mardi 31 janvier 2017

Pierre sur pierre. Fragments de la culture rurale des Juifs de Hongrie


L’Institut hongrois a présenté l’exposition itinérante Pierre sur pierre. Fragments de la culture rurale des Juifs de Hongrie (Kő kövön. Töredékek a magyar vidéki zsidóság kultúrájából) conçue par le Musée d’ethnographie de Budapest (Néprajzi Múzeum) en Hongrie. Pour évoquer la Shoah, ce musée fait revivre « l’univers rural des Juifs hongrois » avant la destruction des Juifs d’Europe « à partir des objets conservés dans les collections du musée ». Un intérêt indéniable, inconciliable avec les tentatives de réécrire l’Histoire de la Hongrie lors de la Deuxième Guerre mondiale : Mémorial, projets de statues réhabilitant des antisémites, etc. Le 31 janvier 2017, à 12 h 30, le Lieu d'Europe à Strasbourg présentera la mini-conférence sur «  La mémoire hongroise de la Shoah depuis 1945 et les mémoriaux » : "A partir de photos de mémoriaux de la Shoah à Budapest, Fabienne Regard aborde l’histoire de la Shoah en Hongrie, la personnalité de quelques figures emblématiques comme celle de Carl Lutz et Raoul Wallenberg ainsi que l’évolution de cette mémoire depuis 1945". La conférence sera suivie d’une visite guidée de l’exposition sur les lieux de mémoire de la Shoah. Fabienne Regard est historienne, docteur en sciences politiques et enseigne à l’Université Elie Wiesel à Paris. Experte au Conseil de l’Europe entre 2005 et 2012, elle a assuré la coordination scientifique du programme « Transmission de la mémoire de l’Holocauste et prévention des crimes contre l’Humanité : une approche transversale ».


Le Musée d’Ethnographie de Budapest (Hongrie) « invite le visiteur à se plonger dans l’univers rural des Juifs hongrois avant l’Holocauste, qu’elle tente de faire revivre à partir des objets conservés dans les collections du musée. Les « études de cas » qui constituent la trame de l’exposition présentent la vie quotidienne des juifs, leurs relations avec le reste de la société hongroise, les caractéristiques distinctives de cette culture unique et les différentes voies (directes et détournées) que leur communauté a pu emprunter, entre tradition et modernité ; mais elles évoquent aussi certaines manifestations de la survie et même de la renaissance de la culture juive en Hongrie ».

Les « commissaires de l’exposition sont pleinement conscients du caractère fragmentaire tant de la forme que du contenu de leur approche. Notre connaissance de l’époque considérée est fragmentaire, et notre collection est également fragmentaire. Et de fait, c’est en observant ces fragments, en identifiant ceux qui ont disparu et ceux qui nous ont été légués que nous pourrons le mieux comprendre cet univers. Dès lors, notre intention n’est pas de donner une image exhaustive de cette culture mais plutôt de montrer qu’il est difficile de la reconstituer aujourd’hui, qu’il n’est plus possible de la représenter dans son intégralité mais qu’elle ne peut qu’être évoquée au travers de quelques-uns des éléments qui la composent ».

Hàndler et négociants
"Au cours de la seconde moitié du 19ème siècle en Hongrie, les juifs ont comblé un vide dans le domaine du commerce : ils négociaient les produits agricoles, servaient d’intermédiaire pour les échanges entre la Hongrie et les autres États de la Monarchie austro-hongroise et ils fournissaient également les populations rurales en produits alimentaires et industriels. Ils vendaient leurs marchandises à crédit, ils prêtaient de l’argent et, grâce à leurs relations à l’étranger, ils effectuaient même des transactions financières internationales. L’essor du commerce a favorisé l’immigration massive vers la Hongrie des juifs originaires des pays d’Europe orientale. Ce processus s’est accompagné d’une assimilation progressive, et donc d’une acculturation rapide d’une fraction importante de la population juive. Nombreux étaient ceux qui délaissaient leur village pour aller habiter en ville ; la différenciation sociale à l’intérieur de la population juive s’est peu à peu accentuée. On y rencontrait tant des colporteurs, des marchands faisant du porte-à-porte ou des tenanciers de tavernes au train de vie modeste que de riches négociants, pionniers du commerce capitaliste".

"Les hàndler, les boutiquiers et les commerçants juifs du village étaient des figures emblématiques de la vie rurale en Hongrie. Le brocanteur, le fripier (hàndler) faisait du porte-à-porte pour acheter des objets qui ne servaient plus à rien : fripes et restes de matériaux bruts (peaux, duvet, chiffons, os, etc.). Les gros commerçants juifs étaient principalement implantés dans les grandes villes, en particulier à Budapest".

