

Une exposition démystifiant une aventure artistique et
industrielle mythique, liée aux découvertes chimiques, brossant les divers
actes créatifs du temps de la prise de vue jusqu’à l’obscurité du laboratoire
lors du tirage.
L’image argentique originelle
résulte d’un savoir-faire artisanal. Elle est « étroitement liée aux sciences expérimentales, aux
applications pratiques des découvertes de la chimie et de la physique qui s’apparentent
parfois à l’art de la cuisine ».
Le daguerréotype

Le négatif sur
papier, le tirage sur papier salé et sur papier albuminé
Dès 1841, au
daguerréotype – objet unique– sont préférés divers « modes
de production des images fondés sur le système négatif-positif : négatifs sur
papier, négatifs à l’albumine, au collodion, puis à la gélatine… »
Président de la Société française de photographie (1855-1868),
Victor Regnault est un de ceux qui promeuvent en France le négatif sur papier, procédé
de l’Anglais William Henry Fox Talbot. Ancêtres du « calotype », les « dessins
photogéniques » sont « préparés au chlorure d’argent – sel très peu
sensible – et exigent donc des temps d’exposition très longs. Breveté en 1841, le
calotype, donne de meilleurs résultats lors de la prise de vue à la chambre
noire, grâce à une préparation du papier dans un mélange d’iodure d’argent –
sel très sensible – et de gallo-nitrate d’argent. Après exposition, l’image
latente est développée dans une solution de gallo-nitrate d’argent qui lui
donne une tonalité noire chaude, puis fixée, lavée et encaustiquée (parfois
huilée) pour augmenter la transparence de la feuille en vue du tirage.
Historiquement les calotypes sont tirés sur papiers salés ».
A l’époque des premiers ateliers photographiques
professionnels en France, Charles Marville débute en utilisant « le couple
négatif sur papier et papier salé ». Puis, il se spécialise dans le « négatif
sur verre au collodion et le tirage sur papier albuminé », dont la
résolution est meilleure. En 1847, Abel Niépce de Saint-Victor invente le
procédé négatif sur plaque de verre albuminée. En 1850, Louis-Désiré
Blanquart-Evrard introduit les tirages sur papiers albuminés. Ce mode de tirage
est le plus fréquent jusqu’à la fin du XIXe siècle. Le « papier albuminé
est un procédé à noircissement direct dont la brillance et la finesse
permettent de reproduire fidèlement les détails des négatifs sur verre ».

En 1851, l’apparition des « négatifs au collodion
humide réduit le temps de prise de vue de deux à soixante secondes, en fonction
de la qualité de la lumière. Fournissant une image d’excellente qualité,
adaptée à la photographie documentaire, le collodion présente néanmoins
l’inconvénient de devenir imperméable à l’état sec. Il doit donc être utilisé
encore humide », pour que le photographe puisse traiter ensuite les
images. Jean-Marie Taupenot, professeur
de chimie au Prytanée militaire de La Flèche, invente en 1855 un procédé
négatif sec, au collodion albuminé. La « recherche de substances aptes à
ralentir la dessiccation du collodion dans le but de retarder la prise de vue
après sensibilisation de la plaque entraîne toute une série d’expérimentations
photographiques à base de produits hygroscopiques ». Précieux pour la
photographie de reportage, le procédé Taupenot un rencontre un succès relatif car
sa sensibilité est bien plus faible que celle des plaques au collodion humide.
Avec les « progrès de la chimie photographique
apparaissent de 1871 à 1880 de nouvelles émulsions de plus en plus sensibles
qui ouvrent la voie à la photographie instantanée ». Ces émulsions «
sèches » au gélatino-bromure d’argent correspondent au début de la photographie
industrielle. L’avantage de la gélatine hautement hygroscopique : elle
peut « absorber les solutions, même à l’état sec ». Le photographe
prépare les plaques avant la prise de vue ; les plaques sont développées
et fixées ensuite, dans le laboratoire. La fabrication des émulsions à la
gélatine induit l’essor d’une production industrielle de masse, et de nombreuses
entreprises dont certaines atteindront une dimension internationale au XXe
siècle.
L’atelier d’Eugène
Atget, rue Campagne Première, laisse augurer les débuts de la photographie
instantanée du XXe siècle.
La photographie stéréoscopique est « contemporaine du
daguerréotype. La vision du relief, d’abord obtenue à partir de deux prises de
vue séparées et légèrement décalées, sera également produite par une seule
chambre à partir des années 1850. Montées côte à côte afin d’être regardées
dans un viseur spécial – le stéréoscope –, ces images font l’objet d’un
commerce fructueux. Elles restent prisées des amateurs jusqu’à une date très
avancée du XXe siècle, notamment dans le réseau des « stéreo clubs ».


D’abord « réservée à l’intimité de l’atelier, la prise
de vue va se déplacer vers l’extérieur grâce à l’application de procédés industriels
qui prolongent dans le temps la sensibilité des supports ».
A la fin du XIXe siècle,
l’apparition des émulsions instantanées
contribue au développement de la photographie d’amateur et de celle scientifique,
notamment judiciaire – photographies d’identité, des lieux du crime, etc. - ou
médicale.
La plaque autochrome

La « chambre
noire »

La photographie crée sa propre syntaxe, ses « sujets
imposés » tel l’autoportrait, etc.
Parallèlement, les usages commerciaux et professionnels se
diversifient grâce à la conception et la fabrication d’équipements plus légers et
de plus en plus petits.

