En mars 1940, durant la Deuxième Guerre mondiale, dans la forêt de Katyn, située au sud de la Russie, des milliers d’officiers de l’armée et de représentants de l'élite intellectuelle polonais ont été tués par la police secrète soviétique. Dès 1943, et jusqu’en 1991, l’URSS a imputé aux Nazis ce massacre de l'élite polonaise ordonné par Staline. Arte diffusera le 25 février 2020 "Les bourreaux de Staline - Katyn, 1940" (Stalins Henker. Das Massaker von Katyn) de Cédric Tourbe.
« Le pacte Hitler-Staline » par Cédric Tourbe
« Le savant, l'imposteur et Staline. Comment nourrir le peuple » par Gulya Mirzoeva
« Hiroshima, la défaite de Staline » par Cédric Condon
« L'ombre de Staline » par Thomas Johnson
Le 23 août 1939, l’Allemagne nazie (IIIe Reich) dirigée par Hitler et l’URSS (Union des républiques socialistes soviétiques) menée par Staline signent un pacte stipulant une non-agression et une répartition des territoires entre ces deux pays.« Le savant, l'imposteur et Staline. Comment nourrir le peuple » par Gulya Mirzoeva
« Goulags » par Michaël Prazan
« Goulag - Une histoire soviétique » de Patrick Rotman
« Le dernier complot de Staline » par Philippe Saada
"Les bourreaux de Staline - Katyn, 1940" de Cédric Tourbe« Goulag - Une histoire soviétique » de Patrick Rotman
« Le dernier complot de Staline » par Philippe Saada
« Hiroshima, la défaite de Staline » par Cédric Condon
« L'ombre de Staline » par Thomas Johnson
Le 1er septembre 1939, l’armée allemande envahit la Pologne. L’Allemagne nazie institue un gouvernement général de Pologne.
Le 17 septembre 1939, l’Armée rouge envahit la Pologne.
En mars 1940, dans la forêt de Katyń, près de Smolensk, la police secrète soviétique assassine, sur ordre de Staline, des milliers d’officiers polonais prisonniers de guerre. Ligoté, chaque officier polonais est exécuté à bout portant d’une balle dans la tête. Ces cadavres emplissent des fosses communes.
Lors de l’offensive allemande Barbarossa, les Allemands découvrent en août 1941 ces charniers, et en rendent responsables l’URSS. Mais quand l’URSS reprend la région de Katyń, elle en rend coupable l’Allemagne nazie.
Ce mensonge sur les auteurs du massacre à Katyń a perduré pendant des décennies, en particulier sous la Pologne communiste passée sous l’orbite de l’URSS de Staline et de ses successeurs.
En 1991, Mikhail Gorbatchev reconnaît la responsabilité de Staline dans ce massacre.
Le 10 avril 2010, l'avion transportant une délégation officielle polonaise dirigée par le président Lech Aleksander Kaczyński, et se rendant à la cérémonie commémorant le 70e anniversaire du massacre de Katyń, s'écrase près de Smolensk (fédération de Russie). Aucun des passagers ne survit à cet accident.
Rendues publiques depuis le 10 septembre 2012, des archives américaines ont révélé que les Etats-Unis savaient au moins depuis 1943 que l'Union soviétique, et non le IIIe Reich, avait commis le massacre de Katyn.
A noter que des propagandistes musulmans ou arabes, notamment palestiniens, ont été formés par des nazis et des communistes, et que la propagande nazie a été dirigée aussi vers le monde arabe. La propagande palestinienne n'a pas hésité à attribuer à l'armée israélienne les morts dont elle est responsable. Elle a été parfois relayée par des médias occidentaux : ainsi, lors de l'Opération Plomb durci, France 2 avait diffusé la vidéo d'une explosion parmi des civils dans la bande de Gaza en alléguant à tort qu'Israël en était responsable. Or, il s'agissait d'une explosition due au Hamas et datant de 2005. A Sarajevo, en 1994, une explosion parmi des civils avait été imputée à l'armée serbe. Une polémique a surgi : pour certains, l'armée de Bosnie-Herzégovine en serait responsable.
