La galerie Frank Elbaz présente l’exposition Des galeries d’art sous l’Occupation, une histoire de l’histoire de l’art, sous le commissariat de l’historienne Emmanuelle Polack. L’histoire du marché de l’art à Paris sous l’Occupation : persécution des marchands d’art juifs, pillage de leurs collections, ventes aux enchères à l’Hôtel Drouot… Une histoire longtemps taboue, puis analysée après la publication dans les années 1970 de livres majeurs et la survenue en 2012 de l'affaire Gurlitt.
La Collaboration 1940-1945
Depuis les années 1990, nombre d’historiens ont étudié la spoliation des « biens Juifs » dans l’Europe nazie pendant la Seconde Guerre mondiale.
Une étude tardive de l’« aryanisation économique »
En 1995, dans la première édition de son livre-enquête Le musée disparu, enquête sur le pillage des œuvres (éd. Austral), Hector Feliciano évoquait un sujet tabou : le pillage des œuvres d’art.
Plusieurs pays, dont la France, ont été interpellés sur la destinée des biens et avoirs ayant été volés aux Juifs pendant ce conflit.
Depuis une vingtaine d’années, des études ont été consacrées à ce sujet. Ont été mis en relief les buts et effets de l’« aryanisation » (exclusion sociale, spoliation, etc.), en particulier lors de la mise en œuvre de la politique génocidaire nazie.
Lors de son discours en 1995, le Président de la République Jacques Chirac a reconnu la responsabilité de la France dans la déportation des Juifs lors de la Shoah. (Holocaust)
Au cours des années 1990, des ouvrages fondateurs ont décrit le pillage des œuvres d’art détenues par des marchands d’art et collectionneurs juifs ainsi que par des musées européens.
En 1993, sortait L'Art de la défaite (1940-1944) de Laurence Bertrand Dorléac. « De 1940 à 1944, personne n’échappe au chaos, et surtout pas les artistes convoqués au chevet de la nation malade. Qu’il s’agisse de l’occupant, de l’État français, de la critique, du public et des artistes eux-mêmes, tous sont assurés que l’art doit conjurer la crise en édifiant les foules et en soignant les âmes. La vie artistique continue, les expositions attirent du monde, le marché de la peinture est florissant, la décentralisation populaire bat son plein. Il n’empêche, des ruptures de taille assombrissent radicalement le paysage de l’avant-guerre. L’exil des modernes, l’exclusion des artistes juifs et maçons, la mise au ban de Picasso, la corporation des peintres et des sculpteurs, Vlaminck, Derain, Van Dongen et d’autres invités par le Reich à visiter l’Allemagne, les titans de Brecker à l’Orangerie des Tuileries, la complicité d’une partie des élites : pour la première fois, ce livre retrace avec précision ce que fut la France artistique des années noires et une situation d’exception où l’art joua gros – sa liberté. En s’attachant à cet aspect méconnu de la vie culturelle, l’auteur éclaire de façon inédite le « cœur du système » – le régime de Vichy et la politique de l’occupant –, mais aussi l’imaginaire des Français : leurs nostalgies, leurs peurs et leurs espoirs ».
En 1994, a été publié The Rape of Europe. The Fate of Europe's Treasures in the Third Reich and the Second World War (Le Pillage de l'Europe - Les œuvres d'art volées par les Nazis), de Lynn Nicholas. Cet ouvrage analysait ce pillage et les efforts déployés pour récupérer les œuvres volées à leurs propriétaires : collectionneurs et marchands d’art juifs, musées nationaux, etc.
En 1995, le livre-enquête d’Hector Feliciano Le musée disparu, enquête sur le pillage des œuvres (éd. Austral) évoquait ce sujet longtemps tabou : le pillage des œuvres d’art – tableaux, manuscrits, meubles, etc. – appartenant à des marchands d’art - Paul Rosenberg et Bernheim-Jeune - ou collectionneurs Juifs - banquiers David-Weill, dynastie Rothschild, famille Schloss, Alphonse Kann, financier Fritz Gutmann, Jacques Stern, Alfred Lindon - par les Nazis, aidés par des commissaires-priseurs ou des marchands, et suivant un plan établi avant la Seconde Guerre mondiale. Le journaliste Hector Feliciano décrivait les difficultés des familles Juives spoliées sous l’Occupation pour récupérer leurs œuvres, les oppositions de musées français à ses recherches, l’absence de diligence de certaines institutions culturelles pour rechercher après-guerre les ayants-droit à qui restituer les œuvres, etc. Un livre passionnant réédité dans une version augmentée en 2009.
Au cours des années 1990, des ouvrages fondateurs ont décrit le pillage des œuvres d’art détenues par des marchands d’art et collectionneurs juifs ainsi que par des musées européens.
En 1993, sortait L'Art de la défaite (1940-1944) de Laurence Bertrand Dorléac. « De 1940 à 1944, personne n’échappe au chaos, et surtout pas les artistes convoqués au chevet de la nation malade. Qu’il s’agisse de l’occupant, de l’État français, de la critique, du public et des artistes eux-mêmes, tous sont assurés que l’art doit conjurer la crise en édifiant les foules et en soignant les âmes. La vie artistique continue, les expositions attirent du monde, le marché de la peinture est florissant, la décentralisation populaire bat son plein. Il n’empêche, des ruptures de taille assombrissent radicalement le paysage de l’avant-guerre. L’exil des modernes, l’exclusion des artistes juifs et maçons, la mise au ban de Picasso, la corporation des peintres et des sculpteurs, Vlaminck, Derain, Van Dongen et d’autres invités par le Reich à visiter l’Allemagne, les titans de Brecker à l’Orangerie des Tuileries, la complicité d’une partie des élites : pour la première fois, ce livre retrace avec précision ce que fut la France artistique des années noires et une situation d’exception où l’art joua gros – sa liberté. En s’attachant à cet aspect méconnu de la vie culturelle, l’auteur éclaire de façon inédite le « cœur du système » – le régime de Vichy et la politique de l’occupant –, mais aussi l’imaginaire des Français : leurs nostalgies, leurs peurs et leurs espoirs ».
En 1994, a été publié The Rape of Europe. The Fate of Europe's Treasures in the Third Reich and the Second World War (Le Pillage de l'Europe - Les œuvres d'art volées par les Nazis), de Lynn Nicholas. Cet ouvrage analysait ce pillage et les efforts déployés pour récupérer les œuvres volées à leurs propriétaires : collectionneurs et marchands d’art juifs, musées nationaux, etc.

