirediffusé du blablabla d’« experts » chargés de commenter… des commentaires. Ces professionnelles prennent des risques pour informer sur des conflits ou famines, mais parfois sans l’accord de grands médias principalement intéressés par le Proche-Orient, en étant mal payées...
D'où l'importance pour ces photographes, hommes et femmes, des livres et des expositions de photographies pour valoriser leur oeuvre : « Gaza 2010 » de Kai Wiedenhöfer, Peurs sur la ville. Photographies historiques, réelles et imaginaires...
D'où l'importance pour ces photographes, hommes et femmes, des livres et des expositions de photographies pour valoriser leur oeuvre : « Gaza 2010 » de Kai Wiedenhöfer, Peurs sur la ville. Photographies historiques, réelles et imaginaires...
Allemagne, 2016
Sur Arte le 4 juillet 2018 à 22 h 40
Visuels :
La photographe Camille Lepage à Bunga Bunga, en République centrafricaine, Octobre 2013
© SWR/Sylvain Cherkaoui/Cosmos
Christine Spengler vit et travaille entourée de ses photos de guerre.
La photographe de guerre française Christine Spengler devant un portrait d'elle en Iran en 1979
© SWR/Sigrid Faltin
La photographe de guerre française Christine Spengler devant la tombe de sa collègue Gerda Taro
© SWR/Thomas Einfeldt
Articles sur ce blog concernant :
Les citations sur le documentaire sont d'Arte.
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