Le 10 avril 2010, l'avion transportant une délégation officielle polonaise dirigée par le président Lech Aleksander Kaczyński, et se rendant à la cérémonie commémorant le 70e anniversaire du massacre de Katyń, s'écrase près de Smolensk (fédération de Russie). Aucun des passagers ne survit à cet accident.
Rendues publiques depuis le 10 septembre 2012, des archives américaines ont révélé que les Etats-Unis savaient au moins depuis 1943 que l'Union soviétique, et non le IIIe Reich, avait commis le massacre de Katyn.
Le 13
février 2013, la Cour européenne des droits de l’homme a tenu une audience de Grande Chambre dans l’affaire Janowiec
et autres contre Russie (Requêtes nos 55508/07 et
29520/09). « L’affaire concerne des griefs selon lesquels l’enquête menée
par les autorités russes sur le massacre de Katyń, survenu en 1940, aurait été
inadéquate.
Les
requérants sont 15 ressortissants polonais, proches de 12 victimes du massacre
de Katyń. Ces 12 victimes étaient des officiers de la police et de l’armée, un
médecin militaire et un directeur d’école primaire. Après l’invasion de la
République de Pologne par l’Armée rouge en septembre 1939, elles furent conduites
dans des camps ou des prisons dirigés par les Soviétiques et furent tuées par
les services secrets, sans avoir été jugées, avec plus de 21 000 autres
personnes en avril et mai 1940, puis enterrées dans des fosses communes dans la
forêt de Katyń (proche de Smolensk) et dans les villages de Pyatikhatki et
Mednoye.
Une enquête
sur le massacre fut ouverte en 1990. La procédure pénale prit fin en 2004 par
une décision de clore l’enquête. Le texte de cette décision étant toujours
classé secret, les requérants n’ont accès ni à celui-ci ni à aucune autre
information concernant le dossier de l’enquête pénale sur Katyń. Les demandes
répétées qu’ils ont faites en vue d’être autorisés à consulter cette décision
et d’obtenir sa déclassification ont toujours été rejetées par les tribunaux
russes, au motif notamment que les requérants n’avaient aucun droit d’accès aux
dossiers dès lors qu’ils ne s’étaient pas vu reconnaître la qualité de
victimes. Les demandes des requérants visant à la réhabilitation de leurs proches
ont également été écartées par le parquet militaire principal, de même que par
les tribunaux.
Le 26
novembre 2010, la Douma russe émit une déclaration au sujet de la « tragédie de
Katyń » dans laquelle elle réaffirmait que « l’extermination massive de
citoyens polonais sur le territoire soviétique pendant la Seconde Guerre
mondiale » avait été perpétrée sur l’ordre de Staline et qu’il fallait
continuer à « vérifier les listes des victimes, rétablir la réputation des
personnes mortes à Katyń et ailleurs et mettre au jour les circonstances de
cette tragédie (...) ».
Invoquant en
particulier les articles 2 (droit à la vie) et 3 (interdiction des traitements inhumains
ou dégradants) de la Convention européenne des droits de l’homme, les requérants
se plaignent que les autorités russes n’ont pas mené une enquête effective sur
le décès de leurs proches et ont adopté une attitude dédaigneuse face à toutes
les demandes d’information sur ce qui était arrivé aux défunts ».
A noter que des propagandistes musulmans ou arabes, notamment palestiniens, ont été formés par des nazis et des communistes, et que la propagande nazie a été dirigée aussi vers le monde arabe. La propagande palestinienne n'a pas hésité à attribuer à l'armée israélienne les morts dont elle est responsable. Elle a été parfois relayée par des médias occidentaux : ainsi, lors de l'Opération Plomb durci, France 2 avait diffusé la vidéo d'une explosion parmi des civils dans la bande de Gaza en alléguant à tort qu'Israël en était responsable. Or, il s'agissait d'une explosition due au Hamas et datant de 2005. A Sarajevo, en 1994, une explosion parmi des civils avait été imputée à l'armée serbe. Une polémique a surgi : pour certains, l'armée de Bosnie-Herzégovine en serait responsable.
« Post Mortem »
« Katyn », film émouvant d’Andrzej Wajda (2007), insiste sur les vies brisées par ce mensonge d’Etats, sur cette tragédie historique majeure dans l’histoire de la Pologne, et son instrumentalisation à des fins de propagande par deux régimes dictatoriaux. Andrzej Wajda est mort le 9 octobre 2016 à l'âge de 90 ans.