"Au début du 20ème siècle, il y avait au moins une famille juive dans presque tous les villages de Hongrie. Ils tenaient la boutique et, dans la plupart des cas, la taverne du village. Ils jouaient un rôle très important, notamment dans les communes qui se trouvaient au carrefour de plusieurs grandes routes, dans celles qui pratiquaient la monoculture ou dans certains villages qui se distinguaient par des activités culturelles particulières".

"Étroitement lié au commerce, l’octroi de crédit était un bon moyen pour maintenir le contact entre les commerçants juifs et leurs clients. Néanmoins, malgré le grand nombre d’exemples positifs, force est de constater qu’un lien de dépendance inégalitaire s’établissait souvent entre le créancier et son « client », ce qui est peut-être à l’origine des relations quelque peu antagonistes qu’entretenaient les villageois et les marchands juifs".

"Ainsi par exemple dans la petite ville de Mezőkövesd, pendant toute la période de l’entre-deux-guerres, c’étaient essentiellement les Juifs qui s’occupaient de la négociation d’objets brodés. À partir du 19ème siècle, un nombre croissant d’entre eux s’y sont installés et ont constitué en peu de temps une classe sociale très mobile qui a rapidement adopté le mode de vie de la bourgeoisie. À cette époque, près de vingt pour cent de la population active juive travaillait dans le commerce d’objets brodés. Ils vendaient les matières premières, achetaient les différents produits de broderie artisanale, devenus symbole national, confectionnés par la communauté matyó et les revendaient dans d’autres régions du pays et même à l’étranger. C’est ainsi que cet art populaire est devenu l’un des éléments essentiels de décoration des intérieurs bourgeois. Et, c’est ainsi que les Juifs ont en quelque sorte contribué à façonner les éléments décoratifs et chromatiques de la broderie des Matyó".

Le schulklopfer et la synagogue
« Qu'elles sont belles, tes tentes, ô Jacob ! Tes demeures, ô Israël ! » (Exode 24:5)

"Partout, Les Juifs vivant en diaspora cherchaient à s’installer à proximité les uns des autres ; avant tout, ils espéraient ainsi pouvoir bénéficier de la solidarité de la communauté et observer plus facilement les préceptes religieux".

"Les communautés juives qui ont commencé à se développer à partir du 18ème siècle ont progressivement construit leurs édifices de culte et les bâtiments indispensables à leur vie commune un peu partout sur le territoire de la Hongrie historique. Des centaines de synagogues somptueuses, des bains rituels, des écoles confessionnelles, des abattoirs kasher et des sièges de sociétés ont été édifiés d’après les plans des architectes les plus renommés de l’époque. Les maisons d’habitation, les magasins et les centres locaux de vie communautaire étaient installés les uns à côté des autres, dans la même rue ou le même quartier. Si, contrairement à d’autres régions d’Europe de l’Est, le shtetl n’a jamais été une forme communautaire typique des Juifs de Hongrie, dans de nombreuses villes, ils vivaient pourtant à l’écart du reste de la population locale. Le judenhof qui abritait plusieurs familles et disposait d’une synagogue construite au fond d’une cour spacieuse, fermée et entourée de plusieurs bâtiments, était une forme d’habitation très répandue, en particulier en Ukraine subcarpatique. Elle était caractérisée par l’emplacement souvent central de la synagogue autour de laquelle s’organisait l’espace. Le rabbin et le bedeau habitaient près de la synagogue qui accueillait aussi l’école primaire (le heder) et le centre d’études religieuses supérieures (la yechiva). Le plus souvent les bâtiments des services sociaux de la communauté, le bain rituel, ainsi que les magasins et les ateliers nécessaires pour satisfaire aux prescriptions alimentaires particulières étaient installés près de la synagogue".

Les "familles juives qui vivaient dans des villages plus petits ne pouvaient bénéficier du soutien d’une vaste communauté solidaire, ni des services de ses infrastructures confessionnelles. Le plus souvent plusieurs villages se regroupaient pour entretenir une même synagogue ou un mikve. Dans les villages les enfants juifs fréquentaient les mêmes écoles que les élèves chrétiens, et le mashguiah se déplaçait pour assurer sur place l’abattage rituel avant les fêtes. Les épiceries et les tavernes entretenues par des Juifs se trouvaient le plus souvent à un endroit central, dans des bâtiments dans lesquels vivaient également des familles".