A la suite du débat ouvert par les révélations de ce livre, la France instituait en 1997 une Mission d’étude sur la spoliation des Juifs de France, dite « Mission Mattéoli », et restituait des œuvres d’art.
La « Commission Matteoli » (1997-2000)
La Mission d’étude sur la spoliation des Juifs en France - ou « Commission Matteoli » - a été établie en mars 1997 par Alain Juppé, alors Premier ministre, et présidée par Jean Mattéoli, ancien déporté résistant et ancien ministre.
En étaient membres : Ady Steg, Jean Favier, Jean Kahn, Serge Klarsfeld, Alain Pierret, François Furet et Annette Wieviorka, rejoints en 1998 par Claire Andrieu et Antoine Prost.
Le but : « déterminer, à partir de l’examen des différents fonds d’archives, et en particulier ceux du Commissariat général aux Questions Juives et du service de restitution des biens des victimes des lois et mesures de spoliation, les conditions dans lesquelles les spoliations organisées dans le cadre de la législation de Vichy ont eu lieu et ce qui a pu être restitué ».
Remis le 17 avril 2000, le rapport soulignait « l'ampleur de la spoliation qui a frappé la population juive en France, environ 330 000 personnes en 1940, une spoliation lancée par les Allemands nazis « en zone Nord dès le début de l'Occupation, assumée par Vichy et étendue par lui à l'ensemble du territoire national à partir de juillet 1941 ».
Ce rapport révélait « la multiplicité et la complexité des mécanismes de la spoliation qui a touché tous les secteurs de l'économie à l'exception du secteur primaire, toutes les branches de la fonction publique, de l'industrie, du commerce et des services, secteur public et secteur privé confondus :
- 80 000 comptes bancaires et environ 6 000 coffres bloqués ;
- 50 000 procédures « d'aryanisation » engagées ;
- plus de 100 000 objets d'art ainsi que plusieurs millions de livres pillés ;
- 38 000 appartements vidés ».
Ce rapport prouvait que la « restitution effectuée après la Seconde Guerre mondiale a été importante, mais incomplète, que l'administration des Domaines a procédé de façon un peu trop hâtive à la vente d'objets divers appartenant à des Juifs, et que les musées de France n'ont pas mené avec suffisamment de détermination la recherche en propriété concernant les œuvres et objets d'art qui leur ont été confiés ».
Il a recommandé la création de deux organisations :
- la Commission d’indemnisation des Victimes de Spoliations, pour compléter le dispositif d’indemnisation mis en place après la Seconde Guerre Mondiale.
- la Fondation pour la Mémoire de la Shoah , présidée dès 2000 par Simone Veil, puis depuis 2007 par David de Rothschild, et dont le vice-président est Serge Klarsfeld. Lui ont été versés les fonds des Juifs spoliés sans ayant droit et gardés indûment par les administrations de l’Etat et les établissements financiers français.
Expositions




En 2012-2013, le Musée d’art moderne de Paris a présenté L’Art en guerre France 1938-1947 - De Picasso à Dubuffet. « Près de 400 œuvres de plus de 100 artistes étaient présentées, complétées par de nombreux points documentaires et filmiques inédits. Rassemblées et commentées en 10 séquences fortes, elles expliquaient comment, dans un contexte menaçant d’oppression et de pénurie (entre 1938 et 1947), les artistes ont modifié en profondeur les contenus et les formes de l’art en France ».
En 2012, ont été découverts chez Cornelius Gurlitt”, fils d’Hildebrandt Gurlitt (1895-1956), “marchand d’art qui fut complice des nazis, de 1406 tableaux dont la provenance n'est toujours pas élucidée”, et dont une grande partie provient vraisemblablement de collections de Juifs spoliés. Cornelius Gurlitt est mort à 81 ans, le 5 mai 2014, dans son appartement de Schwabing près de Munich, après une opération cardiaque. Le 24 novembre 2014, le Musée des Beaux-arts de Berne a déclaré qu'il acceptait l'héritage de Cornelius Gurlitt, un « trésor » de "1620 gravures, dessins, aquarelles et une dizaine d'huiles découverts, dont 630 à la provenance régulière" et d'autres volées à des Juifs par les Nazis. La valeur de ce trésor ? Plusieurs millions d'euros.



L'exposition retrace le parcours tragiques de certains galeristes, dont René Gimpel, déporté au camp nazi de Neuengamme où il sera assassiné, et Jadwiga Zak, qui avait présenté en 1929 la première exposition à Paris de Kandinsky, et a été déportée au camp nazi d'Auschwitz où elle est tuée en 1943.

A la galerie Frank Elbaz, Paris
66, rue de Turenne, 75003 Paris – France
Tél. : +1 48 87 50 04
Du mardi au samedi de 11 h à 19 h
Visuels : © Raphaël Fanelli
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