Andrzej Wajda, qui a adapté au cinéma le livre d’Andrzej Mularczyk, Post Mortem, a dédié son film à ses parents. Ce septuagénaire a rendu hommage à son père assassiné à Katyń. Sa mère avait refusé l’idée de cette mort.
Il a voulu que son film « soit le récit du drame et des souffrances subis par de multiples familles, victimes de Staline et du silence qu’il parvint à imposer à ses alliés d’alors : la Grande-Bretagne et les Etats-Unis ».
Le réalisateur a construit son film de fiction inspiré de ces faits historiques autour de trois personnages féminins principaux : Anna, épouse du capitaine Andrzej qui a refusé de fuir, l’épouse d’un général qui découvre en avril 1943 les images des charniers filmés par les Allemands, et Agnieszka, sœur d’un ingénieur aéronautique et pilote, qui tente en vain de faire poser une stèle rétablissant la vérité sur les circonstances du décès de son frère.
Andrzej Wajda souligne les conséquences dramatiques de ce mensonge d’Etats, de cette vérité occultée sous l’ère communiste car elle ternirait l’image du « Grand frère » soviétique.
Pour évoquer la grisaille et la dureté de la vie en ces périodes dramatiques, les couleurs sont assourdies, ternes – hormis le rouge vif du drapeau polonais -, la lumière froide éclaire des rues tristes de Cracovie.
Rarement diffusé en France, ce film a été primé (sept Aigle) et distingué par le Prix du film polonais 2008.
La copie du DVD transmise manque de sous-titres du russe ou de l’allemand en français pour de nombreuses scènes.
"Les bourreaux de Staline - Katyn, 1940"
Arte diffusera le 25 février 2020 "Les bourreaux de Staline - Katyn, 1940" (Stalins Henker. Das Massaker von Katyn) de Cédric Tourbe. "En 1940, le NKVD fait exécuter plus de 22 000 prisonniers de guerre polonais, dont 4 500 dans la forêt de Katyn. Dans un remarquable documentaire, Cédric Tourbe lève le voile sur un crime de masse longtemps nié par le régime soviétique."
"Le 17 septembre 1939, sans avoir déclaré la guerre à la Pologne, l'armée rouge envahit sa partie orientale. Conformément aux dispositions secrètes du pacte germano-soviétique, Hitler et Staline viennent de se partager leur voisin. Dans la foulée, le NKVD, la police politique soviétique, organise le regroupement dans les monastères de Kozielsk, Starobielsk et Ostachkov de prisonniers de guerre polonais, principalement des officiers, et des représentants de l'élite intellectuelle".
"En septembre 1943, alors que la Wehrmacht s'enlise à Stalingrad, Goebbels annonce la découverte d'un charnier dans la forêt de Katyn, près de Smolensk, à la frontière biélorusse. Après avoir mis sur pied une commission d'enquête internationale, composée de médecins légistes originaires de pays alliés à l'Allemagne ou sous son contrôle, le ministre de la propagande nazie attribue au NKVD l'exécution d'une balle dans la nuque de plusieurs milliers d'officiers polonais. En accusant les "judéo-bolcheviks" d'avoir commis entre avril et mai 1940 ce crime de masse, le IIIe Reich espère désolidariser Churchill et Roosevelt des Soviétiques. Mais ni l'Amérique ni l'Angleterre ne peuvent se permettre de lâcher leur allié russe, qui, du reste, nie farouchement sa responsabilité dans le massacre et en accuse les nazis. Ce mensonge va perdurer jusqu'en 1990, quelques mois seulement avant l'effondrement de l'URSS…"
"Pour comprendre comment le crime de masse de Katyn a été commis, ce qui l'a rendu possible et qui a permis qu'il soit nié par ses responsables pendant près d'un demi-siècle, Cédric Tourbe et Olivia Gomolinski déroulent le fil d'une histoire qui débute à l’aube du régime bolchevik avec l'institution en 1917 de la Tcheka. Chargée d’éliminer les oppositions, cette police secrète, qui officiera ensuite sous le nom de Guépéou, NKVD, puis KGB, va peaufiner, intensifier et masquer ses méthodes criminelles, des exactions de la guerre civile des années 1920 aux assassinats et déportations à la chaîne de la fin des années 1930".