Aliments kasher et tréfli
« Tu ne cuiras pas le chevreau dans le lait de sa mère » (Deutéronome 14:21)

Le "terme kasher veut dire « apte », « convenable » à la consommation. En yiddish, le mot tréfli désigne tout ce qui n’est pas kasher, ce qui est impropre à la consommation humaine. La kascherout est un régime très complexe de règles alimentaires, socle de l’identité religieuse et du style de vie traditionnel juifs. Les prescriptions alimentaires édictent minutieusement les règles à suivre pour la préparation et la consommation des aliments et des plats. Une stricte séparation est établie entre les animaux consommables et les animaux impropres à la consommation. Parmi les quadrupèdes sont kasher les ruminants à sabots fendus, les volailles domestiques et les poissons à écailles et nageoires. La consommation du porc, du cheval, du lapin (lièvre), de la plupart des oiseaux sauvages et, parmi les poissons, celle du poisson-chat par exemple, sont interdites. Aucun des animaux à consommer ne peut souffrir d’infirmités externes ou internes, toute cassure ou blessure les rend « tréfli ». Tous les détails de l’abattage sont régis par des règles minutieuses. Dans les communautés juives traditionnelles, c’est le mashguia, représentant de la communauté, qui est chargé d’accomplir ce travail demandant beaucoup de rigueur et de précision".

"Afin d’éviter la consommation d’insectes illicites, on évite tous les légumes difficiles à nettoyer, les fruits qui risquent de contenir des vers, et pour ces derniers, on s’efforce même de les tenir à l’écart des enfants. Les prescriptions rituelles concernent également le traitement et la consommation du lait.
Seul le lait des espèces licites, considérées comme kasher, et les produits lactés sans additif d’origine animale sont propres à la consommation. Les produits carnés ne peuvent pas être consommés en même temps que des produits lactés. Une séparation totale des deux types de produits doit être observée : une batterie de cuisine et des ustensiles différents doivent être utilisés. Cette règle s’applique tant au stockage et à la préparation, qu’à la consommation et au lavage de la vaisselle. Dans les foyers kasher de Hongrie, cette séparation passe également par l’utilisation de deux jeux distincts de vaisselle et de torchons. Si jamais par inadvertance des ustensiles des deux jeux sont intervertis, ils doivent être jetés à la poubelle ou purifiés, « rekashérisés ».

"Aux deux familles de produits lactés et carnés s’ajoute celle des produits neutres (parve) qui peuvent être associés au lait et à la viande. Celle-ci comprend par exemple les fruits et les légumes, le sel, le sucre, les épices, le pain et les céréales, le poisson, l’œuf et le miel".

"Avant la Shoah dans la Hongrie rurale, la cuisine kasher de la maîtresse de maison obéissait non seulement aux prescriptions religieuses, mais elle dépendait également de l’abondance ou de l’absence de matières premières autour de la maison et des ressources financières de la famille. Tandis que les abattoirs des villes offraient de la viande de bœuf et de mouton, les femmes dans les villages devaient le plus souvent se contenter de volailles. Les soupes et les sauces préparées à partir de fruits et de légumes occupaient une place primordiale dans l’alimentation quotidienne".

Les "plats les plus connus de la cuisine juive traditionnelle sont préparés pour le shabbat et les fêtes. Tel est par exemple le cas de la hallah, un pain brioché tressé parsemé de graines de pavot. Mais il existe d’autres plats de fête traditionnels comme les boulettes de matzot pour Pessah ou les carottes à la cannelle et aux pruneaux du Nouvel An".

Dès le XIXe siècle, la "maîtresse de maison a pu disposer de livres de cuisine et d’économie domestique consacrés à la cuisine kasher, et les magazines se sont mis à proposer des rubriques spécialisées sur ces thèmes. Dans les grandes villes de province s’ouvraient un peu partout des restaurants kasher ainsi que des épiceries et des boucheries offrant des spécialités juives à leur clientèle".
Főszöveg

Plaques ornementales de mizrah et bénédiction
« Tu ne te feras point d'image taillée » (Exode 20 : 4)