La presse devra beaucoup à la photographie dans la
modification des paginations, dans la conception des Unes, dans l’accroche du lecteur,
dans l’ouverture au monde, dans la connaissance, bientôt quasi-simultanée avec
le téléphone et les autres technologies de l’information, des évènements sur le
globe, fixe pour l’éternité, ou la quasi-éternité, personnes et faits, etc.
La photographie de mode renouvelle le genre du portrait,
souvent en s’inspirant des créations du studio Harcourt. Elle est largement
tributaire de l’éclairage au magnésium, tel qu’il est aussi utilisé dans le
cinéma. Le studio de prise de vue est agencé autour du matériel d’éclairage :
aux verrières s’ajoutent les fonds clairs, les miroirs, les réflecteurs ou les
parasoleils… Quoique soumis à des impératifs commerciaux, les magazines de mode
offrent cependant aux photographes indépendants l’occasion d’imposer une vision
particulière.
Le Polaroid SX-70 est « un appareil à développement
instantané : le négatif et les couches réceptrices contenues dans un seul «
sandwich » fournissent rapidement une image unique qui, après traitement
chimique incorporé à l’appareil, apparaît directement positive. Si le Polaroid
noir et blanc est largement utilisé par les photographes de rue en raison de
l’accès immédiat à l’image positive qu’il propose au passant, les artistes
explorent surtout sa version couleur ».
Du tirage analogique
à la photographique numérique
Dans la seconde moitié du XXe siècle, s’ouvrent des
boutiques de photographes, consacrées également à la prise de vue, à la
réalisation de portraits d’identité ou à la reproduction d’images pour les
particuliers.
Dès les années 1960, la multiplication des laboratoires
pour amateurs ou professionnels est liée à deux évolutions techniques majeures
: « les nouveaux supports en papier plastique qui permettent d’effectuer
des tirages plus vite et à moindre coût ; l’essor de la photographie en couleur
à développement chromogène, décliné tantôt en diapositives tantôt en systèmes négatifs
positifs ».

La « mort annoncée de la photographie par voie «
humide » traditionnelle provoque très vite un regain d’intérêt pour la matière
historique des images et la richesse des processus de fabrication du passé ».
La conversion de photographies analogiques sur un fichier
informatique s’effectue avec des outils tels que scanners ou dos numériques.
Les prises de vue numériques peuvent par ailleurs être tirées sur procédés
argentiques par l’intermédiaire d’un agrandisseur numérique.
Ces bouleversements techniques créent de « nouvelles
hybridations artistiques ».
Jusqu’au 10 février 2013
18, rue Antoine-Bourdelle, 75015 Paris
Tél. : 01 49 54 73 73
Du mardi au dimanche de 10 h à 18 h
Visuels :
Affiche
JEAN-LOUP SIEFF (1933-2000)
Autoportrait pour mes vingt ans, Vevey, Suisse
Tirage gélatino-argentique, vers 1986.
D’après un négatif gélatino-argentique 6 x 6 cm , 1954.
Musée d’Art Moderne de la Ville de Paris © Estate Jeanloup
Sieff
Attribué à MAURICE BUCQUET
(1860-1921)
Photographe sur une
échelle, place de la Concorde, Paris 8e
Positif sur verre au gélatino-bromure
d’argent, plaque pour projection, vers 1900.
© Musée Carnavalet - Histoire
de Paris/Roger-Viollet
STANISLAS RATEL et MARIE-CHARLES-ISIDORE CHOISELAT
(1824-1904) et (1815-1858)
Portrait du daguerréotypiste Choiselat dans
son laboratoire.
Daguerréotype, 1843-1845.
© Musée Carnavalet/Roger-Viollet
ANDRÉ
ADOLPHE EUGÈNE DISDÉRI (1819-1889)
Disdéri
dans son atelier regardant des photographies sur « cartes de visite »
Tirage
sur papier albuminé, vers 1865.
D’après
un négatif sur verre au collodion humide, vers 1865.
© Musée
Carnavalet – Histoire de Paris/Roger-Viollet
ÉTIENNE JULES MAREY (1830-1904)
Photochronographe ouvert
montrant le disque éclaireur
percé de 10 fenêtres. Planche
n° 7 de l’album Station physiologique : travaux exécutés pendant l’année
1886-1887.
Tirage sur papier albuminé,
1886-1887.
D’après un négatif sur verre au
gélatino-bromure d’argent, 1886-1887.
© Bibliothèque de l’Hôtel de
Ville, Paris/Roger-Viollet
NADAR (FÉLIX TOURNACHON dit) et NADAR JEUNE (ADRIEN TOURNACHON dit), (1820-1910) et (1825-1903)
Pierrot photographe, portrait du mime
Charles Deburau
Tirage sur papier salé viré à l’or avec une couche
protectrice, 1854.D’après un négatif sur verre au collodion humide,
1854.
© Musée Carnavalet/Roger-Viollet
AUGUSTE LUMIÈRE et LOUIS
LUMIÈRE
(1862-1954) et (1864-1948)
Coin du laboratoire de
Monsieur Louis Lumière à Lyon
Autochrome, 1902-1905.
© Société Française de
Photographie, Paris
ANONYME
François Kollar avec sa
chambre en bois à soufflet
Tirage au gélatino-bromure d’argent,
vers 1932. D’après un négatif au gélatino-bromure d’argent, vers 1932.
© Bibliothèque Forney,
Paris/Roger-Viollet
ILSE BING (1899-1998)
Autoportrait au Leica
Tirage au gélatino-bromure d’argent, 1986.
D’après un négatif gélatino-argentique sur support souple,
1931.
© Musée Carnavalet – Histoire de Paris/ Roger-Viollet
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Les citations proviennent du dossier de presse. Cet article a été publié le 8 février 2013.
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