"S'appuyant sur de précieuses archives, notamment celles, inédites, découvertes par l'historien Nikita Petrov de l’ONG russe Memorial, les souvenirs d’officiers polonais ayant réchappé au massacre de 1940, parmi lesquels Salomon Slowes, un médecin juif, et l'officier de réserve Josef Czapski, un artiste peintre qui, après la guerre, témoignera devant la Chambre des représentants aux États-Unis, et une riche iconographie (superbes illustrations de Thierry Murat), cette fresque historique met des noms et des visages sur les victimes et les responsables d'un crime hors norme, qui épouse l'histoire de l'Union soviétique, de la Pologne, de la Seconde Guerre mondiale et de la guerre froide. Une somme exemplaire."
"Qu'est-ce qui vous a amené à vous intéresser au massacre de Katyn ?
Cédric Tourbe : Dans la forêt de Katyn, en Russie, reposent environ 4 500 des 22 000 Polonais exécutés par le NKVD en 1940. Ce massacre découlait directement du pacte germano-soviétique auquel je me suis précédemment intéressé. La genèse de ce film repose sur la découverte, dans les archives de Smolensk, par l'historien russe Nikita Petrov, d’un ordre du NKVD récompensant d’un mois de salaire supplémentaire les bourreaux de Katyn, avec leurs dossiers personnels. Ayant accès à l'ensemble de ce matériel inédit, Olivia Gomolinski 2, coauteure de ce documentaire, a contacté le producteur Alexandre Hallier, qui nous a mis en contact pour travailler sur ce film.
Comment vous êtes-vous emparé de cette histoire tragique ?
Événement tellurique de la Seconde Guerre mondiale, Katyn est aussi un fil, qui, une fois tiré, dévoile la pelote des crimes perpétrés par la police politique soviétique. Avant d'en aborder le comment, j'ai voulu en comprendre le pourquoi, et remonter aux premières années au pouvoir des bolcheviks. Afin d'accélérer le passage à la dictature du prolétariat que Lénine appelait de ses vœux, la première police politique, la Tcheka, est créée dès 1917. Les "tchékistes" sont chargés d’éliminer les anciennes élites et toute opposition interne. Ils "soviétisent" méthodiquement la population. En 1939, suite au pacte Hitler-Staline, l’Armée rouge envahit l’est de la Pologne. Pour le NKVD le massacre de Katyn qui suit – et la déportation dans les camps du Goulag d’un million de Polonais – n’est qu’une opération de soviétisation tout à fait routinière, identique à toutes celles qui se déroulent en URSS depuis vingt ans.
Comment le NKVD a-t-il sélectionné les Polonais à exécuter ?
Dès l'entrée de l'Armée rouge en Pologne, Béria, qui dirige le NKVD, donne l'ordre de remettre à ses hommes tous les officiers et garde-frontières polonais faits prisonniers. Une fois acheminés vers différents "points de collecte", ils sont emprisonnés à Kozielsk, Starobielsk et Ostachkov, trois monastères utilisés comme lieux d'exécution par la Tcheka dès 1918. Il semble que l'on n'ait gardé en vie que ceux qui, d'une façon ou d'une autre, pouvaient être utiles au régime. Sur les 395 officiers épargnés, une quinzaine ont été "retournés" : ils vont former la base de l'encadrement de l'armée de libération polonaise communiste lorsque les Soviétiques ne reconnaîtront plus celle du gouvernement de Sikorski, en exil à Londres.
Lorsqu'il est révélé par Goebbels en 1943, comment ce crime est-il considéré ?
Lorsqu'il l'apprend, Roosevelt n'y croit pas : il est impensable pour lui que l'on ait pu tuer en si grand nombre des gens qui ne représentaient pas une menace. Churchill, qui sait que la guerre ne pourra pas être gagnée sans les Russes, est très embarrassé. La France collaborationniste de Vichy en fait une arme dissuasive contre le péril "judéo-bolchevik". Quant aux nazis, qui ont eu connaissance de l'existence du charnier dès 1941 car ils occupaient la zone, ils instrumentalisent leur découverte pour déstabiliser l'alliance entre les Anglo-Américains et les Russes. Sans cela, il y a fort à parier que nul n'aurait jamais entendu parler de ce crime de masse.