"Dans la culture juive, l’interdiction de représenter les images trouve son origine dans le deuxième des dix commandements. Il s’agit pourtant d’une question relativement complexe dans la tradition hébraïque : l’application de cette prescription a évolué au fil du temps, elle dépend également de la situation géographique et varie toujours aujourd’hui d’une communauté à l’autre. On trouve par exemple des représentations d’animaux et de figures humaines dans certaines synagogues antiques et dans certains livres hébreux illustrés. La plaque murale pour marquer l’est ou mizrah est l’un des éléments décoratifs les plus répandus dans les communautés juives. Mizrah en hébreu signifie l’Orient. Dans la tradition du judaïsme européen, ce point cardinal revêt une importance particulière, puisqu’il symbolise traditionnellement la direction de Jérusalem. Les synagogues sont orientées vers l’Orient (vers Jérusalem), l’Arche d’alliance est placée dans le mur oriental de la synagogue, et on prie en se tournant vers l’Est. C’est pourquoi, la coutume veut que sur le mur oriental des maisons juives et des synagogues, devant le pupitre de prières, soient disposées des plaques ornementales pointant vers le mizrah. Au centre de ces plaques est inscrit le mot « mizrah », souvent entouré de très belles illustrations micrographiques figurant des symboles juifs (une menorah, les Tables de la Loi, deux lions soutenant une couronne), mais il est aussi fréquent que l’écriture soit utilisée pour dessiner des motifs floraux. L’art de la micrographie, dans lequel des textes sacrés écrits en lettres presque microscopiques forment divers motifs, permet de se conformer parfaitement à l’interdiction de représentation. Des motifs créés sur la base de cette technique apparaissent dès le 18ème siècle dans les synagogues et les foyers juifs".

"L’idée d’un Dieu omniprésent qui protège et subvient aux besoins des habitants du foyer est un concept courant dans les religions monothéistes. Les bénédictions qui y sont associées sont populaires et répandues dans les familles protestantes, catholiques et juives. La plus courante de ces bénédictions est celle qui commence par « Là où est la foi, est aussi l’affection... », traduction fidèle du haussegen traditionnel allemand. Dans des milieux non-juifs, le texte de la bénédiction était au début peint directement sur le mur ou gravé dans la poutre. Ensuite, aux 18ème et 19ème siècles, les vitraux qui, à côté des représentations figuratives, contenaient aussi le texte de la bénédiction ont connu leur âge d’or. Avec le développement de l’imprimerie, la technique du pochoir devient populaire, les textes des bénédictions imprimés avec ce procédé sont très souvent offerts en cadeaux de noces et entrent ainsi dans les foyers de toutes les strates sociales. La tradition de la bénédiction du foyer se répandit dès la fin du 19ème siècle, sous l’influence allemande, pour devenir courante dans les maisons des familles hongroises. Grâce au pochoir, les éditeurs reproduisaient en grande quantité les mêmes textes de bénédiction dans différentes langues. La présence de textes de bénédiction identiques écrits en yiddish ou en hébreu dans les maisons des familles juives témoigne, d’une part, des racines communes des traditions du judaïsme et de la chrétienté et, d’autre part, de la coexistence des deux communautés".

"Pour les mêmes raisons, dans les milieux hassidiques, des tableaux apotropaïques sur lesquels étaient écrites ces paroles protectrices étaient provisoirement accrochés aux murs dans la chambre de la femme en couches dans le but d’écarter les démons loin de la mère et de l’enfant".

"À partir de la fin du 19ème siècle en Hongrie, des images de rabbins et essentiellement des clichés photographiques de rabbins hassidiques (rebbe) commencent à faire leur apparition dans les maisons des juifs pratiquants. C’est à cette même époque que les Juifs assimilés commencent à accrocher aux murs de leurs maisons des reproductions de tableaux de Moritz Oppenheimer et d’Izidor Kaufmann qui évoquent un monde traditionnel juif déjà en voie de disparition".

Cette exposition d’anthropologue dispose de panneaux éclairant sur le judaïsme, ses fêtes, ses rites, le rôle économique des Juifs dans ces sociétés rurales. Elle aurait gagné à être dotée d’une carte et d’une chronologie.

Demeurent des questions : qui étaient ces Juifs vivant en Hongrie rurale ? Des paysans, des bourgeois, des commerçants, des colporteurs ? Ont-ils habité dans des zones spécifiques de Hongrie ? A quand remonte leur implantation dans ces régions rurales ? Est-ce typique d’Europe orientale ? Hormis des rites et fêtes spécifiques, cette culture rurale Juive se différenciait-elle de celle des non-Juifs ? Quels étaient ses rapports avec les Juifs vivant dans les grandes villes hongroises ? Quand et sous quelles modalités ces Juifs ruraux ont-ils été déportés ?

C’est bouleversant de visiter cette exposition sur une civilisation riche, à la spiritualité profonde, aux productions textiles sophistiquées, aux êtres attachants, et exterminée rapidement par les Nazis et leurs collaborateurs hongrois.

