Arte diffusera le 26 juillet 2015, dans le cadre de Pictures for Peace, La paix au bout de l’objectif, documentaire « palestiniennement correct » par Rémy Burkel (2015). Retour sur la photographie de Gary Hershorn, saisissant le 13 septembre 1993, à la Maison Blanche, la poignée de main historique et symbolique entre Yitzhak Rabin, Premier ministre israélien, et Yasser Arafat, président de l’OLP, sous l’autorité souriante de Bill Clinton, alors Président des Etats-Unis, lors d’une cérémonie télévisée habilement mise en scène.
« La manifestation du 11 janvier 2015 - Martin Argyroglo »
Arte propose Pictures for Peace, La paix au bout de l’objectif, « série documentaire dédiée aux images de guerre ou de paix qui ont marqué notre histoire récente. Saisir l'image choc qui fera le tour du monde, pour dénoncer la guerre ou célébrer l'espoir de paix : de la Seconde Guerre mondiale à nos jours, cette série documentaire décrypte les clichés qui ont marqué l'opinion publique. Willy Brandt à genoux à Varsovie, la poignée de main entre Sadate et Begin, la manifestation du 11 janvier 2015 à Paris… : douze modules courts sur des photos entrées dans les consciences ».
Poignée de main iconique
Le 13 septembre 1993, Gary Hershorn, photographe sportif canadien, est mandaté par Reuters pour couvrir, à la Maison-Blanche (Washington), la signature des accords d’Oslo en présence de Bill Clinton, alors Président des Etats-Unis.
Idéalement bien placé – sur la plate-forme face à la scène -, habile dans le changement rapide d’objectifs et de lentilles, il capte « la poignée de main historique entre Yasser Arafat » et d’un Yitzhak Rabin surmontant sa réticence », respectivement Président du comité exécutif de l'OLP (Organisation de libération de la Palestine) et Premier ministre travailliste israélien, le 13 septembre 1993, à Washington. Une poignée de main acceptée par Rabin pour éviter l’accolade et la bise familières à Arafat, et répétée par Rabin et Clinton dans le rôle d’Arafat, qui au départ voulait arborer un revolver…
L'assistance était composée de politiciens, diplomates, d'artistes, tel Theodore Bikel, etc.
L'assistance était composée de politiciens, diplomates, d'artistes, tel Theodore Bikel, etc.
Une signature qui a mis en porte-à-faux les dirigeants d’organisations Juives de diaspora qui désignaient jusqu’en 1993 Arafat sous les vocables de « terroriste », d’« assassin », et qui a privé les gouvernements israéliens successifs d’arguments pertinents lors des votes par des instances onusiennes sur l’admission de la « Palestine »… Un acte qui a embourbé les dirigeants politiques israéliens dans un abîme tragique de faux-semblants.
Un cliché symbolique visant à personnaliser un conflit en deux personnes qui se sont combattues, se réconcilient publiquement, sont séparés et rapprochés par un médiateur faiseur de paix. Une image très prisée des médias et de l'opinion publique, et qui revêt un aspect christique - le Christ accueillant au geste ample, ouvert - par Bill Clinton, debout derrière la table, entouré des membres des délégations d'Israël et de l'OLP.
Précédente poignée de main historique, modèle et matrice de celle de 1993 : celle de Menahem Begin, alors Premier ministre israélien, avec Anouar Sadate, président égyptien, en présence de Jimmy Carter, alors président des Etats-Unis, en mars 1979, sur la pelouse de la Maison Blanche, lors de la signature du traité de paix.
Près de 22 ans après cet événement, Arte véhicule le double mythe infondé selon lequel ces accords visaient à résoudre le « conflit israélo-palestinien » et à instaurer la paix.
Or, ainsi que l’ont démontré Joël Fishman et Ephraïm Karsh dans leur essai, La Guerre d’Oslo, la Déclaration de principes, résultant des négociations menées à Oslo (Norvège), signée à Washington, le 13 septembre 1993, en présence de Yitzhak Rabin, de Yasser Arafat, et de Bill Clinton, fixe des modalités de négociations pour mettre un terme au conflit et prévoit une autonomie palestinienne temporaire de cinq ans.
Non ratifiés par l'OLP, les accords d’Oslo appliquent la « stratégie par étapes » adoptée en 1974 par l’OLP :
« Les Palestiniens recevront tout territoire qu’Israël leur remettra, puis l’utiliseront comme tremplin pour procéder à d’autres gains territoriaux jusqu’à ce qu’ils obtiennent la « libération totale de la Palestine », la liquidation de l’Etat juif ».
Ce qu’énonce Yasser Arafat dès le 13 septembre 1993 dans un discours préenregistré et diffusé par la télévision jordanienne, et ce qu’il répète malgré les réactions de colère des dirigeants politiques israéliens.
Curieusement, Arte omet de citer la photo, prise trois mois après celle de Gary Hershon, montrant de dos deux enfants, l'un arborant une kippa, l'autre un keffieh, et mains posées sur l'épaule de l'autre. Pris par la journaliste américaine Ricki Rosen, ce cliché a été mis en scène, et a pour acteurs deux jeunes amis israéliens Juifs, Zvi Shapiro et Zemer Aloni.
Lors de la Deuxième guerre du Liban en 2006, des bloggeurs, dont Charles Johnson de Little Green Footballs, ont relevé que Adnan Hajj, photographe en free lance de Reuters, avait manipulé des photographies de cette guerre : recours à des logiciels de retouches de clichés pour assombrir ou dupliquer des fumées, etc. Reuters a vérifié ces dires, et retiré de sa base de données 920 photographies de Hajj. Gary Hershorn, alors rédacteur en chef des photos pour l’Amérique de Nord, a rappelé les normes de Reuters.
La paix au bout de l’objectif, de Rémy Burkel
Arte, 2015, 4 min
Sur Arte le 26 juillet 2015 à 20 h 43
Visuel : © AP Photo/Ron Edmonds
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