Quel rôle a joué le secret dans ce drame ?
Difficile à appréhender, cette obsession du secret du pouvoir soviétique repose en fait sur un postulat simple : les moyens qui permettent d'établir la dictature du prolétariat ne regardent personne. Cette culture du secret, qui masque l'étendue des crimes, fait partie de l'ADN du régime. Lors des grandes purges de 1937-1938, on estime à 700 000 le nombre de Soviétiques exécutés. Mais, à l'époque, personne ne s'en rend compte, et ce n'est qu'après l'effondrement de l'Union soviétique que l'on découvre l'étendue des tueries.
Reste-t-il des choses à apprendre sur Katyn et sur les crimes staliniens ?
Certainement, car les chercheurs ont encore accès à peu d'archives officielles. En 1959, Chélépine, à la tête du KGB, a proposé à Khrouchtchev de détruire les dossiers personnels des 22 000 Polonais exécutés en 1940 de peur que l’affaire ne s’ébruite un jour et pour préserver l'image du pays à l'international. Officiellement, pour Moscou, Katyn est en effet un crime nazi et le restera jusqu’à l’aveu du Kremlin en 1990 ! Concernant Staline, les archives ne sont pas ouvertes. Il en est de même pour Molotov, Kalinine, Vorochilov et Mikoyan, les autres membres du Politburo impliqués dans l'opération Katyn. Aujourd'hui, le FSB, qui a succédé au KGB, continue de tout verrouiller, et il est improbable que Vladimir Poutine, ancien "tchékiste" lui-même, souhaite changer cela.
1. Cédric Tourbe a réalisé deux autres documentaires sur l'histoire soviétique, coproduits par ARTE : Lénine, une autre histoire de la révolution russe et Le pacte Hitler-Staline, rediffusé mardi 25 février à 22.25.
2. Olivia Gomolinski traduit actuellement l'ouvrage que Nikita Petrov a consacré à Katyn, et qui paraîtra prochainement aux éditions Noir sur blanc."
"Les bourreaux de Staline - Katyn, 1940" de Cédric Tourbe
France, 2020, 98 min
Sur Arte les 25 février 2020 à 2 h 50, 14 décembre 2021 à 20 h 50
Disponible du 18/02/2020 au 24/04/2020, du 07/12/2021 au 11/02/2022
"Les bourreaux de Staline - Katyn, 1940"
Arte diffusera le 25 février 2020 "Les bourreaux de Staline - Katyn, 1940" (Stalins Henker. Das Massaker von Katyn) de Cédric Tourbe. "En 1940, le NKVD fait exécuter plus de 22 000 prisonniers de guerre polonais, dont 4 500 dans la forêt de Katyn. Dans un remarquable documentaire, Cédric Tourbe lève le voile sur un crime de masse longtemps nié par le régime soviétique."
"En septembre 1943, alors que la Wehrmacht s'enlise à Stalingrad, Goebbels annonce la découverte d'un charnier dans la forêt de Katyn, près de Smolensk, à la frontière biélorusse. Après avoir mis sur pied une commission d'enquête internationale, composée de médecins légistes originaires de pays alliés à l'Allemagne ou sous son contrôle, le ministre de la propagande nazie attribue au NKVD l'exécution d'une balle dans la nuque de plusieurs milliers d'officiers polonais. En accusant les "judéo-bolcheviks" d'avoir commis entre avril et mai 1940 ce crime de masse, le IIIe Reich espère désolidariser Churchill et Roosevelt des Soviétiques. Mais ni l'Amérique ni l'Angleterre ne peuvent se permettre de lâcher leur allié russe, qui, du reste, nie farouchement sa responsabilité dans le massacre et en accuse les nazis. Ce mensonge va perdurer jusqu'en 1990, quelques mois seulement avant l'effondrement de l'URSS…"
"Pour comprendre comment le crime de masse de Katyn a été commis, ce qui l'a rendu possible et qui a permis qu'il soit nié par ses responsables pendant près d'un demi-siècle, Cédric Tourbe et Olivia Gomolinski déroulent le fil d'une histoire qui débute à l’aube du régime bolchevik avec l'institution en 1917 de la Tcheka. Chargée d’éliminer les oppositions, cette police secrète, qui officiera ensuite sous le nom de Guépéou, NKVD, puis KGB, va peaufiner, intensifier et masquer ses méthodes criminelles, des exactions de la guerre civile des années 1920 aux assassinats et déportations à la chaîne de la fin des années 1930".