Judit Niran Frigyesi
Le 16 février 2016, l’Institut hongrois a proposé la projection du court-métrage Terek, álmok (12 minutes) en présence de sa réalisatrice, Judit Niran Frigyesi, musicologue, ethnomusicologue et écrivain juive hongroise. Une projection suivie d’une table ronde avec la participation de l’écrivain András Forgách et de l’ethnomusicologue Simha Arom, ethno-musicologue ayant retracé dans La fanfare de Bangui sa découverte et son analyse des chants traditionnels d’ethnies pygmées en République centrafricaine.

Auteur d’Écrire sur l'eau, Judit Niran Frigyesi a évoqué sa découverte dans les années 1970 des prières juives dans une ancienne synagogue de Budapest, dans une Hongrie communiste marquée par ses « non-dits » sur la Shoah et les Juifs. Un fait ayant bouleversé la vie de cette hongroise alors laïque.

Il était tentant d’inviter deux musicologues, juifs et originaires d’Europe centrale. Mais pourquoi avoir dressé un parallèle entre les prières juives psalmodiés et les chants polyphoniques des Pygmées ? Cela révèle une incompréhension de la spécificité du judaïsme, des Juifs et de la Shoah.

Il est réconfortant que la Hongrie présente dans un de ses Instituts à l’étranger une telle exposition affirmant la présence Juive dans cet ETat et son lien avec les Juifs et le judaïsme.

Occultations
Mais pourquoi la Hongrie tente-t-elle de réécrire son Histoire lors de la Deuxième Guerre mondiale : en 2014, Mémorial de la Deuxième Guerre mondiale montrant, sur fond de colonnes au style antique, un aigle fondant sur l'archange Gabriel, symbole de la Hongrie. Un monument controversé car il occulte l’alliance de cet Etat avec le IIIe Reich dès 1940. "Pour le gouvernement, il s’agit d’un hommage à l’ensemble des morts de la Seconde Guerre mondiale. Pour ses opposants, l’édifice illustre le discours de la droite et de l’extrême droite magyares, selon lequel les Allemands, arrivés en Hongrie en 1944, sont les seuls responsables du génocide de plus de 500 000 Juifs, et de la mort de nombreux Hongrois non juifs. Rien de plus faux pour l’historien Krisztián Ungváry : « 99 % des victimes étaient des Juifs, déportés par des autorités hongroises enthousiastes, et ce sont des Hongrois qui ont profité de ces déportations. » Pour Gergely Karácsony, politicien d’opposition, « Orbán mène deux politiques : d’une part il affirme son pouvoir autoritaire, d’autre part il crée des symboles porteurs d’un nationalisme mensonger. Cet édifice est un lien parfait entre les deux. » Dénonçant ce monument qui « met sur le même plan les souffrances des Hongrois causées par l’occupation et l’Holocauste », l’éminent historien américain Randoph L. Braham a renvoyé une distinction à Budapest. Comme l’avait fait le Prix Nobel de la paix et survivant de l’Holocauste, Elie Wiesel, en 2012, pour protester contre le retour du culte de l’amiral Horthy et la réhabilitation d’intellectuels fascistes". (Libération, 15 avril 2014)

En signes d’opposition à ces occultations historiques du rôle de la Hongrie dans la déportation d’environ 600 000 Juifs hongrois vers les camps nazis d’extermination, des Hongrois indignés se relaient et des touristes se rendent devant ce Mémorial à Budapest, en déposant des valises, des photos… Un "contre-Mémorial".

Ont ensuite été annoncés des projets de statues réhabilitant des antisémites.

Le projet visant à ériger à Székesfehérvár une statue de Bálint Hóman, historien, initiateur de mesures discriminatoires antisémites et de la déportation des Juifs hongrois, ministre du régime pro-nazi de Ferenc Szálasi (1944-1945), a échoué en décembre 2015 face à l’indignation d’organisations juives.

En février 2016, des Hongrois ont souhaité honorer Gyorgy Donath, avocat ayant soutenu les mesures antisémites lors de la Deuxième Guerre mondiale et opposant au communisme.

Le 29 février 2016, Le Fils de Saul (Son of Saul), film hongrois de László Nemes a reçu l'Oscar du Meilleur Film étranger. Arte et le CNC (Centre national de la cinématographie) avaient refusé de subventionner la production de ce film. Le réalisateur s'est alors tourné vers la Hongrie qui a financé partiellement ce film.


Du 15 janvier au 27 février 2016
A l’Institut hongrois
92, rue Bonaparte. 75006 Paris
Tél. : +33 1 43 26 06 44
Du mardi au vendredi de 9h à 19 h 30 et samedi de 13 h 30 à 19 h 30. Entrée libre

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Les citations proviennent du communiqué de presse.
Cet article a été publié le 25 février 2016.

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