"S'appuyant sur de précieuses archives, notamment celles, inédites, découvertes par l'historien Nikita Petrov de l’ONG russe Memorial, les souvenirs d’officiers polonais ayant réchappé au massacre de 1940, parmi lesquels Salomon Slowes, un médecin juif, et l'officier de réserve Josef Czapski, un artiste peintre qui, après la guerre, témoignera devant la Chambre des représentants aux États-Unis, et une riche iconographie (superbes illustrations de Thierry Murat), cette fresque historique met des noms et des visages sur les victimes et les responsables d'un crime hors norme, qui épouse l'histoire de l'Union soviétique, de la Pologne, de la Seconde Guerre mondiale et de la guerre froide. Une somme exemplaire."
"Qu'est-ce qui vous a amené à vous intéresser au massacre de Katyn ?
Cédric Tourbe : Dans la forêt de Katyn, en Russie, reposent environ 4 500 des 22 000 Polonais exécutés par le NKVD en 1940. Ce massacre découlait directement du pacte germano-soviétique auquel je me suis précédemment intéressé. La genèse de ce film repose sur la découverte, dans les archives de Smolensk, par l'historien russe Nikita Petrov, d’un ordre du NKVD récompensant d’un mois de salaire supplémentaire les bourreaux de Katyn, avec leurs dossiers personnels. Ayant accès à l'ensemble de ce matériel inédit, Olivia Gomolinski 2, coauteure de ce documentaire, a contacté le producteur Alexandre Hallier, qui nous a mis en contact pour travailler sur ce film.
Comment vous êtes-vous emparé de cette histoire tragique ?
Événement tellurique de la Seconde Guerre mondiale, Katyn est aussi un fil, qui, une fois tiré, dévoile la pelote des crimes perpétrés par la police politique soviétique. Avant d'en aborder le comment, j'ai voulu en comprendre le pourquoi, et remonter aux premières années au pouvoir des bolcheviks. Afin d'accélérer le passage à la dictature du prolétariat que Lénine appelait de ses vœux, la première police politique, la Tcheka, est créée dès 1917. Les "tchékistes" sont chargés d’éliminer les anciennes élites et toute opposition interne. Ils "soviétisent" méthodiquement la population. En 1939, suite au pacte Hitler-Staline, l’Armée rouge envahit l’est de la Pologne. Pour le NKVD le massacre de Katyn qui suit – et la déportation dans les camps du Goulag d’un million de Polonais – n’est qu’une opération de soviétisation tout à fait routinière, identique à toutes celles qui se déroulent en URSS depuis vingt ans.
Comment le NKVD a-t-il sélectionné les Polonais à exécuter ?
Dès l'entrée de l'Armée rouge en Pologne, Béria, qui dirige le NKVD, donne l'ordre de remettre à ses hommes tous les officiers et garde-frontières polonais faits prisonniers. Une fois acheminés vers différents "points de collecte", ils sont emprisonnés à Kozielsk, Starobielsk et Ostachkov, trois monastères utilisés comme lieux d'exécution par la Tcheka dès 1918. Il semble que l'on n'ait gardé en vie que ceux qui, d'une façon ou d'une autre, pouvaient être utiles au régime. Sur les 395 officiers épargnés, une quinzaine ont été "retournés" : ils vont former la base de l'encadrement de l'armée de libération polonaise communiste lorsque les Soviétiques ne reconnaîtront plus celle du gouvernement de Sikorski, en exil à Londres.
Lorsqu'il est révélé par Goebbels en 1943, comment ce crime est-il considéré ?
Lorsqu'il l'apprend, Roosevelt n'y croit pas : il est impensable pour lui que l'on ait pu tuer en si grand nombre des gens qui ne représentaient pas une menace. Churchill, qui sait que la guerre ne pourra pas être gagnée sans les Russes, est très embarrassé. La France collaborationniste de Vichy en fait une arme dissuasive contre le péril "judéo-bolchevik". Quant aux nazis, qui ont eu connaissance de l'existence du charnier dès 1941 car ils occupaient la zone, ils instrumentalisent leur découverte pour déstabiliser l'alliance entre les Anglo-Américains et les Russes. Sans cela, il y a fort à parier que nul n'aurait jamais entendu parler de ce crime de masse.
Quel rôle a joué le secret dans ce drame ?
Difficile à appréhender, cette obsession du secret du pouvoir soviétique repose en fait sur un postulat simple : les moyens qui permettent d'établir la dictature du prolétariat ne regardent personne. Cette culture du secret, qui masque l'étendue des crimes, fait partie de l'ADN du régime. Lors des grandes purges de 1937-1938, on estime à 700 000 le nombre de Soviétiques exécutés. Mais, à l'époque, personne ne s'en rend compte, et ce n'est qu'après l'effondrement de l'Union soviétique que l'on découvre l'étendue des tueries.
Reste-t-il des choses à apprendre sur Katyn et sur les crimes staliniens ?
Certainement, car les chercheurs ont encore accès à peu d'archives officielles. En 1959, Chélépine, à la tête du KGB, a proposé à Khrouchtchev de détruire les dossiers personnels des 22 000 Polonais exécutés en 1940 de peur que l’affaire ne s’ébruite un jour et pour préserver l'image du pays à l'international. Officiellement, pour Moscou, Katyn est en effet un crime nazi et le restera jusqu’à l’aveu du Kremlin en 1990 ! Concernant Staline, les archives ne sont pas ouvertes. Il en est de même pour Molotov, Kalinine, Vorochilov et Mikoyan, les autres membres du Politburo impliqués dans l'opération Katyn. Aujourd'hui, le FSB, qui a succédé au KGB, continue de tout verrouiller, et il est improbable que Vladimir Poutine, ancien "tchékiste" lui-même, souhaite changer cela.
1. Cédric Tourbe a réalisé deux autres documentaires sur l'histoire soviétique, coproduits par ARTE : Lénine, une autre histoire de la révolution russe et Le pacte Hitler-Staline, rediffusé mardi 25 février à 22.25.
2. Olivia Gomolinski traduit actuellement l'ouvrage que Nikita Petrov a consacré à Katyn, et qui paraîtra prochainement aux éditions Noir sur blanc."
"Les bourreaux de Staline - Katyn, 1940" de Cédric Tourbe
France, 2020, 98 min
Sur Arte les 25 février 2020 à 2 h 50, 14 décembre 2021 à 20 h 50
Disponible du 18/02/2020 au 24/04/2020, du 07/12/2021 au 11/02/2022
Visuels :
Extrait du documentaire " Les Bourreaux de Katyn" de Cédric Tourbe
© Krasnogorsk / La Générale de P
Extrait du documentaire " Les Bourreaux de Katyn" de Cédric Tourbe
© Krasnogorsk / La Générale de P
« Katyń » d’Andrzej Wajda
Pologne, 2007
116 minutes
Avec : Andrzej Chyra (Jerzy), Maja Ostaszewska (Anna), Artur Zmijewski (Andrzej), Danuta Stenka (Róza), Jan Englert (le général), Magdalena Cielecka (Agnieszka), Agnieszka Glinska (Irena), Pawel Malaszynski (Piotr)
Avec : Andrzej Chyra (Jerzy), Maja Ostaszewska (Anna), Artur Zmijewski (Andrzej), Danuta Stenka (Róza), Jan Englert (le général), Magdalena Cielecka (Agnieszka), Agnieszka Glinska (Irena), Pawel Malaszynski (Piotr)
Diffusions les 14 avril 2011 à 20 h 40 et 19 avril 2011 à 01 h 30
Visuels : © Kineos
Articles
sur ce blog concernant :
Les citations sur les films sont d'Arte.Cet article a été publié le 14 avril 2011, puis le 18 septembre 2012 et le :
- 5 février 2013 à l'approche de la diffusion de L'aiguilleur des rêves, le cinéma d'Andrzej Wajda, documentaire d'Anja Krugg-Metzinger sur Arte le 6 février 2013 à 23 h 45 ;
- 12 octobre 2016, 25 février 2020.
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